Thomas Piketty : comment varie le vote aujourd’hui en démocratie ?

Des électeurs patientant dans un lieu de vote
Des électeurs patientant dans un lieu de vote ©Getty - Hill Street Studios
Des électeurs patientant dans un lieu de vote ©Getty - Hill Street Studios
Des électeurs patientant dans un lieu de vote ©Getty - Hill Street Studios
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L'économiste Thomas Piketty co-dirige "Clivages politiques et inégalités sociales" (seuil, 2021), une enquête collective qui met en avant de nouveaux clivages politiques : le genre, l'âge, la religion, le diplôme... qui bouleversent parfois le vote électoral. Il est notre invité aujourd'hui.

Avec

Nous le recevions notamment en 2019 à l'occasion de la parution de son ouvrage Capital et idéologie (Seuil, septembre 2019). Thomas Piketty est directeur d'études à l' Ecole des Hautes Etudes en Sciences Sociales (EHESS) et professeur à l' Ecole d'économie de Paris/Paris School of Economics et co-directeur, World Inequality Lab/World Inequality Database. Il est surtout connu pour son le bestseller Le Capital au XXIe siècle (Seuil, 2013).

Il revient aujourd'hui avec Clivages politiques et inégalités sociales. Une étude de 50 démocraties (1948-2020) (Seuil, 01/04/2021), un ouvrage qu'il dirige avec Amory Gethin et Clara Martinez-Toledano. Une enquête à laquelle ont participé une vingtaine de chercheurs et qui se base sur une source inédite, les résultats d’un programme de recherche collectif portant sur la structure des clivages politiques et des inégalités sociales dans 50 démocraties électorales sur les différents continents entre 1948 et 2020. Il s'agit ainsi d'examiner comment varie le lien entre comportements de vote et caractéristiques socio-économiques des électeurs dans le temps et  l’espace. Autrement dit, comment les choix électoraux varient en fonction des caractéristiques sociales. 

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On essaye vraiment de se détacher des mots "droite" et "gauche" autant que possible dans notre ouvrage et de regarder les partis, les coalitions, tels qu'ils s'incarnent également dans des programmes et dans des électorats. (...) C'est toujours une ressource du point de vue des acteurs géopolitiques, soit de se revendiquer de la "gauche" ou de la "droite", soit au contraire d'expliquer qu'on n'a rien à voir avec ça. (Thomas Piketty)

Prenant pour variables le revenu et le diplôme, le patrimoine et l’autopositionnement des électeurs sur l’échelle sociale, au lieu de la classique catégorie socioprofessionnelle, par exemple, l'enquête esquisse une  définition multidimensionnelle de la classe sociale, dans une perspective historique, transnationale et globale.

Dès qu'on met le regard en dehors de l'Occident, on voit un mouvement vers des structures plus "classistes" de l'électorat. C'est peut-être l'un des messages importants de ce livre. (Thomas Piketty)

Les auteurs de cette démarche en soulignent néanmoins les limites, invitant le lecteur à aller voir plus loin. En outre, les données rassemblées dans l'ouvrage sont mises à la disposition des personnes intéressées dans le cadre de la World Political Cleavages and Inequality Database ( www.wpid.world).

C'est vrai qu'on a la constitution de ce système qu'on appelle d'"élites multiples", avec des élites éduquées votant pour les partis de centre gauche, des élites plus économiques votant pour les partis de centre droit ; mais, à côté de ça, les personnes qui ne font partie d'aucune de ces deux élites et font partie des classes les moins favorisées sur toutes les dimensions se sentent sans doute un peu abandonnées par ce nouveau système et se tournent très souvent vers l'abstention. Elle peuvent se tourner aussi vers des partis protestataires... (...) Pour bien comprendre la montée du populisme, il faut d'abord analyser la montée de l'élitisme. (Thomas Piketty)

La Grande table culture
28 min

Extraits sonores : 

  • Pierre Moscovici - 29 mai 2011 sur LCI réagit au rapport de Terra Nova sur l’abandon des classes populaires (INA)
  • Portrait de Bahjint Shing ("Inde : la colère des agriculteurs", Arte, 2021, un reportage de David-Alexandre Damelon)

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