Le Covid-19 sera-t-il le choc qui mettra fin aux inégalités actuelles comme l'ont fait auparavant d'autres chocs historiques? On en parle avec l'historien Walter Scheidel, auteur d'"Une histoire des inégalités : de l'âge de pierre au XXIe siècle" (janvier 2021).
- Walter Scheidel Historien
Walter Scheidel est historien de l’antiquité à l'université Stanford - titulaire de la chaire Dickason -, spécialisé dans l'histoire des civilisations antiques européennes -, référence en matière d'analyse démographique des populations de l'empire romain.
En janvier 2021 paraissait chez Actes Sud la traduction de son livre The Great Leveler. Violence and the history of inequality from the Stone Age to the twenty-first century _(_Princeton University Press, 2017). En français, Une histoire des inégalités : De l'âge de pierre au XXIe siècle. Cet ouvrage qui se penche sur le développement des inégalités de la préhistoire à nos jours est préfacé par le sociologue Louis Chauvel, qui décrit et nuance la démarche de l'auteur, et qui fait des rapprochements avec la pandémie de Covid 19.
Revenons à l'âge de pierre, quand ont commencé les droits de l'agriculture, le droit de propriété, quand on a commencé à donner en héritage aux générations suivantes. Les inégalités sont apparues à ce moment là, et elles ont été amplifiées à travers le temps. (Walter Scheidel)
Alors qu'un rapport Oxfam publié le 25 janvier 2020 soulignait que, en dépit de la pandémie, les riches sont toujours plus riches, Walter Scheidel montre que, historiquement, seule la violence a permis de réduire les inégalités. Des chocs de l'ordre de quatre groupes : la guerre de masse, la révolution, l’effondrement d’un État et les pandémies meurtrières. L'auteur les rapproche des quatre cavaliers de l’apocalypse, devenus les quatre cavaliers du nivellement (« the Four Horsemen of Leveling »), et file cette métaphore tout au long de l'ouvrage. Selon lui, le processus d’accumulation inégalitaire doit aboutir, à terme, à un point de retournement catastrophique, un véritable effondrement du système social du fait de fragilités accumulées.
Les guerre frappent plus les riches que les pauvres, car les riches ont plus à perdre. (…) La plupart des gens survivent, mais si vous êtes très riche, vous pouvez quasiment tout perdre. (Walter Scheidel)
L'ouvrage fait preuve d'une grande prudence historique, montrant d'abord que plusieurs chemins peuvent conduire à une hausse des inégalités. Louis Chauvel insiste sur le fait que l'auteur évite tout déterminisme et toute théorisation rigide selon lesquels, mécaniquement, l’inégalité produirait guerre, révolution, faillite de l’État ou pandémie. Surtout, il se montre réticent face à l’idée d’“inégalités insoutenables” et ajoute que des sociétés très inégalitaires peuvent quand même se maintenir pendant des siècles.
Non, je ne pense pas que les inégalités seront réduites à cause de la pandémie, elle aura les effets contraires : certaines personnes sont protégées, celles qui travaillent de chez elles, celles qui ont une éducation plus développée... (…) On a vu un accroissement des inégalités en raison de cette pandémie. (Walter Scheidel)
Extraits sonores :
- Paul Krugman ("Capital in the Twenty-First Century" forum, Graduate Center of The City University of New York, 16 avril 2014)
- Appel de l'Abbé Pierre, hiver 1954 (Fondation Abbé Pierre)
- Cécile Duflot (Francetv info, 02/02/2021)
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