Quand le conflit n'en finit pas. Ou l'obsession de la guerre : épisode 2/4 du podcast La guerre, notre héritage

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x ©Getty - Mauro Flamini/REDA&CO/UIG via Getty Images
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Comment les guerres et leur histoire continuent-elles de nous tarauder ? Comment une œuvre littéraire peut-elle être nourrie par l'obsession pour la guerre de son auteur ? Eléments de réponse en compagnie des écrivains Jean-Yves Jouannais et Jérôme Prieur.

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Comment les guerres et leur histoire continuent-elles de nous tarauder ? Comment une œuvre peut-elle être nourrie par l'obsession pour la guerre de son auteur ? Pour ce deuxième volet de cette série sur l'héritage que nous laissent les guerres, Emmanuel Laurentin et Anaïs Kien posent la question à deux écrivains, Jean-Yves Jouannais et Jérôme Prieur.

Comment est né votre intérêt pour la guerre ?

J’ai commencé à écrire ce livre sur la guerre de 1914 quand j’avais une dizaine d’années et je ne doutais pas qu’il paraîtrait un jour. Ça a continué à me préoccuper très longtemps sans que je sache comment me défaire de ce projet. Un été, vers 13 ou 14 ans, je me suis plongé dans les récits d’emprisonnement et d’évasion des soldats de la Grande guerre comme si je cherchais autant à les rejoindre qu'à m’évader de cette fascination. Pendant des années, j’ai stocké des citations, des lectures et peu à peu l’image dans le tapis a pris forme : ce qui me fascinait, c’est la façon dont ces soldats essayaient de raconter la chose hallucinante, indicible, innommable qu’ils étaient en train de vivre. Mon obsession était finalement liée au langage.                            
Jérôme Prieur

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Je ne suis pas « intéressé » par la guerre. La guerre me tracasse, elle me perturbe. Ce qui m’intéresse, c’est la question du transport de l’énergie de ses récits jusqu’à nous. Comment l’histoire d’Hector et d’Achille nous parvient-elle ? Sous quelle forme ? Qu'est-ce qui a été perdu ou transformé au passage ? Le grand mystère pour moi, c’est cette énergie inouïe du récit qui nous dépose, comme le feraient des vagues sur le rivage, les légendes de Georges Guynemer, de Jules César, de Hasdrubal ou de Rommel.                          
Jean-Yves Jouannais

Ecrire permet-il de se défaire de l’obsession de la guerre ?

Mon hypothèse – scandaleuse - c’est que les hommes choisissent de faire la guerre pour pouvoir inventer des récits. Michelet dit que quand Jules César débarque dans les grandes forêts gauloises, il n’est pas à la recherche d’une bataille ni d’une campagne militaire mais d’un matériau littéraire à la hauteur de son génie ! C’est Jules César en résidence d’écriture en Gaule ! Il fait la guerre pour écrire Commentaires sur la Guerre des Gaules. Comme Xénophon. Comme le prince de Ligne. Et la boucle se boucle parce que beaucoup d’hommes se sont engagés dans la carrière militaire parce qu’ils avaient lu Xénophon ou Thucydide, et pour se conformer à cette idée de la guerre produite par des hommes de lettres.                  
Jean-Yves Jouannais

#Verdun #Thucydide #Jules Michelet #Jules César

Ce que j’ai découvert en me plongeant dans les photographies de 14-18, c’est une réalité double et irréconciliable : sur certaines, le monde a l’air paisible, on y voit de joyeux gaillards chassant le rat ou jouant à la manille et qui ont l’air de bien s’amuser, tandis que d’autres disent le charnier, le champ de bataille, l’horreur. Ces deux images tellement contradictoires me poursuivent et me persécutent depuis l’enfance et j’espère que l’écriture de ce livre va enfin m’en délivrer.                          
Jérôme Prieur

#silence du permissionnaire #Jean Paulhan #Walter Benjamin 

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