«On s'est demandé si le blob pouvait résoudre des problèmes nutritionnels, auxquels sont confrontés tous les organismes vivants. On s'est aperçu qu'il faisait ça mieux que nous.» explique la biologiste Audrey Dussutour.
- Roland Lehoucq Astrophysicien
- Audrey Dussutour Directrice de recherche au CNRS, au Centre de Recherches sur la Cognition Animale (CRCA) à l’Université Toulouse III – Paul Sabatier.
Une aventure humaine, cela n’arrive pas comme ça, ça ne surgit pas tout seul du néant pur. Toute aventure humaine, quelle que soit son envergure, exige des conditions de possibilité.
On raconte par exemple qu’Honoré de Balzac avait besoin de duchesses pour écrire de la bonne littérature. Le Tour de France réclame quant à lui son lot d’étapes parsemées de cols de légende pour s’élever lui-même jusqu’au mythe.
Mais ce que je dis là vaut aussi et surtout pour la pensée : qu’elle soit scientifique ou philosophique, elle exige, elle aussi, pour avancer, que certaines conditions de possibilité soient réunies. Pour s’arracher à ses routines et se guérir de ses facilités, elle a besoin de se frotter au bizarre, au déroutant, au paradoxal, faute de quoi elle se bloque et se fige en un cercle monotone et répétitif.
Voilà pourquoi, pour qui aime la réflexion, toute rencontre avec l’étrange a des parfums d’aubaine : elle oblige à penser plus haut, à réfléchir autrement, à dépasser les idées reçues ou innées.
Le blob mange comme un animal et se reproduit comme un champignon
Alors, aujourd’hui, en public à Nantes, aux Utopiales, nous allons un peu secouer la vie de la pensée en distillant du bizarre. Nous allons même le faire de deux façons différentes. D’abord en évoquant les Utopiales elles-mêmes, qui sont consacrées cette année au corps dans tous ses états : qu’est-ce que la Science-fiction nous raconte de ce qui nous attend en matière de devenir du corps ? Le corps va-t-il devenir malade de son environnement ou au contraire flirter avec l’immortalité ? Allons-nous nous cloner ? Y aura-t-il bientôt des utérus artificiels ? La vie va-t-elle se compléter de multiples artefacts ?
Ensuite, nous parlerons d’un être étrange, dont je ne saurais dire s’il a un corps ou non : le «blob», un organisme vivant composé d’une seule cellule, difficile à classer, car il a des pigments comme les plantes, mange comme un animal et se reproduit comme un champignon, mais n’est ni une plante, ni un animal, ni un champignon… On dirait un canular, mais il existe bel et bien : le blob est la superposition quantique d’espèces d’ordinaire bien distinctes.
Pour parler de ces étrangetés, celles qui se discutent ici aux Utopiales, et celle du blob, Etienne Klein s'entretient avec :
- Roland Lehoucq, astrophysicien au CEA de Saclay, président de l'association du Festival International de Science-Fiction de Nantes, Les Utopiales et auteur de Faire des sciences avec Star Wars (Le Bélial, 2017) et La science fait son cinéma ( Le Bélial, 2018)
- Et Audrey Dussutour, chercheuse au CNRS où elle étudie le comportement des fourmis et des organismes unicellulaires, auteure de : Tout ce que vous avez toujours voulu savoir sur le blob sans jamais oser le demander (Les Equateurs, 2017) dans lequel elle nous raconte l'histoire du physarum polycephalum, surnommé blob, un organisme primitif sans neurone, mais doué d'intelligence. Vivant dans les sous-bois des régions tempérées, il ressemble à un champignon jaune gluant. Lointain cousin des plantes, des champignons et des animaux, il serait apparu sur Terre environ 500 millions d’années avant l’homme.
L'émission de cette semaine est enregistrée à Nantes, dans le cadre du Festival Les Utopiales qui se propose de réunir "ceux qui, jour après jour, réfléchissent aux transformations de notre monde et envisagent la science-fiction comme une pédagogie du réel" et se tient du 31 octobre au 5 novembre 2019 à la Cité des congrès de Nantes.
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