La grande table de Jean-François Piège

 Jean-Francois Piege posant dans son établissement «  Le Grand restaurant » Octobre 2015
 Jean-Francois Piege posant dans son établissement «  Le Grand restaurant » Octobre 2015  ©AFP - BERTRAND GUAY
Jean-Francois Piege posant dans son établissement « Le Grand restaurant » Octobre 2015 ©AFP - BERTRAND GUAY
Jean-Francois Piege posant dans son établissement « Le Grand restaurant » Octobre 2015 ©AFP - BERTRAND GUAY
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Aux fourneaux avec le chef cuisiner Jean-François Piège et son "Grand livre de la cuisine française" (Hachette, déc. 2020).

Avec

La cuisine selon Jean-François Piège, c'est d'abord une histoire d'ingrédient, de celui qu'on cultive, qu'on choie avant de le mettre à l'honneur autour d'une recette. C'est aussi le petit plat mijoté, le goût pour les sauces, la part belle aux viandes, aux poissons... toute une tradition "bourgeoise" et "populaire" héritée d'un patrimoine culinaire aujourd'hui questionné par des tendances de fond, du soucis de l'environnement aux préoccupations sur le bien-être animal. 

Une cuisine à contretemps? Peut-être, mais aussi dépositaire d'un patrimoine que le chef étoilé entend bien perpétuer, signant aujourd'hui une véritable anthologie gastronomique, dans les pas du "Grand Dictionnaire" d'Alexandre Dumas. Car cette cuisine est avant tout, pour son fervent défenseur, une affaire de  partage d'une mémoire à transmettre par les fourneaux, le temps d'un repas; bien plus que le plat, c'est la mémoire du goût et des émotions qu'il entend sublimer.

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La racine du mot "tradition", c'est "transmettre". Je pense que lorsqu'on fait un ouvrage comme le mien, où l'on recense des recettes qui ne se retrouvent plus aujourd'hui, c'est une façon de s'appuyer sur un savoir-faire pour le transmettre. Pour savoir ce qu'on fait aujourd'hui, encore faut-il savoir d'où l'on vient et savoir faire ce qui est l'identité de la cuisine en France. (Jean-François Piège)

Le patrimoine culinaire français a été codifié de nombreuses fois, dans de nombreux ouvrages comme ceux d'Edouard Nignon, d'Auguste Escoffier, de Joseph Favre... ça a toujours été, au delà de la nourriture pour vivre, une façon de s'exprimer. Les officiers de bouches sont des acteurs plus que des gens de maison. (Jean-François Piège) 

A quelques jours de Noël, le chef partage avec nous quelques saveurs qui l'ont fait voyager, un voyage intérieur d'abord, des souvenirs d'enfance aux émotions des sens, mais aussi la traversée d'une France des terroirs, ces " territoires " qu'on n'a jamais fini de parcourir, éternelle épopée du goût. Véritable somme d'anthologie, son " Grand Livre" recense 1 000 recettes, comme un voyage à travers une France des saveurs et du savoir-faire.

Aujourd'hui à la tête de 5 restaurants hérités d'une culture gastronomique mais aussi du bistrot, inspiré par une cuisine populaire, Jean-François Piège partage son inquiétude face à la fermeture prolongée des restaurants. Si le " Click & Collect " qu'il a d'ailleurs mis en place dans son établissement permet de continuer un semblant d'activité, c'est tout le secteur qui est menacé, et, avec lui, surgit le risque de voir disparaître des pans entiers de notre tradition culinaire, qui va bien au-delà d'un simple repas à emporter. 

Les charges sont les mêmes pour un bistrot ou un grand restaurant : pour bénéficier des aides de l'Etat, il fallait perdre 50 % du chiffre d'affaires. Or nous avons perdu 44 %. On avait donc le droit à rien. (...) Ce qui me fait peur, c'est qu'on perde le savoir-faire. (Jean-François Piège)

Pourquoi la cuisine française est-elle ce qu'elle est ? Parce qu'est née à travers ces "territoires" cette conjonction de la culture, du lieu où l'on est, du temps qu'il fait et du savoir-faire. Si à cause de la crise, une partie de ces territoires ne continue pas, on va perdre bien plus que de l'argent, notre identité. Il faut qu'on en ait conscience. (Jean-François Piège) 

La Grande table idées
33 min