
Dans quelle(s) temporalité(s) évoluons-nous ? Faisons-nous face à un présent trop (op)pressant ? Pouvons-nous vivre dans l’Anthropocène ? Nous abordons ces questions avec notre invité.
Christophe Bouton (professeur de philosophie à l’Université Bordeaux Montaigne, spécialiste des questions du temps et de l’histoire dans la philosophie contemporaine).
Dans une époque où tout pousse à aller plus vite, à faire toujours plus « avec l'impression de l’urgence », comment aborder la thèse de l’ « Accélération de l’histoire », concept né sous la plume de Daniel Halévy en 1948 puis diffusé depuis la deuxième moitié du XXe siècle ?
Christophe Bouton est professeur de philosophie à l’université Bordeaux-Montaigne. Spécialiste de Hegel, il a élargi ses recherches aux questions du temps et de l’histoire dans la philosophie contemporaine. Dans un nouvel ouvrage publié le 20 mai 2022 aux éditions du Seuil, L'Accélération de l’histoire. Des Lumières à l’Anthropocène, il établit une chronologie des régimes d’historicité et clôt son étude par l’analyse de l’Anthropocène. « Depuis la fin du XVIIIe siècle, on assiste à l'apparition de l'idée que l'histoire irait de plus en plus vite, notamment avec la Révolution française qui a amené un changement rapide des institutions. Puis avec la révolution industrielle [amenant] (....) un changement du rythme des améliorations scientifiques et techniques ». Pour Christophe Bouton, il ne s'agit « pas tant d'une accélération du temps qu’une accélération dans l’histoire voire des histoires ».
Dans une modernité qui ferait s’affronter passé et futur contre le présent, Christophe Bouton appelle à nuancer l’hégémonie du présentisme. Mais aussi à se prémunir des supposées accalmies de l'accélération : « la pandémie a créé une grande décélération, à un niveau mondial (...). Mais comme l'accélération a été subie, elle a entrainé un désir de reprise voire d’accélération pour rattraper le retard. Donc il y a un peu deux tendances entre repartir comme avant voire repartir plus vite ; et une autre tendance qui dit qu’on peut avoir un autre rapport au temps ou au travail ».
Il propose alors de reconsidérer d’autres régimes d’historicité en jeu, en dialogue ou en concurrence. La force de cet ouvrage reste certainement de reconsidérer l’Anthropocène comme nouveau régime d’historicité où le présent établit un lien entre passé et futur, sans en déconsidérer aucun. Ce qui amène Christophe Bouton à conclure que « le monde réel et historique a plusieurs rythmes qui s’enchevêtrent ».
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