Les émeutes de décembre 1959 en Martinique
Un documentaire de Sophie Haluk, réalisé par Guillaume Baldy
Comment un banal incident de circulation entre un Antillais et un Métropolitain peut-il provoquer trois jours d’émeutes et mettre la ville de Fort-de-France à feu et à sang ? Dans une Martinique qui voit ses usines à sucre fermer, en proie à la misère et au chômage, c’est à coup de pierres contre les balles réelles des policiers que la population fait entendre son cri de colère. "*Réaction d'une dignité blessée", * dira Césaire. Face au mépris colonial, à la politique répressive qui perdure dans une société en attente des promesses d’égalité de la départementalisation, votée treize ans plus tôt.
Cette révolte populaire sans précédent, qui inaugure une nouvelle forme de protestation, la guérilla urbaine et nocturne, marquent l’entrée de la jeunesse dans les luttes sociales antillaises. Une jeunesse qui en paiera le prix fort : trois victimes, Christian Marajo, 15 ans, Edmond-Eloi Veronique dit Rosile, 19 ans, et Julien Betzi, 20 ans.
Suite au choc émotionnel provoqué par ces morts, la réponse du gouvernement français, dans un premier temps conciliante, va être de mettre tout en œuvre pour empêcher qu’un tel soulèvement ne se reproduise. Renforcement de la présence militaire française, arrivée de matériel lourd, quadrillage de Fort de France avec de nouveaux commissariats... Redoutant une révolution communiste (celle de Castro à Cuba a eu lieu quelques mois plus tôt), le nouveau préfet, Jean Parsi, qui a les pleins pouvoirs, lance une véritable guerre aux opposants. Inspirée d’un dispositif qui concerne l’Algérie, l’ordonnance d’octobre 1960 permet d’expulser « out fonctionnaire dont le comportement est de nature à troubler l’ordre public». Le premier à en être victime sera Alain Plénel, alors vice-recteur d’Académie, qui a osé critiquer le colonialisme français responsable selon lui des émeutes.
Suivront le Service Militaire Adapté ou Plan Némo, mesures d’éloignement des soldats antillais en Guyane. Et le Bumidom (Bureau pour l’émigration des départements d’Outremer), qui permettra de faire baisser la pression démographique, et surtout d’éloigner cette jeunesse susceptible de se révolter à nouveau.
Moment fondateur d'une prise de conscience nationale, ces événements de décembre 1959 ont donné naissance à des groupes telles l’OJAM, Organisation de la jeunesse anticolonialiste, ou encore le Front antillo-guyanais pour l’autonomie, créé entre autres par Edouard Glissant et Marcel Manville, qui seront tous deux interdits de séjour dans leur île.
En ce dimanche 20 décembre 1959, le vent des indépendances qui souffle alors sur les colonies effleure la Martinique. Frantz Moffat, docker âgé de 33 ans, ignore encore qu’il va déclencher, sans le vouloir, l’un des faits historiques les plus marquants de l’île.
Avec Jocelyne Marajo, sœur de Christian Marajo Juliette Ensfelder, sœur de Edmond-Eloi Véronique Juliette Germany, sœur de Julien Betzi Frantz Moffat, ancien docker Charles Conconne, Alain Cadoré, Gesner Mencé, Léon Sainte Rose, témoins et acteurs des émeutes, Alain Plenel, vice-recteur d’Académie de l’époque Louis Georges Placide, historien
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