"Dire stop", une épreuve en démocratie ?

Un manifestant de la CGT lors d'une manifestation des Gilets jaunes contre le projet de privatisation d'ADP devant l'Assemblée nationale à Paris le 13 mars 2019
Un manifestant de la CGT lors d'une manifestation des Gilets jaunes contre le projet de privatisation d'ADP devant l'Assemblée nationale à Paris le 13 mars 2019 ©AFP - Philippe LOPEZ / AFP
Un manifestant de la CGT lors d'une manifestation des Gilets jaunes contre le projet de privatisation d'ADP devant l'Assemblée nationale à Paris le 13 mars 2019 ©AFP - Philippe LOPEZ / AFP
Un manifestant de la CGT lors d'une manifestation des Gilets jaunes contre le projet de privatisation d'ADP devant l'Assemblée nationale à Paris le 13 mars 2019 ©AFP - Philippe LOPEZ / AFP
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Pourquoi le référendum contre la privatisation d'ADP est-il un formidable levier de démocratie participative ? On en parle avec Daniel Schneidermann, journaliste et créateur du site "Arrêt sur images", dans "Pouvoir dire stop" (Les Arènes, septembre 2019).

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9 avril 2019 : 250 députés et sénateurs de la France insoumise aux Républicains lançaient le projet d’un référendum d’initiative partagée (RIP) contre la privatisation d’Aéroports de Paris, dont l’État détient 50,6 % des parts. Vinci, actuellement actionnaire à 8 %, serait le racheteur pressenti. Début décembre, le projet de référendum d’initiative partagée passait la barre du million de signatures : il en faut 4 717 396. Emmanuel Macron avait déclaré le 25 avril 2019 devant la presse à l'Élysée vouloir abaisser le seuil de déclenchement du RIP à un million, dans le cadre de la réforme constitutionnelle qu'il projette – il ne l’a plus évoqué depuis. 

Samedi 14 décembre, des Gilets jaunes sont allés manifester à Roissy Charles-de-Gaulle contre la privatisation d’ADP ; ils y étaient déjà cent cinquante en mars derniers, organisant une flashmob de protestation. Le même jour, dans une tribune parue dans le Monde, « Le pays ne veut plus que les biens communs soient bradés », le député communiste Stéphane Peu enjoint le Président d’organiser une référendum législatif.

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Journaliste spécialisé dans la critique média et l’analyse des images télévisuelles, Daniel Schneidermann a enquêté sur le pourquoi de cette privatisation. Il en livre les résultats dans Pouvoir dire stop ( Les Arènes, 2019). Le fondateur du site " Arrêt sur image" diffracte les enjeux de la décision : écologiques, économiques et politiques. Si le référendum d'initiative citoyenne est pour lui l'enjeu crucial - celui de la démocratie participative -, la dimension écologique de la privatisation est également de taille. En effet, l'argument des partisans de la susdite privatisation est qu'elle devrait permettre l'ouverture de nouvelles lignes, toujours plus. Daniel Schneidermann montre à quel point l'engouement pour ces nouvelles lignes masque la principale concernée : la planète. Il démonte ensuite l'idée que l'avion est responsable de 2% "seulement" des émissions de gaz à effet de serre : il s'agit en vérité de 6%.

La privatisation des aéroports en prévision du développement du trafic aérien est une aberration écologique totale.             
(Daniel Schneidermann)

Il y a derrière la volonté de privatisation d’ADP la conviction que le privé est plus efficace que le public.             
(Daniel Schneidermann)

En outre, le journaliste prend acte de ce qui est pour lui une nouveauté : la méfiance croissante des citoyens envers la démocratie représentative. En ce sens, le référendum d'initiative partagée constitue un formidable levier, aussi inattendu qu'efficient, pour mettre à jour le dysfonctionnement de la représentativité. Si cette mesure est méconnue,  c'est également en raison de sa récente histoire : elle a été adoptée en 2008, sous la présidence de Nicolas Sarkozy, en dépit de son opposition. Il est enfin un autre volet de l'enquête de Daniel Schneidermann : le silence relatif des médias au sujet de l'affaire ADP. Paradoxalement, c'est par des médias traditionnels qu'il a eu connaissance des faits.

Il y a quelque chose de grippé aujourd’hui dans la manière dont la France est gouvernée, et quand j’ai vu arriver le référendum d’initiative populaire, je me suis dit qu’il pouvait être un vrai dégrippant.             
(Daniel Schneidermann)

Extraits sonores : 

  • Bruno Le Maire et Roland Lescure justifient la privatisation d'ADP ("Là-bas si j'y suis", 7 novembre 2019)
  • François Ruffin sur les bugs techniques du référendum (Europe 1, 14 juin 2019)
  • Les "Gilets Jaunes" face aux médias (RT France, 21 mai 2019)
La Grande table
27 min

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