"Avec des statues pareilles, faut pas s'étonner des dégradations" pouvait-on lire sur le socle de la statue de Napoléon à Rouen il y a quelques jours, après une manifestation. S'en prendre aux statues des grands hommes, une pratique concomitante à tout mouvement social depuis le XIXe siècle ?
- Guillaume Glorieux Historien, professeur à l'Université de Rennes 2 – Haute Bretagne
- Stéphane Castelluccio Historien de l'art, chargé de recherche au Centre André Chastel (CNRS)
- Jacqueline Lalouette Historienne
- Corinne Walker Historienne
Première partie
Emmanuel Laurentin et Anaïs Kien évoquent l’exposition “ La Fabrique du luxe. Marchands et merciers au XVIIIe siècle” au Musée Cognacq-Jay (jusqu’au 27 janvier 2019) avec Guillaume Glorieux, historien de l’art, professeur à l'université de Rennes 2-Haute Bretagne et auteur de À l'enseigne de Gersaint. Edmé-François Gersaint, marchand d'art sur le pont Notre-Dame : 1694-1750, Stéphane Castelluccio, chargé de recherches au CNRS, spécialiste du commerce du luxe en France au XVIIIe siècle et Corinne Walker, historienne, auteure de Une histoire du luxe à Genève (La Baconnière, 2018)
Comment les marchands merciers, à la fois antiquaires, brocanteurs, décorateurs, ont-ils été les metteurs en scène du goût aristocratique du XVIIIe siècle ?
Corinne Walker : Le XVIIIe siècle invente cette obsession de la nouveauté qui, à Paris autant que dans la Genève protestante, terrorise les moralistes, vent debout contre ce goût de la mode et du luxe qui s’exprime dans des proportions de plus en plus importantes.
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Stéphane Castelluccio : Cette clientèle d’aristocrates qui a perdu le pouvoir politique depuis le règne de Louis XIV doit se distinguer socialement par son train de vie. Au XVIIIe siècle, on vit encore en fonction de son rang et pas de ses revenus. Il faut être à la mode, et les marchands merciers ont très bien compris que pour entretenir ce marché, il faut proposer des objets inattendus. Ils vont donc, avec beaucoup d’imagination et d’audace, assembler des panneaux de laque japonais avec un meuble d’ébénisterie, ou une porcelaine de Chine avec des bronzes dorés de la Manufacture de Vincennes par exemple - et, en proposant ces objets originaux, entretenir le désir de nouveauté de leur clientèle. On voit bien que les ressorts psychologiques de la société de consommation sont en train de se mettre en place.
Guillaume Glorieux : Mais ces désirs nouveaux qu'ils suscitent contribuent aussi à l’évolution du goût de l’époque. En ce sens, on peut dire que les marchands merciers participent à l’écriture de l’histoire de l’art au XVIIIe siècle, parallèlement aux grands artistes.
Seconde partie
Dans cette seconde partie dans laquelle il sera question de vandalisme révolutionnaire et des dégradations de statues par les mouvements sociaux, Emmanuel Laurentin et Anaïs Kien s'entretiennent avec Jacqueline Lalouette, auteure de Un peuple de statues. La célébration sculptée des grands hommes 1801-2018 (Mare et Martin, 2018).
Texte lu
- Lettre de Voltaire à Mme Necker sur le projet de statue, mai 1770
Musiques diffusées
- Claude Lejeune, Octonaires de la vanité et inconstance du monde (Le mondain se nourrit toujours), Ensemble Jacques Feuillie
- Satie, La statue retrouvée, Alexandre Tharaud, piano.
Exposition La Fabrique du luxe, les marchands merciers parisiens au XVIIIe siècle au Musée Cognacq-Jay, jusqu'au 27 janvier 2019.
« Marchands de tout et faiseurs de rien », pour reprendre la célèbre sentence de l’Encyclopédie attribuée à Diderot, les merciers constituent l’une des plus importantes corporations parisiennes au XVIIIe siècle. Le musée Cognacq-Jay explore la question des marchands merciers à travers le destin de marchands comme Lazare Duvaux ou Dominique Daguerre, et une centaine d’œuvres et d’archives illustrant les origines de la conception parisienne du luxe.
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