Ce qui ne s’achète pas : la définition du bonheur selon Cynthia Fleury

Cynthia Fleury
Cynthia Fleury - Francesca Mantovani - Editions Gallimard
Cynthia Fleury - Francesca Mantovani - Editions Gallimard
Cynthia Fleury - Francesca Mantovani - Editions Gallimard
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Le silence, l’horizon, le soin des morts, la santé physique et psychique …autant de biens inappropriables qui doivent être défendus. C'est tout le principe de la "Charte du Verstohlen", un manifeste en dix points pour défendre "ce qui ne peut nous être volé". Rencontre avec l'une de ses auteures.

Avec

Inappropriable, bien commun, bonheur national brut… “nommez-le comme vous voulez” nous dit le tract  Ce qui ne peut être volé. Charte du Verstohlen (série Grand format, Gallimard, 2022), un manifeste en dix points co-écrit par Cynthia Fleury et le designer Antoine Fenoglio. "Dix points non négociables, qui paraissent évidents mais qui ne le sont plus" nous dit notre invitée. cela va du silence à la santé, en passant par le droit d'"accéder à une vue", soit un paysage et un horizon à regarder auquel chacun devrait avoir droit. Car si préserver une vue apparaît comme "une donnée basique pour l'architecte ou le designer", qu'est-ce que préserver une vue pour un directeur de prison ou un directeur d'école? Cette charte est donc aussi à destination de "l'architecte qui sommeille en nous".

Les auteurs définissent tous ces objets et les méthodes pour les défendre. Le proof of care , le climat de soin, l'enquête, la furtivité, autant de moyens de protéger ce qui ne peut nous être volé. Ainsi, c'est l'écrivain Alain Damasio, auteur notamment du roman Les Furtifs (2019), qui a inspiré aux auteurs le concept de "furtivité", auquel le titre est dédié, "Verstohlen " renvoyant littéralement au terme “furtivement” en allemand. Le furtif, politisé, nous parle des manières de s’exfiltrer de la réalité telle qu’elle nous est proposée aujourd’hui, réduite, nous disent les auteurs, aux processus de réification quasi quotidienne.

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En défendant ce qui ne peut nous être volé, c'est aussi une certaine conception de la démocratie mais aussi de la vulnérabilité qui est défendue. Le vulnérable devient un vecteur de connaissance et non plus un objet de discrimination ou de stigmatisation.

Cynthia Fleury est philosophe et psychanalyste, professeure titulaire de la chaire “Humanités et santé” au Conservatoire national des arts et métiers et titulaire de la “ chaire de Philosophie à l’hôpital” du GHU Paris psychiatrie et neurosciences.

La Grande Table culture
27 min

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