1943 : Zweig, "Le Monde d'hier" : épisode • 30/30 du podcast Comment les livres changent le monde

Stefan Zweig (écrivain) lors d'une lecture
Stefan Zweig (écrivain) lors d'une lecture ©Getty - Dephot
Stefan Zweig (écrivain) lors d'une lecture ©Getty - Dephot
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"Le Monde d’hier" n’est pas qu’un livre autobiographique, c’est aussi un témoignage historique précieux sur le basculement du destin de l’Europe au XXe siècle. Rédigé en 1941, il est publié de façon posthume en 1943 en Suède.

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Un personnage complexe

Stefan Zweig est né en 1881 en Autriche Hongrie. Il est, selon les termes de Régis Debray, un "viennois cosmopolite", ami de Sigmund Freud, de Romain Rolland. Se sentant incapable d’intervenir dans la vie publique, il ne s’engage pas vraiment tout en ayant clair conscience du danger qui vient.

Ce Juif laïque, menacé par la montée du nazisme, s’exile à Londres en 1934. Naturalisé sans être adopté, il part au Brésil.

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L'Invité culture
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Il rassemble ses souvenirs et décide de témoigner de sa vie comme on lance une "une bouteille à la mer". Zweig puise dans sa sensibilité et ses affects pour réanimer les périodes passées. Pour Jean-Pierre Lefebvre, la "puissance des affects les plus intimes sont des catalyseurs de la mémoire" qui ont permis à Zweig de tracer cette traversée du siècle sans archive. Comme le rappelle Laurent Seksik, il écrit en "un mois : du 1 au 31 juillet 1941" ce livre qui fera date.

Le livre de la fin d’un monde

Il y décrit l’âge d’or et la splendeur d’une Europe puissante tant économiquement qu’artistiquement puis son déclin. Stefan Zweig, d’un tempérament dépressif, ne cache pas sa déception face à l’effondrement de son monde, accéléré par la montée du nazisme, dont la description constitue les derniers chapitres de l’ouvrage.

Témoin des atrocités des deux guerres, de la censure de ses livres dès 1933, Stefan Zweig met fin à sa vie, avec sa femme, en 1942. Il est hanté par le "désespoir de vivre devant la répétition des malheurs" pour reprendre les termes de Jean-Pierre Lefebvre dont "le suicide est le marqueur d’un certain pacifisme".

Un succès contemporain

Stefan Zweig était un des écrivains les plus lus et traduits avant 1940, il le demeure aujourd’hui. A partir de 1945, il acquiert difficilement une reconnaissance académique et fait partie d’une sorte de mauvaise conscience allemande.

Zweig était un polygraphe compulsif mais sa production est essentiellement constituée de nouvelles qui ont fait date comme Vingt-quatre heures de la vie d'une femme ou Le Joueur d'échecs, adaptées au cinéma. Il a aussi été un biographe de personnages historiques dont il tente, en particulier, de cerner la psychologie (Marie Antoinette, Romain Rolland, Érasme, Magellan). Pour Freud, Zweig est l’écrivain qui, dans ses écrits, aura le mieux compris sa science. Zweig prononcera son éloge funèbre à Londres.

Bibliographie indicative :

  • Stefan Zweig, Romans et nouvelles I & II, Pléiade, direction de Jean-Pierre Lefebvre, 2013
  • Laurent Seksik, Les Derniers Jours de Stefan Zweig, Flammarion, 2010

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