Mathématiques, le parent pauvre de l’enseignement ?

Le 2 juin, Emmanuel Macron a annoncé le retour des mathématiques en option dans le tronc commun de première lors d’une visite d’école à Marseille. Une option qui selon lui n’est “pas obligatoire”, et qui “laisse la possibilité à tous les élèves de choisir, hors de la spécialité, l’heure et demie de mathématiques qui avait été sortie du tronc commun”. Cette décision est le résultat d'un constat, celui du recul des mathématiques au lycée. En janvier, les associations d'enseignants et de chercheurs avaient alerté sur la baisse d'heures de mathématiques dispensées au lycée. Depuis la réforme du lycée de 2018, la discipline devenue non obligatoire à partir de la classe de première a perdu 18% de ses heures. La professeure Nathalie Sayac alerte sur la baisse de popularité des mathématiques au lycée : "A partir de la première, il y a beaucoup moins d’élèves qui font des mathématiques. Avec le système des filières, 50 000 élèves ne faisaient plus de maths en première. Aujourd’hui, on est passés à 170 000 élèves. C’est un gros bond en arrière."

La professeure Nathalie Sayac publie le 31 mai une tribune dans le Monde adressée au ministre de l’Education Nationale intitulée " Monsieur le ministre Pap Ndiaye, donnez une place aux “maths pour tous”". Elle dénonce le fait que les mathématiques soient devenues une discipline qui sélectionne les élèves et s’impose comme un choix incontournable pour la poursuite d’études dans des filières d’excellence. Selon elle, la réforme de 2018 qui abolissait les filières et visait justement à mettre fin au préjugé de la série S comme “voie royale” et porte d’accès aux études d’excellence n'a pas eu l'effet escompté. Cette nouvelle organisation a généré une série de disparités, de genre, mais aussi d'origine sociale dans le choix des mathématiques au lycée. Pour Nathalie Sayac, "il importe de changer ce rapport à cette discipline : il est essentiel de permettre aux élèves de réaliser que cette discipline doit être apprise et enseignée au lycée, et ce le plus longtemps possible."

David Bessis est ancien élève de l’Ecole Normale Supérieure de Paris et titulaire d’un doctorat de mathématiques. Il publie au Seuil Mathematica. Une aventure au cœur de nous-mêmes. Contre les idées reçues qui en font une discipline élitiste, intimidante et abstraite, David Bessis montre que les mathématiques sont une discipline à la portée de tous. Il montre que l'enseignement des mathématiques peut se comparer aux grands apprentissages de l'enfance, à savoir apprendre à marcher, à parler ou encore à faire ses lacets. "Derrière toutes ces questions de l’enseignement, il y a un malentendu profond sur ce que sont les mathématiques. Les grands mathématiciens les vivent comme une expérience physique. Les maths telles que les grands mathématiciens les envisagent et telles qu'on devrait tous les envisager sont quelque chose de charnel, qui nous permet de progresser, de devenir plus intelligent, et qui va à l’encontre de beaucoup de préjugés."

Il montre qu'il existe une méthode pour être fort en maths que l'on n'apprend pas à l'école. Cette méthode laisse une place centrale à l'intuition, contre l'idée reçue que les mathématiques sont une affaire de logique. Il montre aussi que les plus grands mathématiciens, à l'instar de Grothendieck, d'Einstein ou de Descartes, n'ont pas usé d'une méthode différente que celle qu'il présente dans son ouvrage.

Extraits sonores :

• Alexander Grothendieck, 27 janvier 1972, conférence du CERN
• Cédric Villani Slate France
• Extrait du "Monde de Nathan" (2014) réalisé par Morgan Matthews