Le patron du plus gros réseau social du monde, Facebook, a prononcé un discours sur la liberté d'expression et la démocratie devant des étudiants. Quelques jours plus tard, il se faisait durement questionné lors de son audition au Congrès américain sur les questions de désinformation et d'éthique.
- Julien Le Bot Auteur-réalisateur, spécialiste de l’histoire d’Internet
- Thomas Huchon
Les relations entre les médias d’information et les géants de la distribution numérique font l’objet ces temps-ci de nombreux questionnements. Jeudi, plusieurs éditeurs de presse ont annoncé qu’ils allaient porter plainte contre Google pour abus de position dominante, après que la multinationale a fait du chantage pour esquiver l’application du droit voisin, autrement dit la rémunération des contenus de presse exploités par le moteur de recherche. Mais cette fin de semaine a été marquée également par l’audition du patron de Facebook (une entreprise qui rappelons-le compte 2,4 milliards d’utilisateurs dans le monde), devant le Congrès américain, au cours de laquelle la jeune élue démocrate Alexandria Ocasio-Cortez a questionné Mark Zuckerberg sur la désinformation. Leur échange tendu de 5 minutes a fait le tour des réseaux sociaux. Il faut dire que le dirigeant du plus gros réseau social du monde avait, la semaine dernière, prononcé un discours sur la liberté d’expression devant des étudiants à Georgetown qui nécessitait a minima quelques explications…
Thomas Huchon, journaliste à Spicee, réalisateur du documentaire Comment Trump a manipulé l’Amérique qui sera diffusé sur Arte le 12 novembre, un film dans lequel revient notamment sur l’affaire Cambridge Analytica, du nom de cette entreprise accusée d’avoir utilisé des données personnelles de dizaines de millions d'utilisateurs de Facebook en vue de cibler des messages en faveur du Brexit et de l'élection de Donald Trump en 2016.
Entendre Mark Zuckerberg parler de liberté d'expression, c'est comme entendre Mosanto parler de santé publique. Cela m'inquiète énormément. Le problème c'est que cette entreprise qui n'existait pas il y a 15 ans, a aujourd’hui 2 milliards et demi d’utilisateurs et en sait beaucoup sur nous. Le vrai problème c'est la distribution de l'information et le concept américain de la liberté d'expression qu'il veut imposer sur toute la planète, même si ce n'est pas exactement le même chez nous en France.
Julien Le Bot, journaliste spécialisé dans le numérique, auteur de Dans la tête de Mark Zuckerberg, édition Solin/Actes Sud, qui sort le 06 novembre prochain
Il y a sur Facebook un problème de la visibilité, ce qui est dangereux c'est que cette visibilité telle qu’elle fonctionne sur Facebook ne valorise que des propos outranciers. Contrairement à ce que dit Mark Zuckerberg, ce n'est pas un lieu où on est tous égaux devant la prise de parole, il y a un grand ordonnancement des contenus, il y a une hiérarchie de l’information et des messages qui sont proférés sur Facebook et c'est très problématique.
Pour aller plus loin :
La vidéo de l'échange entre Alexandria Occasio-Cortez et Mark Zuckerberg: Désinformation sur Facebook : Ocasio-Cortez fait souffrir Zuckerberg au Congrès américain , Le Parisien
Le livre de notre invité: Dans la tête de Mark Zuckerberg, Julien Le Bot, Actes Sud, 2019
Le film de notre deuxième invité diffusé sur Arte: Comment Trump a manipulé l’Amérique
Mercer, l’homme de l’ombre, Le Monde
Mark Zuckerberg défend la liberté d’expression et se fait critiquer pour son double discours , Le Monde
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