Valéry Giscard d’Estaing, une certaine idée de la modernité

Valéry Giscard d'Estaing nous a quittés ce 2 décembre 2020, à 94 ans, après un parcours politque et intellectuel qui a laissé des traces. 

Son destin est lié, semble-t-il, à un événement extraordinaire : la mort d’un président, Georges Pompidou, qui l’oblige à mener une campagne éclair. Dans une France d'après les Trente-Glorieuses et de Mai-68, élu en 1974, il est le premier non-gaulliste à s'emparer de l'Élysée. Se voulant l'incarnation du changement et de la modernité - à 48 ans, il est alors le plus jeune président élu -, il donne à sa campagne un slogan évocateur : «Le changement dans la continuité».

On ne peut pas récuser le mot modernité; simplement, il n'en est pas propriétaire. (…) J'aurais plutôt tendance à parler de changement : il a placé sa campagne éclair quelques semaines à peine entre la mort de Georges Pompidou et sa victoire sous le signe du changement et de ce qu'il appelait la « société libérale avancée ». (Jean-François Sirinelli)

C'est le premier président non-gaulliste.(Jean-François Sirinelli)

Son mandat l'aura concrétisé pour une grande part, au moins dans les réformes libérales qui marquent son début de septennat : majorité à 18 ans, libéralisation de la contraception, réforme du divorce, extension du droit de saisine du Conseil constitutionnel… Avec, en acmée, l'adoption malgré de fortes résistances du projet de loi sur l’interruption volontaire de grossesse (IVG) défendu par la ministre de la santé, Simone Veil. Le septennat est néanmoins terni par le premier «choc pétrolier» de la fin 1973 et par la crise qui s'ensuit.

Le Giscard que j'ai connu était celui du crépuscule. La modernité dont nous parlons, il la voyait en crise. (Marc Lambron)

Véritable as de la comunication et de l'art oratoire, il se montre en pull-over, se fait filmer dans le métro, après un match de football à Chamalières... Il est ainsi considéré comme le premier «people» de la vie politique française.

A la fin de sa vie, il se tourne davantage vers la littérature. Il est notamment élu à l’Académie française au fauteuil de Léopold Sédar Senghor le 11 décembre 2003.  Parmi ses ouvrages, ses Mémoires__, mais aussi des romans : La Princesse et le Président (XO éditions, 2009), - qui décrit une relation torride mais, de son propre aveu, fictive avec la princesse Diana - ou encore sa dernière publication, Loin du bruit du monde (XO éditions, 2020).

Avec nous pour en parler, Jean-François Sirinelli, historien, auteur d’une série de livres, Les années Giscard (Armand Colin), ainsi que de plusieurs essais sur la vie intellectuelle et culturelle de la France sous la Ve République. 

A distance également, Marc Lambron, académicien, écrivain, auteur de Carnet de bal (chronique 1, 2, 3, 4) chez Grasset. A ses côtés, le romancier Eric Reinhardt, auteur de Comédies françaises chez Gallimard.

Extraits sonores : 

• Valéry Giscard d'Estaing (France Inter, Causerie "au coin du feu" du Président de la République, 1975)
• Campagne 2ème tour de l'élection : débat entre François MITTERRAND et Valéry GISCARD D'ESTAING, 1974
• Meeting des Jeunes Giscardiens à la Porte de Pantin : Discours de Valéry GISCARD D'ESTAING (France Inter, première diffusion en 1981)
• Le septennat de Valéry Giscard d'Estaing (France Culture, Pot au feu, 2002)
• Valery Giscard d'Estaing à propos du problème de l'avortement (REUNION DE PRESSE DU PRESIDENT VALERY GISCARD D'ESTAING, RTF/ORTF)
• Valéry Giscard d'Estaing à propos de Maupassant (Apostrophe, 1979)