Ce soir dans La Dispute, nous évoquons deux one (wo)man shows avec "Gardiennes" de et par Fanny Cabon et "Premier amour" par Sami Frey. Il est également question de "The End of Reality" à La Commune d’Aubervilliers, avant un coup de cœur de Marie Sorbier pour "Nous/1" de Fabrice Gorgerat.
- Lucile Commeaux Critique et chroniqueuse du "Regard culturel" à la matinale de France Culture
- Philippe Chevilley Chef du service culture des Echos
- Marie Sorbier Rédactrice en chef de I/O et productrice de la chronique "Le Grand Tour" sur France Culture
"Gardiennes", jusqu'au 31 mars au Théâtre du Gymnase Marie-Bell
De et avec : Fanny Cabon Mise en scène : Bruno de Saint Riquier
Présentation officielle : Dix portraits de femmes d’une même lignée familiale, de 1920 à nos jours, livrent leurs témoignages sur leur découverte de l’amour, la sexualité et l’enfantement. Elles lèvent le voile, avec honnêteté et humour, sur des secrets et des actes parfois interdits. Des histoires cachées, enfouies, qui ne se disaient et ne se disent la plupart du temps qu’entre femmes.
Sous forme de monologues, c’est une pièce sur la transmission à travers dix récits, dix passages de témoin où Fanny Cabon incarne seule la mémoire de ces femmes dont elle porte l’ADN.
Une traversée de vies, 100 ans d’histoires quotidiennes, tragiques et belles comme les existences peuvent l’être. Au fil des récits, ces femmes deviennent les nôtres : nos grands-mères, nos tantes, nos mères, nos filles, nos descendantes.
Un hommage rendu à ses aînées, une ode à l’amour et à la vie dont les femmes sont des Gardiennes.
L'avis des critiques :
Je trouve important que les jeunes générations entendent cette histoire-là. C’est un spectacle qui à l’évidence touche et m’a beaucoup touché. Comme dans « La Fin de l’homme rouge », on recueille des témoignages qu’on coud ensemble pour en faire des monologues. Fanny Cabon a la force et la douceur de porter les choses assez frontalement. Cela m’a particulièrement touché. Arnaud Laporte
Ce sont des choses qu’on oublie et qui sont pourtant proches de nous. Je suis assez partagée sur le spectacle que j’ai trouvé très intéressant dans une première partie. Il y a des moments dans l’écriture où cela fonctionne bien avec une forme de radicalité. Sur la longueur, je pense qu’elle aurait pu créer plus d’effets. Il serait courageux de porter jusqu’au bout la violence sur une scène. Lucile Commeaux
Tout cela sonne très juste. Mais c’est une pièce qui est livrée brute. On a une mise en scène avec un peu de complexité, des petits trucs qui finalement alourdissent le propos, alors que le texte est assez fort comme ça. Cela a manqué de transposition, de recul face au sujet. Cela a manqué de théâtre. Assumer le documentaire aurait été intéressant, mais les gens sont touchés et en cela c’est réussi. Marie Sorbier
C’est intéressant en tant qu’homme de voir ce spectacle. Les thématiques peuvent paraître un peu banales, mais sont assez fortes et touchent au premier degré. Je trouve qu’elle joue assez bien la gouaille dans son jeu des années 20 et 30, puis en revenant vers le naturel d’aujourd’hui. Il manque peut-être ce petit coup de fiction, de fantaisie, qui ferait qu’on passe à autre chose, à un propos qui n’est pas univoque. Philippe Chevilley
"Premier amour", jusqu'au 3 mars au Théâtre de l'Atelier
De : Samuel Beckett Mise en scène et interprétation : Sami Frey
Présentation officielle : Publiés en 1945, ce texte nous met face à un homme occupé à faire le bilan de sa vie : décès du père, départ de la maison et rencontres, entre autres.
Et comme souvent chez Beckett, le drame se mélange souvent à l'absurde, et les sentiments oscillent entre joie et tristesse, toujours dans une très belle simplicité. Un récit d'une pathétique drôlerie, d'une naïveté et d'un égoïsme rafraîchissant.
"J'ai découvert tard dans ma vie à quel point les écrits de Samuel Beckett me touchaient. A quel point la profonde humanité de ses personnages, le rythme de ses phrases, la musicalité de son français, son humour terrible, sa poésie, m'étaient proches sans effort." Sami Frey - 2009
L'avis des critiques :
Ce qui m’a frappé c’est l’incroyable verdeur de ce comédien. J’ai retrouvé les mêmes sensations qu’il y a dix ans, l’acteur absolu, l’acteur parfait. Ce texte est assez étonnant avec un côté presque potache. Il est toujours sur cette ligne qui est à la fois une ironie et un côté malicieux, désespéré. C’est aussi un comédien de la présence, son regard m’a bouleversé une fois de plus. Philippe Chevilley
Les metteurs en scène qui s’attaquent à un texte de Beckett ont très peu de marge de manœuvre, tout est noté, à la mollesse du chapeau près, dans les didascalies. Ce dont on peut parler n’est que la prestation de l’acteur. J’ai été très heureuse de voir pour la première fois Sami Frey sur scène. Les fins de phrases s’éteignent dans un souffle, ce qui a un pouvoir d’émotion absolument dingue. Marie Sorbier
Sami Frey est agaçant puisqu’il est beau à tous les âges de sa vie. Les lumières sont très belles et participent à la réussite du spectacle. Il est une apparition. Il y a une science absolument étourdissante. Ce texte est d’une richesse folle et Sami Frey arrive à donner cette richesse à chaque phrase. Il est certes classique, mais d’une très grande liberté, redoublée par la liberté de Sami Frey. Arnaud Laporte
C’est un petit spectacle court, mais un très grand moment de théâtre. Je trouve d’emblée les conditions de mise en scène assez incroyables. Il est vêtu comme un cliché du personnage beckettien, c’est vraiment un « clochard céleste ». J’ai été assez surprise par ce texte que je ne connaissais pas. Il arrive à tenir cet élément vulgaire et à le dire, tout en gardant une élégance incroyable. Lucile Commeaux
"The End of Reality", jusqu'au 22 février à La Commune d’Aubervilliers
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De : Richard Maxwell Mise en scène : Marie-José Malis
Présentation officielle : Richard Maxwell est un auteur metteur en scène new-yorkais, qui commence à être bien connu du public français, puisqu’il a été à plusieurs reprises l’invité du Festival d’Automne à Paris. Il y a représenté ses spectacles écrits et joués avec des acteurs, souvent amateurs, issus des quartiers new-yorkais. Ses pièces ne sont pas traduites en français et cette création est donc une première à tous égards : première traduction, première mise en scène d’un de ses textes par un autre metteur en scène que lui. L’invitation de M.-J. Malis à Maxwell : le considérer et le faire apparaître comme un auteur à part entière, un des plus importants à vrai dire du théâtre contemporain.
The End of Reality met en scène des employés d’une agence de sécurité. Et comme toujours chez Maxwell, cette humanité des petits travailleurs intérimaires fait entendre ses aspirations. Qu’est-ce que vivre selon son cœur quand on fait partie de ces couches les plus populaires, que l’on dit souvent acculturées ? C’est ce besoin de grandes choses que réveille soudain l’arrivée d’une jeune femme qui a l’éclat du vrai. La pièce parlera beaucoup du besoin nouveau de croyance, de l’appel étrange et pas si suspect qui saisit les gens en proie à l’injustice vers quelque chose qui pourrait être cru. Et chez Maxwell, l’écriture, si simple qu’elle est presque inaudible, telle la parole des laissés pour compte, fait surgir des grâces qui sont la nouvelle beauté du monde contemporain.
Avec : Pascal Batigne, Maxime Chazalet, Moussa Doukoure, Maxime Fofana, Olivier Horeau, Mamadou Kebe, Marie Schmitt
L'avis des critiques :
J’ai des sentiments un peu ambigus envers Marie José Maylis. J’ai été très heureuse de voir ce spectacle qui a quelque chose de terrible. Maxwell est un auteur formidable. Il y a quelque chose de pesant dans la façon dont les dialogues sont étirés et en même temps, on les entend très bien. Les personnages parlent de leur foi et de leur rapport à Dieu, ce que je trouve très fort. Ce n’est pas un théâtre accessible. Marie Sorbier
C’est une pièce qui m’a mise dans un état extrêmement étrange, mais c’est pour moi l’une des pièces les plus importantes que j’ai vu pour décrire ce qu’est le théâtre. C’est extrêmement pénible à entendre et c’est en plus une pièce qui ne parle de rien, avec un côté extrêmement creux dans les mots utilisés. Cela m’a plongée dans un état de semi attention qui m’intéresse dans ce que cela dit de la représentation. Lucile Commeaux
Il y a un petit côté sitcom, banalité du quotidien. J’ai eu l’impression d’assister à une catastrophe théâtrale. On est entre le non-jeu, une forme de jeu parodique et trop d’émotion avec une gestuelle assez grotesque. Les déplacements avec les chaises à roulettes ne sont ni faits ni à faire. Ce n’est pas du théâtre du tout. C’est la négation du théâtre et de tout ce que j’aime au théâtre. Philippe Chevilley
>> LE COUP DE CŒUR DE MARIE SORBIER : "Nous/1", jusqu'au 24 février au Théâtre du 2.21 à Lausanne, puis en tournée
Concept et mise en scène : Fabrice Gorgerat
Présentation officielle : Le 12 juin 2016, le massacre d’Orlando, premier assassinat homophobe de masse m’a déchiré. Et pas là où on aurait cru. Les tueries s’accumulant aux tueries et attentats, revendiquées par des fanatiques de tous bords, le réflexe d’auto protection opère, un attentat commence à en valoir un autre. J’ai pleuré pour Charlie, j’ai pleuré pour le Bataclan mais je ne veux plus. Aussi quand certaines chaînes de télévision américaines, très vite relayées par leurs collègues mondiales ont – de manière complètement erronée – laisser entendre que la motivation du tueur serait son homosexualité refoulée, j’ai sauté dans la brèche. J’ai eu besoin de sauter dans cette brèche. Il y avait une explication, un moyen de donner du sens. Ce n’était pas une abomination de plus mais le fait d’un pauvre type incapable d’assumer son homosexualité. J’ai fait urgemment mienne cette explication. Elle m’arrangeait. N’importe quoi plutôt que l’absurde, une explication à tout prix, une raison.
Expliquer l’horreur pour y survivre, à n’importe quel prix. J’ai préféré m’accrocher à cette version simplificatrice parce qu’il m’était impossible d’assimiler une abjection de plus, j’ai préféré « penser faux ».
Aussi se pose la question de notre posture face à un monde de plus en plus insaisissable où une angoisse diffuse imprègne nos jours. Que faire, sommes-nous condamnés à subir cette angoisse ou à nous fourvoyer dans des explications données clés en main, existe-t-il une alternative ? Fabrice Gorgerat
Avec : Albert Khoza, Fiamma Camesi, Cédric Leproust et Benfury
C’est un metteur en scène qui mérite qu’on le découvre. Il travaille visuellement et aussi beaucoup avec la matière. Il dépasse et sublime de façon assez géniale le massacre d’Orlando. Orlando n’est jamais évoqué au premier degré. C’est un spectacle pluridisciplinaire réussi. Il créé des images assez fortes. Ce spectacle mérite vraiment d’être programmé en France. Marie Sorbier
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♪ Générique de l'émission : Sylvie Fleury & Sidney Stucki, "She devils on wheels", extrait de l'album "Sound Collaborations 1996-2008" (label Villa Magica Records).
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