Antoine de Baecque, historien et critique, co-auteur d'une "Histoire du Festival d'Avignon" (Gallimard, 2016) retrace les liens qui unissent historiquement la ville au théâtre.
- Antoine de Baecque Professeur d'histoire du cinéma à l'École normale supérieure
À l’occasion des élections municipales, "La Grande Table" participe à la réflexion menée par France Culture durant toute la semaine du 10 février sur les liens privilégiés entre une discipline artistique et une ville, ainsi que sur son impact sur la vie économique et culturelle du territoire.
Il était une fois un homme et une ville qui se rencontrèrent, s'aimèrent, se marièrent, et eurent un enfant nommé Festival.
Jean VilarPublicité
C'est en ces mots que le grand Jean Vilar décrit la création, en septembre 1947, d'"Une Semaine d'art en Avignon", qui deviendra au fil des ans le Festival d'Avignon tel que nous le connaissons aujourd'hui. Cette création s'inscrit dans la grande vague des festivals d'après 1945 voulus par le gouvernement pour renouer une "fraternité par la culture" (Jean Zay).
Initié par des artistes, en premier lieu le comédien et metteur en scène Jean Vilar, le festival est tout de suite soutenu par la mairie en la personne du Dr. Pons. La volonté est claire : dans une Avignon particulièrement meurtrie par les bombardements de 1944, avec des quartiers centraux encore en friche, le Dr. Pons estime que cette manifestation culturelle peut aider à relancer l'urbanisme et le dynamisme économique de la ville. Une intuition qui s’avérera encore vraie bien des années plus tard :
Le festival d'Avignon joue un rôle dans la politique urbaine d'Avignon depuis les années 1980. Antoine de Baecque
Le soutien municipal permet donc à Jean Vilar de donner un lieu à son grand projet : celui du "théâtre populaire", avec sa double volonté de décentralisation et de démocratisation culturelles. Vilar veut fuir les salles parisiennes et leur élitisme étouffant pour parler à un public plus large, "réunir le petit boutiquier et le haut magistrat, l'ouvrier et l'agent de change", tel qu'il l'exprime en 1951 dans son Petit Manifeste de Suresnes.
Il y a une volonté de relancer la culture incarnée par Vilar qui a envie de quitter Paris (...) créer un théâtre qui respire, un théâtre qui s'émancipe des codes bourgeois des théâtres parisiens. Antoine de Baecque
Une volonté d'ouverture aux publics soutenue par les directeurs successifs du Festival, avec notamment l'ouverture en 2013 de la Fabrica dans le quartier populaire de Monclar et le développement intense d'activités pédagogiques ou de représentations en milieu carcéral. Olivier Py, directeur actuel du Festival, souligne également l'importance de choyer le public local : 20% du public du Festival serait aujourd'hui avignonnais, favorisé par les activités d'"animation culturelle" développées à l'année par le Festival.
Dès les années 1960, le Festival d'Avignon a également assumé un rôle majeur de laboratoire des politiques culturelles, au sein notamment de Rencontres puis, depuis 2014, d' Ateliers de la Pensée où artistes, penseurs, journalistes ou directeurs d'institutions culturelles viennent questionner le rapport de la culture à l'Etat et aux territoires.
La force d'Avignon, c"est de proposer des spectacles qu'on ne verra pas ailleurs, qui ne peuvent se passer que dans ces pierres et dans ces lieux. Antoine de Baecque
Extraits sonores :
- Valérie Dréville, comédienne, à propos d'Avignon
- Jean Vilar, fondateur du Festival, INA, 1967
- Olivier Py, Des Mots de minuit, juillet 2019
- Extrait de l'album "Seu Jorge & Rogê" sorti le 7 février 2020, Night Dreamer
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