

Raconter la traite négrière à la jeunesse, entre vérité historique et évasion par l’imaginaire, c'est l'enjeu du nouveau roman de Timothée de Fombelle : "Alma : Le vent se lève" (Gallimard Jeunesse, juin 2020). Il est notre invité pour en parler.
- Timothée de Fombelle écrivain
Timothée de Fombelle faisait paraître Alma, le vent se lève le 11 juin 2020 chez Gallimard jeunesse. Avec ce premier tome, il entame une trilogie centrée sur la traite négrière, vécue ici du point de vue de la courageuse Alma qui, partie à la recherche de son petit frère, quitte à la fois sa famille et l’Afrique. Son destin se mêle à celui de Joseph Mars qui, en quête, lui, d’un trésor, entame son voyage en se glissant clandestinement à bord d'un navire de traite à Lisbonne.
Timothée de Fombelle est l’une des figures majeures de la littérature jeunesse en France. On lui doit notamment, avec Christian Cailloux, l'album Gramercy Park (EuroComics/IDW), nommé aux prix Will Eisner dans la catégorie prix meilleure édition américaine d’un album international. Son personnage phare, Tobie Lolness, 13 ans et vivant dans les arbres avec son peuple d’êtres minuscules, était le personnage principal de ses deux premiers romans : La Vie suspendue (2006) et Les Yeux d’Elisha (2007) publiés chez Gallimard jeunesse. Ils lui ont valu de nombreux prix et traductions. Ont notamment suivi la saga Vango (2010-2011) et Le Livre de Perle (2014), des romans d’aventure à l’attention des jeunes adolescents.
La lecture, c’est du temps incompressible, c‘est le dernier temps. On ne peut pas faire "avance rapide"… C’est une responsabilité immense : ce temps de cerveau disponible, on doit le mériter.
(Timothée de Fombelle)
La naïveté, c’est une sorte de clarté, un regard sur le monde qui n’est pas filtré par toutes les grilles qu’on se construit. (… ) Tout le travail, c’est de garder l’œil clair - dans la vie en général, et pas seulement pour les auteurs.
(Timothée de Fombelle)
Egalement dramaturge, il compare la littérature jeunesse et l'écriture théâtrale, lui qui dit avoir trouvé un laboratoire d'écriture dans le théâtre. Mais c'est finalement dans le roman jeunesse qu'il s'épanouit, dans ce qu'il nomme son "écosystème de liberté". En outre, pour lui, les livres sont un moyen d’évasion et un retour en enfance, comme des cabanes qui vous emmènent loin du monde.
Quand j’ai découvert le roman, j’ai cru découvrir la liberté absolue. Tout un coup, je faisais tous les métiers que je devais déléguer en ne prenant pas moi-même le premier rôle, en ne faisant pas les lumières….
(Timothée de Fombelle)
En racontant la traite négrière, l'auteur se concentre sur une thématique délicate et sujette aux accusations d’appropriation culturelle - son livre ne sera d'ailleurs pas édité aux Etats-Unis ni en Angleterre. Une censure par principe qu'il relativise, au vu de la gravité, bien plus importante, du sujet qu'il traite.
Ce n’est pas un drame : je ne suis pas victime de quoi que ce soit, je charrie dans mon roman quinze millions de victimes et, si un auteur, pendant quelques années, ne peut pas publier dans le monde anglo-saxon parce qu’il est blanc et qu’il parle de l’esclavage, ça ne serait pas une catastrophe au vu de ce qu’ont vécu des populations noires pendant des centaines d’années.
(Timothée de Fombelle)
Bâtie sur l'histoire de l'Afrique au XVIIIème siècle, la quête d’Alma lui a été inspirée à 13 ans. Sa famille vivait alors en Afrique, et le jeune garçon a été marqué à vie par la vision de ces forts où étaient parqués les esclaves dans l’attente d’être vendus à des navires négriers. De ce souvenir, un futur triptyque, entre conte, quête initiatique, roman d’aventure et roman historique.
Ça ne sert absolument à rien de raconter cette histoire à des enfants qui ne la liront pas. Ce que je veux, c’est pouvoir la raconter, et qu’ils restent jusqu’à la dernière page. Autant je suis sans concession dans mon écriture, autant, quand même, je me retourne un peu, de temps en temps, par-dessus mon épaule, et je regarde si l’enfant est toujours là; l’enfant que je suis et le lecteur de douze ans que j’étais.
(Timothée de Fombelle)
Extraits sonores :
- Marie-Aude Murail sur le rapport aux enfants des écrivains jeunesse (France Culture, Les masterclasses, lundi 05/08/2019)
- Vincent Villeminot (France Culture, La Grande Table, 27 novembre 2019)
- Clara Luciani, "Chanson pour ma vieille'", De Béart à Béart(s) (2020)
- Zadie Smith (France Culture, La Grande table, 29/10/2018)
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