La cabane des écrivains, une "zone à défendre"

France Culture
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Marielle Macé poursuit sa grande aventure littéraire. Son dernier ouvrage est une une ode à l’optimisme et au lyrisme. Autour de cette figure qu’est la cabane, montée sur les ZAD, les places et les rives, c’est surtout l’idée d’habiter le monde autrement qui fait de la cabane un lieu de liberté. * *

Aujourd'hui je voudrais vous parler d’une intellectuelle que je suis depuis longtemps, Marielle Macé, déjà auteure de plusieurs livres importants, et qui n’a pas son pareil pour élever nos consciences en faisant rayonner la littérature dans nos vies. En prononçant ce mot, « élever », je me souviens de ma première rencontre avec elle, c’était il y a huit ans, à son domicile, j’avais monté les marches d’un escalier étroit, qui débouchait sur une pièce dominant le cimetière du Montparnasse, à Paris, et je m’étais étonné de voir si peu de livres chez elle quand elle m’a dit : « En fait, je reviens sans cesse à quelques ouvrages qui m’obligent à regarder ailleurs ». *

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Parmi ces textes élus, il y avait ceux de Roland Barthes. Or on se souvient que Barthes associait le plaisir de lire, et plus largement de vivre, aux vertiges d’un refuge haut perché : « Enfant je m’étais fait une retraite à moi, cabane et belvédère, au palier supérieur d’un escalier extérieur, sur le jardin : j’y lisais, écrivais, collais des papillons, bricolais », notait-il. La cabane de l’écrivain, oui, c’est ce havre où l’amour des mêmes textes coïncide avec le désir d’autre chose.
"Jardiner les possibles"
D’où l’émotion qui saisit en lisant le nouveau livre de Marielle Macé, un mince volume intitulé, justement, Nos cabanes. C’est une méditation sur la « zone à défendre » de Notre-Dame-des-Landes. Quel « nous » s’est noué dans les dizaines de cabanes surgies à travers cette zone humide des « Noues » ? A quels gestes, à quelle espérance ont donné refuge ces baraques agricoles, squats-potagers ou  cahutes-bibliothèques ? « Les noues, les noës comme autant d’arches, arches d’eaux vives et de pratiques, où conserver non pas des choses mais des forces, où faire monter des inquiétudes, des pensées, des combats », écrit Marielle Macé, née elle-même dans la région. Inquiétudes pour les formes de vie, pensées de l’eau et des oiseaux, _combats_joyeux voués à « jardiner les possibles », malgré tout, dans ce monde injuste, abîmé.

En refermant le livre, pourtant, j’étais convaincu que ce discours-là, explicitement politique, n’était pas l’essentiel. Le bonheur de pénétrer dans un tel texte, c’est surtout celui de retrouver un espace familier, l’espace de langage sensible et rythmé que s’est bâti Marielle Macé. Voici la vraie jubilation, l’évidence solide d’être reçu dans un lieu à part, la tanière où une plume aimée a rassemblé les quelques textes, et obsessions qui lui permettent d’habiter le temps.
Forme littéraire et force révoltée, tout se tient
A peine entré, on reconnaît ce lieu où l’expérience littéraire rencontre la recherche du vrai. Bientôt, on savoure le tact avec lequel Marielle Macé donne du style à nos existences. Enfin installés au cœur de ce doux cocon, on se souvient que, chez elle, le lieu du « style » se confond avec l’endroit de la colère, « là où se révèle ce à quoi on tient ». Soudain tout se tient, forme littéraire et force révoltée, alors on rend grâce à Marielle Macé de nous accueillir chez elle, dans cette haute cabane poétique qui élargit nos perceptions et maintient ouverte la vie.

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