De la haine des médias à la haine dans les médias, de la défiance envers les journalistes à la polarisation des débats... On en parle avec l'historien Gérard Noiriel et le sémiologue François Jost.
- François Jost Sociologue, théoricien de l'image
- Gérard Noiriel Historien, directeur d'études à l’EHESS, spécialiste de l’immigration et de l’histoire de la classe ouvrière.
Gérard Noiriel est historien et directeur d’études à l’ Ecole des hautes études en sciences sociales (EHESS). Il est notamment l’auteur d' Une histoire populaire de la France. De la guerre de Cent Ans à nos jours (Agone, 2018). Partisan de la fonction sociale de l'histoire, soit d'une discipline ouverte au grand public, il publiait en 2019 Le Venin dans la plume. Edouard Drumont, Eric Zemmour et la part sombre de la République (La Découverte), un ouvrage dans qui compare la grammaire identitaire des deux pamphlétaires nationalistes, d'hier à aujourd'hui. Une manière, notamment, de répondre au Destin français d'Éric Zemmour qui, dit-il, traine nombre d'historiens, dont lui-même, dans la boue.
Il faut respecter les publics et se dire que ces gens ont des raisons. C'est ce que j'ai essayé de comprendre en analysant notamment les réactions sur les réseaux sociaux.
(Gérard Noiriel)Publicité
Les gens cherchent à être confortés dans ce qu'ils croient confusément et qui est exprimé aussi publiquement, qui donne donc une légitimité.
(Gérard Noiriel)
Sémiologue, fondateur du Centre d’Études sur les Images et les Sons médiatiques, François Jost est l’auteur de nombreux livres sur l’image et les médias : le 3 septembre 2020, il publiait Médias : sortir de la haine (CNRS éditions), un ouvrage qui vise à fournir les outils pour une critique nécessaire mais juste des médias.
La censure venait d'en haut. Aujourd'hui, elle vient d'en bas : c'est le public lui-même qui censure les propos des journalistes; (…) par les réseaux sociaux, notamment.
(François Jost)
Se penchant sur le rôle des médias, mais aussi sur le rôle de ceux qui relayent l'information et sur ceux qui la reçoivent, il montre que le monde fait de moins en moins confiance à la télévision, à la radio ou à la presse, souvent suspectés d’être liés au pouvoir politique ou aux puissances de l’argent. Les journalistes passent pour les «nouveaux ennemis du peuple» et sont mis en danger jusque dans leur intégrité physique tandis que de plus en plus de citoyens éteignent le poste, désabusés par des informations qu'ils estiment mensongères ou trop négatives.
Pourtant, les médias constituent un contre-pouvoir indispensable de nos sociétés démocratiques. Etudiant l'histoire des médias et la prédominance croissante des stratégies marketing qui, bien souvent, cèdent la place aux polémistes et à l'information spectacle, l'auteur remonte aux racines de la haine pour trouver les moyens d'en sortir.
Dans un premier temps, les chaînes d'information étaient faites pour picorer. (...) Le problème a été de garder des gens, et donc de fabriquer des histoires, de fabriquer du récit. (…) Puis on a ajouté du débat, car le débat permet de combler les trous entre deux nouvelles informations. C'est avec cette arrivée des débats que l'orientation des chaînes, la mise en avant du commentaire, de petits mots, de petites phrases, de tweets, a commencé à s'installer.
(François Jost)
A l'heure d'une banalisation de la haine sur les médias et de la polémique, François Jost en appelle à une éthique de la responsabilité.
Extraits sonores :
- "Balance Ton post", Cyril Hanouna, avril 2019
- Alain Finkielkraut, 21.10.2013
- "L'Heure des Pros" (1ere partie), 06.05.2019
- "L’Heure des Pros" avec Éric Zemmour et Yassine Belattar, mars 2019
- Pierre Bourdieu, "Arrêts sur images", 1996
- Juliette Gréco "La chanson de septembre" (France Culture, "La joie de vivre", 1953)
L'équipe
- Production
- Collaboration
- Réalisation
- Collaboration
- Collaboration
- Collaboration
- Collaboration