Comment Edouard Philippe répondra-t-il à la contestation sur la réforme des retraites? S'inspirera-t-il de l'expérience de ses prédécesseurs? On en parle avec Gilles Boyer, député européen LREM et auteur du roman "Le maître d'hôtel de Matignon" (JC Lattès, octobre 2019).
- Gilles Boyer Conseiller politique d'Edouard Philippe à Matignon, ancien conseiller d'Alain Juppé
Il a été l’un des plus proches collaborateurs d’Alain Juppé, trésorier de la campagne présidentielle de François Fillon et conseiller d’Edouard Philippe à Matignon pendant 2 ans, avant de voler de ses propres ailes pour devenir député européen aux dernières élections de 2019. Gilles Boyer est notre invité aujourd’hui.
Les Français ont un préjugé contre la parole du gouvernement. […] On a un problème de confiance dans la parole publique qui ne date pas d’hier mais qui est une accumulation de déceptions dont le gouvernement paye aujourd’hui le prix.
(Gilles Boyer)Publicité
Pour cette nouvelle semaine de grèves contre la réforme des retraites, et à deux jours de l’annonce, prévue mercredi par Edouard Philippe du contenu de cette réforme, il revient sur son travail de conseiller et sur sa relation avec l'actuel Premier ministre, dont il est resté proche et duquel la politique, dit-il, ne le séparera pas.
Par définition, depuis soixante ans, il y a une seule ligne, celle du président élu. Si le Premier ministre n’est pas d’accord avec ça, il n’a qu’à faire autre chose.
(Gilles Boyer)
Tous deux ont déjà écrit deux livres ensemble, deux polars politiques : L’heure de vérité (Flammarion, 2009) et Dans l’ombre (Lattès, 2011), qui racontent l'envers d'une campagne électorale et de la pratique du pouvoir. Ainsi la fiction devient-elle un moyen de décrire le fonctionnement de Matignon, avec son bal de conseillers et de premiers ministres.
Pour être un bon Premier ministre, il faut être loyal, respecter à chaque instant la légitimité populaire du président, veiller au dialogue et au soutien avec la majorité parlementaire et animer au mieux possible le collectif gouvernemental.
(Gilles Boyer)
C’est en particulier le cas dans le dernier ouvrage de Gilles Boyer : Le maître d’hôtel de Matignon (JC lattes, octobre 2019), qui part d’une histoire vraie pour l’adapter ensuite très librement, selon le prologue du roman : celle de Claude Bluzet, maître d’hôtel depuis 30 ans, qui a travaillé pour treize premiers ministres, de Michel Rocard à Édouard Philippe, et dont Gilles Boyer a modifié le nom.
Il y a les conseillers qui sont toujours d’accord, il y en a qui ne sont jamais d’accord […] et il y a ceux qui parviennent à dire leur vérité, à dire "c’est bien" quand c’est bien et "c’est pas bien" quand ce n’est pas bien.
À ses anecdotes et explications, l’auteur a mêlé ses propres souvenirs, apportant également un personnage fictif, Thomas, et jouant avec les temporalités pour couvrir toute l’histoire de Matignon, des années 1890, lorsque l’hôtel servait d’ambassade à la Autriche-Hongrie, à 2019, avec l’arrivée d’Edouard Philippe.
[Conseiller du Premier ministre], c’est une fonction difficile, mais quand on aime décider, quand on aime l’Etat, quand on aime les affaires publiques […] c’est une fonction extraordinaire. On est la tour de contrôle de l’appareil d’État.
(Gilles Boyer)
Ainsi le Premier ministre est-il à la fois personnage réel et personnage fictif, intégré à des dialogues et à ce grand navire, métaphore souvent employée, qu’est Matignon. En outre, une idée très prégnante est que l’on sait quand on y entre, mais qu’on ne sait jamais quand on en part. Pour certains, Matignon aurait été un enfer, et le quitter un soulagement : l’un des exemples pris, mais nuancé, étant celui d’Alain Juppé au moment des grèves de 1995, une situation qui n’est pas sans rappeler l’actualité en cours. Pour autant, précise Gilles Boyer, Alain Juppé n’a pas regretté sa période à Matignon, ne serait-ce que parce que sa relation à l’Elysée, véritable épée de Damoclès pour le Premier ministre, par ailleurs soumis à nombre d’autres sources de pression, était de l’ordre d’une grande liberté d’action. À l’heure où le gouvernement et la réforme des retraites sont plus que contestés, retour sur la fonction de Premier ministre.
Il ne s’agit pas de se soumettre au système de Bruxelles, il s’agit de pérenniser un système juste et équilibré pour nous et nos enfants. Qui peut dire que 42 systèmes de retraite, c’est vertueux ?
(Gilles Boyer)
Retrouvons cette capacité à entendre les arguments du gouvernement sans le soupçonner des pires turpitudes.
(Gilles Boyer)
Extraits sonores :
- Jean-Pierre Raffarin ("L'enfer de Matignon", INA, 27/10/ 2008)
- Raymond Barre ("L'enfer de Matignon", INA, 27/10/ 2008)
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