Les charmes du vide

Escalade dans les colonnes de basalte
Escalade dans les colonnes de basalte ©AFP - Henn Photography / Cultura Creative
Escalade dans les colonnes de basalte ©AFP - Henn Photography / Cultura Creative
Escalade dans les colonnes de basalte ©AFP - Henn Photography / Cultura Creative
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Entretien avec Stéphanie Bodet, professeur de lettres, grimpeuse et écrivain.

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Qu’est-ce que le vide ? On l’accole à tant d’images contradictoires qu’il n’apparaît pas d’une limpide clarté. Le vide est un théâtre d’ombres, sans visage ni forme, un réceptacle obscur pour d’étranges spectres. Il suscite l’horreur, mais aussi l’angoisse, mais aussi l’attrait : emportés par les turbulences du quotidien, nous désirons régulièrement « faire le vide », fuir le trop de tout.

Mais tout cela ne nous dit pas ce qu’est le vide. D’autant moins qu’une sorte de déchirement ontologique lui colle à la peau : tantôt nous en parlons comme s’il se confondait avec le néant, tantôt comme s’il était quelque chose de bien réel, mais de très particulier. Le vide est ainsi mis en ballottage existentiel : il aurait un pied dans la réalité, l’autre ailleurs, on ne sait où.

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Pour ne rien arranger à son intelligibilité, le mot vide est l’objet d’une polysémie fulgurante, comme s’il était paradoxalement victime d’un trop-plein de significations : le vide que dompte l’alpiniste et que redoute l’acrophobe n’a guère en commun avec celui qu’on réalise grâce à un pompe à vide, ni avec cette autre sorte de vide qu’on fait autour de soi en allumant un cigare, ni encore avec celui dans lequel, parfois, l’on parle, ni avec le vide quantique d’où les physiciens font surgir des particules à grand renfort de collisions.

Le vide est donc, sans conteste, un « signifiant flottant », comme aurait dit Jacques Lacan. Si flottant même que, pour mieux le cerner, il faudrait convoquer un funambule, un pratiquant de la méditation, une personne sujette au vertige, un philosophe (si possible de l’Antiquité, Parménide ou Aristote), un physicien théoricien, et aussi Blaise Pascal, et aussi un marchand de pompes à vide…

Invitée : Stéphanie Bodet, alpiniste. Elle est notamment l'auteur d'un récit intitulé A la verticale de soi (Guérin, 2016) dans lequel elle raconte son parcours, ses débuts en escalade et en compétition, les voyages et les grandes voies avec son compagnon.

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