L'écrivain Mario Vargas Llosa, prix Nobel 2010, nous présente son nouveau livre, "Temps sauvages" (Gallimard, septembre 2021) : roman d'espionnage, fresque historique, réquisitoire politique... Un livre foisonnant à découvrir.
"Je n’accepte pas que la littérature soit un amusement, même élaboré et sophistiqué. Si c’est un divertissement, ce doit être un divertissement problématique". C'est ce qu'affirmait Mario Vargas Llosa dans une interview pour Le Monde des Livres en 2008.
L'écrivain péruvien naturalisé espagnol tient sa promesse en ouvrant la rentrée littéraire avec un roman aussi divertissant que problématique : Temps Sauvages, ( Gallimard, 2021) qui retrace l'histoire de l'ingérence des Etats-Unis au Guatemala. Un livre qui raconte la naissance de la propagande comme outil politique et qui lève le voile sur le scandale de la révolution de 1954. Ou comment, pour protéger les privilèges d'une grande compagnie fruitière, la CIA a aidé au renversement d'un gouvernement démocratique soupçonné de bolchévisme.
Que le Guatemala soit un satellite de l'URSS et sa porte d'entrée en Amérique latine relève pourtant de la désinformation, orchestrée par la publicité et relayée par la presse :
Le président guatémaltèque n'était pas communiste du tout, au contraire ! Il était un grand admirateur des Etats-Unis, et ce qu'il essayait de faire, c'était de convertir le Guatemala en de petits Etats-Unis pour montrer que le Guatemala devenait une démocratie véritable. (Mario Vargas Llosa)
Ironie du sort : les Etats-Unis (dont s'était inspiré Jacobo Arbenz, et le modèle vers lequel il tendait) auront aussi et surtout été l'ennemi qui a brisé les efforts démocratiques. Mais l'ironie se renverse lorsque l'écrivain cite ses premières sources de documentation pour la rédaction du roman :
Il faut dire que je n'aurais jamais pu écrire un roman pareil sans publications américaines ! Parce que ce qui est drôle, c'est qu'aux Etats-Unis on publie, après quelques années, tous les documents reliés à une affaire politique. Or on est en train de publier tout ce qui est relatif au coup d'état contre le président légitime Jacobo Arbenz. Alors la première matière d'information que j'ai eue a été publiée par le Gouvernement des Etats-Unis. (Mario Vargas Llosa)
J'ai suivi très strictement les actions militaires, mais, pour le reste, j'inventais beaucoup, j'inventais des personnages ... J'ai travaillé comme travaillent les romanciers dans les romans qu'ils écrivent, en suivant la réalité jusqu'à un certain point, et partir de ce point là, en utilisant la fantaisie, l'invention ... Oui, c'est un roman, pas un livre d'histoire. Mais c'est un roman qui du point de vue politique est vrai. (Mario Vargas Llosa)
Un roman qui reste fidèle en tout cas à la figure de Jacobo Arbenz, président sacrifié :
J'ai voulu rendre un hommage à un héros tragique de notre histoire qui a essayé de faire une réforme légale dans son pays, et qui avait comme exemple les Etats Unis, mais qui a été détruit par les Etats Unis mêmes dans un cas d'injustice énorme. (Mario Vargas Llosa)
Extraits sonores :
- Extraits du documentaire Propaganda, la fabrique du consentement, un film de Jimmy Leipold (2018)
- Claudio Magris / France Culture / 2013
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