Qui aspire aujourd’hui à un retour à la nature et pourquoi ? On en parle avec Sébastien Dalgalarrondo et Tristan Fournier, sociologues, pour "L'utopie sauvage" (Les Arènes, septembre 2020). Avec eux, Pierre Ducrozet, auteur du roman "Le Grand Vertige" (Actes Sud, 19 août 2020).
- Pierre Ducrozet romancier
- Tristan Fournier Chargé de recherche CNRS, socio-anthropologue de l’alimentation et de la santé
- Sébastien Dalgalarrondo sociologue au CNRS
Après des semaines de confinement, nombreux sont ceux qui éprouvent le besoin de revenir à la nature.
Le confinement a vraiment rajouté quelque chose dans la mesure où on découvre nos villes comme de potentielles prisons, on prend conscience d’une forte fragilité de nos modes de vie urbains.
(Tristan Fournier)Publicité
Séjours de jeûne et randonnée pédestre, stages d’identification des plantes comestibles et médicinales, émissions de téléréalité confrontant leurs candidats à des milieux hostiles… et, au centre, l’idée que l’on se fait du chasseur-cueilleur, modèle idéal -idéalisé?- de notre époque. Face à l’angoisse de fin du monde et aux défis du réchauffement climatique, cet ancêtre a le vent en poupe : manger comme lui, vivre comme lui, et même se déplacer comme lui, nous permettrait de nous sortir de la société de surconsommation qui est la nôtre pour mieux nous retrouver.
Il y a ces deux rhétoriques, celle du primitivisme et celle de l’animalisme, dans la rhétorique du jeûne : les promoteurs s’appuient beaucoup sur l’idée que, auparavant, les chasseurs cueilleurs ou les peuples dits premiers, primitifs, s’appuyaient sur cette technique qu’ils considéraient comme très naturelle. […] et la rhétorique animaliste, où on observe que tous les animaux peuvent jeûner, et on rappelle que l’être humain en est un.
(Tristan Fournier)
Certains y voient une aubaine pour un marché très en vogue désormais, celui du développement personnel, mais aussi pour divers courants politiques qui se réapproprient cette figure et ce qu’elle représente, des écologistes de gauche à certains courants anarchistes. Car le modèle du chasseur-cueilleur semble désormais l'objet de nombreux fantasmes, imaginaires et possibilités. Ainsi, les expériences de jeûne et de retour à la nature peuvent être l'occasion d'un pas de côté pour ceux qui y participent et qui expérimentent d'autres manières d'être.
Eux se sont essayés à toutes ces pratiques, le travail d’enquête l’exigeant : Sébastien Dalgalarrondo est spécialisé dans la santé et la médecine;Tristan Fournier, dans la socio-anthropologie de l’alimentation et de la santé. Ces deux sociologues ont passé leurs vacances dans une grange en Ariège, au contact de la nature. De leur enquête, ils ont tiré l’ouvrage L'utopie sauvage (Les Arènes, septembre 2020), l'occasion d'analyser ce phénomène de retour à la nature, de**"ré-ensauvagement"**, qui semble être particulièrement prisé par les citadins.
Nous sommes exactement comme tout le monde, en train de créer notre propre utopie, de tâtonner... […] L’idée est de se mettre en scène comme tous ceux qui sont très préoccupés et qui cherchent au quotidien à se reconnecter à la nature.
(Sébastien Dalgalarrondo)
A leurs côtés, l'écrivain Pierre Ducrozet, déjà présent dans La Grande table culture, où il nous parlait notamment de son dernier roman, Le Grand Vertige (Actes Sud, 19 août 2020).
Extraits sonores :
- Le Jardin d'Emerveille, "l'émerveille de la permaculture" (2017-2018)
- "Man vs Wild" (RMC Découverte; saison 3, ép.1)
- "Le goût du jeûne" (Interception, France Inter, 24/12/2017)
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