Francis Geffard : "Les Etats-Unis n’ont pas connu de décolonisation. Les Indiens restent des marginaux sur leur propre terre." : épisode 1/4 du podcast Histoire des Indiens d'Amérique

Brule Sioux War Party by Edward S Curtis (American, 1868 - 1952); sepia-toned photograph, circa 1907
Brule Sioux War Party by Edward S Curtis (American, 1868 - 1952); sepia-toned photograph, circa 1907 ©Getty - 	GraphicaArtis
Brule Sioux War Party by Edward S Curtis (American, 1868 - 1952); sepia-toned photograph, circa 1907 ©Getty - GraphicaArtis
Brule Sioux War Party by Edward S Curtis (American, 1868 - 1952); sepia-toned photograph, circa 1907 ©Getty - GraphicaArtis
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Passionné par les Indiens, Francis Geffard est devenu éditeur de littérature américaine et a créé la fameuse collection Terre indienne chez Albin Michel. Pour lui, la littérature est un moyen plus nuancé et plus subtil pour rapprocher les gens et les cultures.

Avec

Emmanuel Laurentin s'entretient avec Francis Geffard, directeur de la collection Terre indienne chez Albin Michel, et secrétaire général du Festival America.

Nous, Européens, avons conçu le concept de nature en nous en excluant. Au contraire, les Indiens fonctionnent par l’inclusion, ils font partie du monde vivant. Que ce soit sur le plan philosophique, mystique, ou identitaire, la relation à une montagne, à une forêt, à un lac, à une rivière, à des animaux, à des oiseaux, était très importante. Ce sont des populations qui se pensent au cœur du monde. Les Européens n’ont pas saisi cette relation charnelle avec le monde vivant.                
Francis Geffard

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Juke-Box
59 min

Indiens hostiles versus Indiens friendly

On estime qu'avant l'arrivée des Européens en Amérique du nord, la population comptait environ 7 millions d’Indiens. Aujourd'hui, les communautés indiennes comptent environ 250 000 personnes. Très vite, les nouveaux Américains ont établi une distinction entre ceux qui refusaient l’homme blanc, les Indiens dits "hostiles" et les autres. Mais quoi qu'il en soit, et si quelques-unes de ces tribus ont pu rester vivre sur la même aire géographique, toutes ont été dépouillées de leurs territoires ancestraux.

Les populations indiennes ont été victimes en quelque sorte d’une double peine. Non seulement, c'est tout un monde qui a été balayé sans ménagement de façon presque unique dans l’histoire. D'autre part, parce qu’elles symbolisaient quelque chose de particulier, leur image a été utilisée et détournée. L’Indien, c’est l’élément qui va permettre aux jeunes Etats-Unis d'Amérique de se distinguer dans le concert des nations et de produire quelque chose de typiquement américain. Très tôt, la littérature, bien avant le cinéma, va utiliser cet élément de façon extraordinaire, comme on le voit avec les romans de Fenimore Cooper, de Mark Twain ou de Buffalo Bill. L’Amérique ne cessera de jouer sa chanson de geste favorite, avec ses motifs de conquête, de frontière, de sacrifice et de lutte. Ainsi, les Indiens font devenir partie prenante d’une mythologie douteuse.            
Francis Geffard

Les Regardeurs
59 min

1973, la révolte de Wounded Knee

Emmanuel Laurentin : L'écrivain William Faulkner disait qu’on ne comprend pas les Etats-Unis si on ne comprend pas la question indienne...

Francis Geffard : En effet, si l’Amérique a été prompte à ériger sa légende dorée, celle du pays de naissance de la démocratie, la question indienne est l’épine dans le pied de la conscience américaine. Dans les années 1970, le mouvement des droits civiques touche toutes les communautés, pas seulement la communauté noire américaine, comme en témoignent le livre de Dee Brown, Enterre mon cœur à Wounded Knee : la longue marche des Indiens vers la mort (Bury My Heart at Wounded Knee, an Indian History of the American West) et des films comme Little Big Man ou Soldat bleu, tous deux réalisées en 1970. Les Indiens sont face à un deuil impossible, celui d’un pays qui fut autrefois le leur. On a beaucoup décolonisé dans la seconde moitié du XXe siècle. Mais les Etats-Unis, comme l’Australie, le Canada, ou la Nouvelle-Zélande, n’ont jamais connu la décolonisation : les peuples d’origine n’ont pas la main sur leur destinée et restent des marginaux sur leur propre terre. Ce deuil s’est doublé de tous les deuils symboliques qui ont frappé ces gens.

C'était à la une
4 min

Et un nouvel épisode du feuilleton "Balade des Archives nationales"

L'administration n'oublie jamais.

  • avec Sylvie Le Clech, Eléonore Alquier et Yann Potin

Un feuilleton proposé par Séverine Liatard, réalisé par Charlotte Roux.

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