Peter Handke et les mondes qui l'habitent... De l'écriture dramatique à l'héroïsme de la fuite, deuxième partie de notre grand entretien en présence du prix Nobel de littérature 2019.
En octobre 2019, le jury du Nobel disait vouloir consacrer une oeuvre influente qui a exploré avec ingéniosité linguistique la périphérie et la singularité de l'expérience humaine… Rendez-vous à cette Grande table des idées pour la deuxième partie de notre entretien avec l’écrivain Peter Handke.
Une langue très particulière, et une parole qui se fait rare. Une œuvre, aussi, de plus de quatre-vingt livres ; des romans comme Mon année dans la baie de Personne (1997), des essais sur la fatigue, sur la journée réussie, sur le lieu tranquille ou sur le fou de champignons (Essai sur le fou de champignons. Une histoire en soi, 2013), des scénarios, dont celui des Ailes du désir, réalisé par Wim Wenders en 1987.
C'est, enfin, du théâtre, dont cette nouvelle pièce : Les innocents, Moi et l'inconnu, au bord de la route départementale, mis en scène par Alain Françon au théâtre de La Colline du 3 au 29 mars. L'histoire se déroule sur quatre saisons, du printemps à l'hiver. Au bord d'une départementale, un "Moi" qui prend la parole avant que n'arrivent les innocents et l'été qui chassent le printemps. L'inconnue surgira avec le retour des jours froids.
Je ne savais pas très bien moi-même où devait m’amener cette expédition sur la départementale. J’ai senti que c’était un problème profondément dramatique.
(Peter Handke)
Les autres, soit disant innocents, ne sont pas du tout innocents, ils font beaucoup de mal. Comme beaucoup de gens aujourd'hui, ils font beaucoup de mal sans être coupables. C'est ça le plus grand sujet de la pièce.
(Peter Handke)
L’occasion d’aborder la forme d’un théâtre non conventionnel, les points de rencontre et les frontières entre registre épique et dramatique, le concept d’innocence, chez celui qui, dans les années 1980, était déjà pressenti pour le prix Nobel de littérature, mais dont l'engagement pro-serbe et la présence aux funérailles de Slobodan Milosevic l’ont mis au ban de la société des artistes pendant des années.
Il se confie également sur ses influences littéraires : Goethe, Schiller, Chrétien de Troyes, Saint Jean de la Croix mais aussi Antonio Machado. Dramaturge, réalisateur, scénariste, poète, il est traducteur d’Eschyle, de Sophocle, de Shakespeare, de René Char, de Francis Ponge, d’Emmanuel Bove, et d’un autre Prix Nobel, Patrick Modiano.
Une fois, je me suis dit il faudrait inventer le héros de la fuite héroïque. La fuite, c'est dramatique, héroïque, épique.
(Peter Handke)
A noter, une édition "Quarto" à paraître chez Gallimard en avril 2020, qui regroupera des textes du début de sa production (Les frelons, La femme gauchère....). Publié en 2017 dans les pays germanophones, le roman La voleuse de fruits paraîtra en octobre 2020 dans la collection "Du monde entier", traduit par Pierre Deshusses.
Ecrire, j’ai le sentiment que c’est un métier qui n’est pas permis. J'aime bien me sentir dans la position d’une espèce de hors la loi.
(Peter Handke)
Extraits sonores :
- Remise du prix Nobel de littérature 2019 à Peter Handke (Académie Suédoise, 10/10/2019)
- Extraits de la pièce Les Innocents, Moi et l’Inconnue au bord de la route départementale de Peter Handke (mise en scène de Alain Françon, 2020)
- "The Times They Are a-Changin' (Bob Dylan, 1964)
- Ständchen, en ré mineur S.56 de Franz Schubert par Lise De La Salle
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