Vingt-huit ans après son film "Irma Vep" (1996), le réalisateur Olivier Assayas revient en 2022 avec la série du même nom, présentée au festival de Cannes. Zoom sur le personnages mythique d'Irma Vep depuis les feuilletons de Louis Feuillade en 1915.
- Olivier Assayas Réalisateur, scénariste
Le personnage iconique d'Irma Vep aura inspiré nombre d'artistes à travers le monde. Le réalisateur Olivier Assayas en fait largement partie, puisqu'il modernise ce personnage à deux reprises : en 1996 dans son film "Irma Vep", puis en 2022 dans une série du même nom.
"A travers « Irma Vep », j’avais envie de montrer qu’il est possible de faire des films autrement, qu’il peut y avoir de l’indépendance, une totale liberté de ton, que l’on peut faire du cinéma sans argent, en quatre semaines" expliquait Olivier Assayas en 1996. Avec son film " Irma Vep", Olivier Assayas souhaitait revisiter le film muet " Les Vampires" de Louis Feuillade en 1915. Il raconte l'histoire d'une grande vedette du cinéma asiatique qui débarque à Paris à la demande du réalisateur René Vidal pour interpréter Irma Vep, le personnage qu'avait créé autrefois Musidora, dans un remake des "Vampires" de Feuillade.
Musidora, l'actrice mythique de Louis Feuillade, est l'une des premières femmes fatales du cinéma, devenant « la dixième muse » des surréalistes : André Breton a vu en elle l’image de la beauté moderne. Olivier Assayas choisit l'actrice hongkongaise Maggie Cheung pour se mouler dans les pas de Musidora et incarner après elle Irma Vep. Ce n'est plus une combinaison de soie noire que revêt Maggie Cheung, comme l'avait fait Musidora, mais une combinaison de latex. Maggie Cheung joue son propre rôle dans le film : grande vedette du cinéma asiatique pour ses films d'actions, elle débarque à Paris pour incarner le rôle d'Irma Vep alors qu'elle ne parle pas français. Une mise en abyme chère à Olivier Assayas, qui joue avec les frontières entre le réel et la fiction et nous parle du cinéma en train de se faire. De nombreuses références cinématographiques, ainsi que des extraits du film de Louis Feuillade, convoquent le passé du cinéma et nous livre une réflexion sur l'industrie contemporaine du cinéma. Olivier Assayas considère que "c'est un film de 8h qui déploie des thèmes comme ceux du visible et de l'invisible, ceux de la drôlerie, des paradoxes et des drames. C'est un tournage de films qui racontent quelque chose aussi sur la situation du cinéma d'aujourd'hui".
Mais Olivier Assayas ne s'arrête pas là. Vingt-six ans après son film, le réalisateur développe son film en une saison d’une série unique en huit épisodes pour la plateforme américaine HBO Max. C'est cette fois-ci l'actrice suédoise Alicia Vikander qui prend le rôle d'Irma Vep, aux côtés de Vincent Macaigne. Olivier Assayas affirme avoir fait "tout ce que je n’ai pas pu faire dans le film d’origine" : en modifiant légèrement le synopsis, il nous parle peut-être encore davantage aussi du cinéma contemporain et de l'écosystème du cinéma français. Il se joue de cet entremêlement des époques et entretient la confusion entre le passé et le présent, la fiction et la réalité.
Pour Assayas, faire la distinction entre film et série sur le seul critère de la durée serait une « chose absurde. Dans ce cas, il faudrait dire qu'un film qui fait 2h- 2h30 est du cinéma, tandis que le même film déployé sur 8h n'en serait pas. Tout d'un coup, la qualité de la question entre le cinéma et le cinéma, ce serait la durée ! Ce qui serait extrêmement injuste vis-à-vis de la Maison des bois de Maurice Pialat, Fanny et Alexandre ou Scènes de la vie conjugale d'Ingmar Bergman ou Twin Peaks de David Lynch. […] Pour moi, la durée n'est pas une problématique, ne fait pas partie des problématiques "cinéma versus quelque chose", qui est d'une autre nature qui serait la série. Je suis parfaitement convaincu par contre que ce qui relève du flux, ce qui est fait pour nourrir le flux selon une pensée qui est une pensée algorithmique, ressemble beaucoup moins au cinéma qu'un film qui est fait avec 3 € dans un coin et qui serait le cinéma indépendant dans ce qu'il peut avoir de plus audacieux et de plus radical. »
Les premiers épisodes de la série "Irma Vep" seront diffusés sur sur HBO aux États-Unis le 6 juin et sur OCS City à partir du 7 juin en France.
Extraits sonores :
- Extrait de Irma Vep (Olivier Assayas, 1996)
- Musidora, INA, "Archives du cinéma" : Henri LANGLOIS, 01/01/1945
- Extrait de la série Irma Vep (Olivier Assayas, 2022)
L'équipe
- Production
- Réalisation
- Collaboration
- Collaboration
- Collaboration
- Collaboration
- Stagiaire
- Stagiaire