Hip-hop à l'école : penser pour mieux danser (et vice-versa)

Ouvrir un lycée public huppé à des élèves au parcours scolaire chaotique, envisager une nouvelle mixité sociale, motiver les adolescents par leur passion de la danse hip-hop, c'est le pari qu'on fait le proviseur Barrand et le prof d'EPS David Bérillon à Turgot. Les réalisateurs Thierry Demaizière et Alban Teurlai ont suivi 8 élèves de seconde et de terminale pendant l'année scolaire 2018-2019. Alternant scènes de danse, moments de confidences et entretiens bilans à chaque trimestre avec les enseignants, le film donne à voir toute l'énergie et l'implication des élèves et des enseignants.

De film en film, les deux réalisateurs continuent l'exploration du corps : pornographie dans "Rocco" (2016), danse classique dans "Relève" (2017), corps des pèlerins et des personnes handicapées dans "Lourdes" (2018), corps des danseurs et chorégraphes dans leur série "Move" sur Netflix (2020). Avec "Allons enfants" c'est au hip-hop qu'ils s'intéressent. Cette musique leur permet de trouver un point de rencontre entre la jeunesse et la pédagogie. "On a continué cette fois avec le hip-hop, dit Thierry Demaizière. Cette fois, c'est du free-style, ces gamins arrivent à dire avec la danse ce qu'ils n'arrivent pas toujours à dire dans leur vie". Les élèves viennent pour certains de banlieue et sont en échec scolaire. Comme le dit leur prof David Bérillon, il s'agit de les "attraper" et de leur "éviter de glisser".

Les élèves répètent régulièrement que "la danse c'est de la déter" : "Il y a un double sens à ce mot, précise Alban Teurlai. C'est le déterminisme social et la détermination. C'est le projet du lycée Turgot initié par ce proviseur visionnaire et ce prof d'EPS qui, il y a 7 ans, se dit : "On va aller chercher des lycéens qui viennent de quartiers un peu compliqués de Paris ou de proches banlieue. Et en les fédérant autour du hip-hop, leur passion commune, on va leur redonner goût au scolaire. Force est de constater que ça marche."

"Allons enfants" est aussi un film politique car cette classe hip-hop est l'occasion de recréer de la mixité sociale et de faire en sorte que les élèves se découvrent, au-delà des différences sociales, des codes en commun.

Un film de fiction, adapté du documentaire de Demaizière et Teurlai, est actuellement en préparation. Il sera réalisé par Mohamed Hamidi et Romain Duris y interprètera le rôle du professeur de hip-hop.