

Chaque vendredi à l'heure du déjeuner, Lucile Commeaux et deux critiques invités, débattent des oeuvres ou des événements (films, livres, expositions, séries, bandes dessinées...) qui font l'actualité culturelle de la semaine...
- Antoine Guillot Journaliste, critique de cinéma et de bandes dessinées, producteur de l'émission "Plan large" sur France Culture
- Catherine Robin journaliste au magazine Elle
- Sarah Ihler-Meyer Critique d'art et commissaire d'exposition
Aux côtés de Lucile Commeaux, deux commentateurs passionnés de l’actualité culturelle aborde deux disciplines différentes pour que vive la critique, ce goût partagé et contagieux de la dispute esthétique, qu’elle concerne des films, des livres, des expositions, des séries, des bandes dessinées... bref tout ce qui s’aime et se discute.
Au programme cette semaine :
Nos critiques vous dirons, tout d'abord, ce qu'ils ont pensé de deux séries, l'une française, l'autre américaine : No man’s land, un thriller d'espionnage sur fond de guerre en Syrie avec Félix Moati, Mélanie Thierry, Souheila Yacoub dans les rôles phares diffusée sur Arte et Lovecraft Country, une balade angoissante dans l'Amérique "raciste des années 50 actuellement sur OCS.
Dans un deuxième temps, c'est sur les bandes dessinée de Mathieu Bablet, Carbone & Silicium et Celestia de Manuele Fior que le débat se portera.
Pour en parler : Antoine Guillot, producteur à France Culture, Sarah Ihler Meyer, critique d’art et commissaire d’exposition, Catherine Robin, journaliste à ELLE
- S E R I E S -
"No man’s land", une série dramatique mêlant thriller et espionnage au coeur du conflit syrien
L'avis des critiques :
C'est une série qui a du mal à démarrer, mais qui prend très vite consistance et qui devient de plus en plus passionnante. (...)La série passe son temps à interroger le cliché romantique de ce qu'est la guerre. Il me semble que c'est là qu'elle touche quelque chose de très intéressant. Que ce soit du côté des combattants des Brigades internationales qui s'engagent aux côtés des Kurdes, ou de ceux qui sont allés rejoindre Daesh en Syrie, la question qui se pose sans arrêt, c'est, qu’est ce qu'on va chercher là-bas (en Syrie) ? Pourquoi est ce qu'on s'engage ? La formule qui est trouvée, c'est celle d'une sorte d'expiation. Ils ont tous des choses à expier, ils vont chercher une rédemption sur le terrain et évidemment, ils y trouvent autre chose. (…) Les scènes de guerre, les scènes d'action sont assez brèves, très sèchement mais très efficacement filmées. Antoine Guillot
La série ne propose pas une leçon de géopolitique qui consisterait en une description un peu froide, impersonnelle, du conflit syrien, mais au contraire, elle propose une approche sensible, elle choisit de se pencher au delà même des facteurs socio-économiques sur les ressorts affectifs qui guident les personnages. Sarah Ihler-Meyer
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No man’s land, une série de Maria Feldman, Eitan Mansuri et Amit Cohen, avec Félix Moati, Mélanie Thierry, Souheila Yacoub (à partir du 18 septembre sur arte.tv et en novembre sur Arte)
Synopsis : 2014. La vie rangée d’Antoine (Felix Moati) bascule le jour où il croit reconnaitre sa sœur (Mélanie Thierry), qu’il pensait morte, sur une vidéo de combattantes kurdes en Syrie. En partant à sa recherche, il rejoint cette unité de femmes et va voyager avec elles à travers le territoire syrien pour tenter de découvrir la vérité...
"Lovecraft Country", une série terrifiante
L'avis des critiques :
C'est une série très déceptive, alors qu'il y a plein de bonnes idées, mais elles ne tiennent pas du tout leurs promesses. La série n’a pas grand-chose à voir avec Lovecraft. La dimension métaphysique présente chez Lovecraft a quelque chose d'assez sidérante, puisqu’elle consiste à faire de l'existence humaine un incident éphémère dans l'histoire de l'univers voué à disparaître dans un chaos originel. Cette dimension-là est complètement évacuée au profit de la dimension potentiellement burlesque de Lovecraft. (...) Connaissant Jordan Peele, le producteur de cette série, je m’attendais à ce que soit liés de manière vraiment très percutante, sur le plan de la réalisation et conceptuellement, le genre de l'horreur, du fantastique et du burlesque, avec la réalité existentielle des Noirs américains, en particulier sous la ségrégation, qui est elle-même justement de nature à la fois horrifique et outrancière, et ça n'est pas du tout ce qui se produit. Sarah Ihler Meyer
La série est assez décevante, pourtant il y a des moyens. Il y a beaucoup d'ambitions politiques mais au bout du compte, il ne se passe pas grand chose, sauf dans le cinquième épisode (...) Cette série est faite pour séduire. L'image est extrêmement léchée, les personnages ont l'air d'être de poupées "Barbie" ou de "Big Jim", ils n'ont aucune chair, aucune existence. Le gore, puisqu'on est dans l'expression de l'horreur avec beaucoup de dégoulinant, de têtes arrachées... ne fonctionne jamais que comme une sorte d'apparat publicitaire. (...) Le gros problème de la série, c'est le manichéisme. Antoine Guillot
- Lovecraft Country, une série de Misha Green et Jordan Peele (diffusion en cours sur OCS)
Synopsis : Dans l'Amérique raciste des années 1950, Atticus Black, un jeune homme de 25 ans, embarque avec son amie Letitia et son oncle George dans un road trip à la recherche de son père disparu. Sur la route, ils rencontrent des monstres fantastiques, ainsi que des monstres bien réels...
- B A N D E S D E S S I N E E S -
BD : "Celestia", un récit d’anticipation de Manuele Fior dans une autre Venise

L'avis des critiques :
C'est si beau de voir des personnages se mouvoir avec cette légèreté et cette gravité en même temps dans cette ville. C'est une émotion purement formelle que je trouve assez rare. Manuele Fior se laisse aller, il part dans une écriture automatique, qui est aussi celle du dessin, et ça devient un bonheur intense qui mobilise toutes nos perceptions. Rentrer dans ce livre, c'est ne jamais complètement en sortir. Manuele Fior a un talent de la composition presque musicale pour accélérer, ralentir, nous entraîner et nous reposer. C'est un grand maître. Antoine Guillot
C’est un très bel objet. C’est vraiment une expérience de lire ce livre. Manuele Fior propose un rêve, mais sans artifice. il y a plein de choses qui nous échappent mais on en est satisfait. Les sensations que les images nous procurent nous satisfont. On ferme le livre et on se dit qu’on va peut-être le relire. On est dans une lecture flottante par la grâce des couleurs notamment. Manuele Fior atteint un premier sommet en terme de dessin. On voit vraiment son trait progresser. Catherine Robin
- "Celestia" de Manuele Fior (Editions Atrabile)
Présentation : Celestia, désormais coupée du continent, est devenue un étrange ghetto, un repère pour de nombreux criminels et autres marginaux, mais également un refuge pour un groupe de jeunes télépathes. Les événements vont pousser deux d’entre eux, Dora et Pierrot, à fuir l’île pour rejoindre le continent; là, ils vont découvrir un monde en pleine métamorphose, un monde où les adultes, prisonniers de leurs propres forteresses, restent les gardiens de « l’ancien monde », et où une nouvelle génération pourrait guider la société vers une nouvelle humanité. Récit spéculatif ouvertement ancré dans la science-fiction, Celestia poursuit une réflexion entamée par l’auteur dans L’Entrevue (Futuropolis), une réflexion sur le futur de l’être humain, sur sa possible évolution en tant qu’espèce, comme sur les prochains défis auxquels il sera confronté dans un avenir plus ou moins proche.
BD : "Carbone & Silicium", une dystopie énigmatique de Mathieu Bablet sur fond d'intelligence artificielle
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L'avis des critiques :
C'est un livre très ambitieux qui se donne parfois les moyens de ses ambitions, mais pas toujours. C'est un livre qui veut philosopher, penser le monde contemporain, mais c’est fait de façon didactique. Le vrai échec du livre est qu'il n'arrive pas à se figurer réellement ce que peut être une pensée robotique. Qu'est-ce que qu'une intelligence artificielle ? (…) Et quand les robots se mettent à philosopher entre eux, là, on est dans l'explicite absolu. Mais où est le lecteur dans ce cas-là ? Hormis de se dire ah bah oui, il a raison. La réflexion graphique sur la représentation de l'organique et du métallique est une des choses les plus convaincantes dans ce livre. Là, on sent que Babet s'amuse un peu. Antoine Guillot
❞ Mathieu Babet décide d'aller vers le manifeste. Un manifeste sur tous les sujets, l'état de notre monde, la réflexion sur l'écologie, le transhumanisme, l'obsolescence programmée, l'intelligence artificielle... Il veut tous les traiter, absolument tous, mais on se demande vraiment pourquoi il a choisi de ne pas choisir, et on se dit surtout que c'est trop. Je suis très impressionnée par ce travail graphique, mais j'avoue que j'ai trouvé cette BD beaucoup trop chargée. Il y a un problème de rythme et on étouffe. (…) Une des caractéristiques de cette bande dessinée, c'est qu'elle reste longtemps, quoi qu'on pense de ce discours asséné, parfois même un peu prétentieux. Il l y a néanmoins une ambiance, une atmosphère qui demeure en nous après avoir lu ce livre.
- Carbone & Silicium de Mathieu Bablet (Ankama)
Présentation : Après Shangri-La (Sélection officielle au FIBD 2017), le nouveau projet SF de Mathieu Bablet sur le thème de l’intelligence artificielle !2046**.** Derniers nés des laboratoires Tomorrow Foundation, Carbone et Silicium sont les prototypes d’une nouvelle génération de robots destinés à prendre soin de la population humaine vieillissante. Élevés dans un cocon protecteur, avides de découvrir le monde extérieur, c’est lors d’une tentative d’évasion qu’ils finiront par être séparés. Ils mènent alors chacun leurs propres expériences et luttent, pendant plusieurs siècles, afin de trouver leur place sur une planète à bout de souffle où les catastrophes climatiques et les bouleversements politiques et humains se succèdent...
L'équipe
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