Zep existentiel

Dans l'exposition " Zep. L'âge d'homme" au Grand Palais Ephémère, Zep dévoile la veine intimiste et réaliste qu'il développe depuis 2013 avec les éditions Rue de Sèvres en parallèle de ses albums _Titeuf__,_ chez Glénat. L'exposition s’articule autour de quatre albums : Une Histoire d’hommes, Un bruit étrange et beau, The End et Ce que nous sommes. Elle réunit des originaux et des reproductions qui permettent de montrer à quel point le travail de Zep repose sur le dessin d'observation (il demande à des proches de poser pour lui) et sur une conscience accrue de la nature et de la société de consommation.

Sa nouvelle bande dessinée, Ce que nous sommes, raconte les mésaventures de Constant qui, en 2133, a un cerveau numérique. C'est le projet Data Brain. Les habitants les plus riches de la planète sont connectés grâce à des implants dans le cerveau et ont une connaissance illimitée. Malheureusement, le Data Brain consomme 95% de l'énergie disponible sur Terre et les autres êtres humains, "non augmentés", survivent dans les forêts. Un soir, au cours d'une fête, Constant est violemment déconnecté du Data Brain et doit apprendre à vivre sans les connaissances qu'il a téléchargées depuis sa naissance. Pour l'auteur, ce scenario est "à peine une caricature de ce qu'on vit avec nos téléphones. On a déjà délégué énormément de choses aux machines qui nous entourent et le cerveau est une machine pragmatique, elle ne va pas faire un travail qui est inutile."

Pour cette bande dessinée, Zep s'est beaucoup documenté sur un projet existant : le Blue Brain Project. A la manière d'un journaliste, comme il l'avait fait auprès du botaniste Francis Hallé pour The End, il s'est renseigné auprès du professeur Magistretti qui a participé au Blue Brain Project.

Ce que nous sommes renvoie déjà par son titre à une dimension philosophique. Zep interroge la frontière ténue entre "l'humain augmenté" et "l'humain assisté". A travers les aventures de Constant, Zep examine le processus de l'apprentissage de l'être humain. Peut-on apprendre sans effort ? Que garde-t-on en mémoire ? Entre science-fiction et philosophie, l'auteur imagine un futur où la technologie a pris le pas sur l'humanité. Car la fiction, dit-il, permet "d'ouvrir des futures possibles". Grâce à son dessin fourmillant de détails, il livre une véritable déclaration d'amour à la nature et aux sensations. Il insiste d'ailleurs sur son travail de la couleur : " c'est un peu comme la musique au cinéma, c'est ce qui va créer les ambiances et donner l'alternance des séquences. On sait qu'on quitte une séquence pour une autre car on change de gamme colorée" affirme Zep.

Extraits sonores :

• Enki Bilal, France Culture, 2018
• Jean-Marc Rochette, France Culture, 2018