Comment a-t-on pris conscience du danger potentiel que la chute de corps célestes pouvait constituer pour la Terre ? Comment évalue-t-on le risque d’impact de ces corps sur Terre ? Comment la communauté astrophysicienne contribue-t-elle à anticiper une telle éventualité ?
- Patrick Michel Astrophysicien, Ingénieur en aéronautique, Directeur de Recherches au CNRS, Responsable de l’équipe TOP (Théories & Observations en Planétologie) de l'UMR 7293 Lagrange/CNRS à l'Observatoire de la Côte d'Azur
- Antonella Barucci Planétologue, astrophysicienne au laboratoire d'études spatiales et d'instrumentation en astrophysique (LESIA) de l’Observatoire de Paris
Parfois, le hasard fait bien les choses. Figurez-vous que pas plus tard que ce matin, quelques titres de presse se sont engouffrés dans l’un de leurs marronniers spatiaux favoris : « Un astéroïde géant va frôler la terre et risque de détruire l’humanité entière ». Il s’avère que cet objet – certes de belle taille – passera fin avril à plus de 16 fois la distance Terre Lune, on appréciera la notion de frôler. Il n’en reste pas moins que la collision avec un géocroiseur, quoi que très improbable, est un risque que les agences spatiales considèrent sérieusement, à tel point qu’une double mission NASA/ESA va tenter, dans les prochains mois, de dévier un petit astéroïde de sa course pour s’y préparer.
Astéroïdes : itinéraire bis : c’est le programme dévié qui est le nôtre pour l’heure qui vient. Bienvenue dans La Méthode scientifique.
Et pour évaluer à leur juste valeur les risques de collision d’un géocroiseur avec notre planète, et comprendre comment les agences spatiales se préparent à l’éventualité d’une rencontre un peu trop frontale, nous avons le plaisir de recevoir aujourd’hui Antonella Barrucci, planétologue, astrophysicienne au laboratoire d’études spatiales et d’instrumentation en astrophysique de l’Observatoire de Paris et Patrick Michel, directeur de recherche CNRS, et responsable scientifique de la mission européenne Héra.
Le reportage du jour
Rencontre avec Sylvain Bouley, planétologue et maître de conférence au laboratoire de Géosciences de l’Université Paris Sud, mais également coordinateur du site de sciences participatives Vigie Cratère. Comment peut-on trouver la trace d’un impact d’astéroïde sur Terre ? La chose n’est pas si évidente que cela compte tenu de l’érosion et de la tectonique des plaques. On a cru jusqu’au milieu du XXe siècle que tous les cratères sur Terre étaient liés au volcanisme, mais les choses ont bien changé et on sait depuis la découverte du cratère de Chicxulub qu’un astéroïde peut avoir des conséquences désastreuses sur un écosystème, voire sur notre planète entière. Par Antoine Beauchamp :
LA_METHODE_SCIENTIFIQUE - Sylvain Bouley
7 min
Les repères
- Par le jeu des perturbations gravitationnelles, de gigantesques corps extraterrestres errants modifient parfois leur trajectoire et s'approchent de notre planète. Quand leur orbite croise la nôtre, on les appelle des géocroiseurs, ou Near-Earth Objects (NEO).
- Les possibilités qu'un tel objet s'écrase contre la Terre sont très faibles. Reste que s'il n'est pas possible de prédire la chute d’un astéroïde ou d'une comète sur la Terre, on estime qu'environ 1.000 objets sont potentiellement dangereux (Potentially Hazardous Objects). Leur diamètre dépasse les 140 m de diamètre, c'est à dire le seuil à partir duquel un corps céleste affectera des zones habitées quelle que soit la région du globe où il s’écrase.
- L'objectif du projet Dart-Hera est de démontrer, pour la première fois en conditions réelles, la possibilité de dévier un astéroïde en projetant sur lui un impacteur cinétique. C'est l'une des trois solutions possibles pour modifier la trajectoire d'un astre, avec le tractage et le recours à une ogive atomique. C'est aussi la technique dont l'étude est la plus avancée et celle qui semble la plus facilement réalisable.
- En parallèle de ce projet, la sonde Osiris-Rex est missionnée d’une part pour rapporter des échantillons de matière de l’astéroïde Bennu, connu pour être le deuxième corps céleste le plus à risque pour la Terre (il est susceptible d'entrer en collision avec la Terre vers la fin du XXIIe siècle, entre 2175 et 2196) après Apophis ; et d’autre part pour mesurer l’effet Yarkovsky de l’astéroïde, un effet thermique qui agit sur la trajectoire des astéroïdes. Il s’agit là de pouvoir affiner le modèle de la trajectoire de Bennu, afin de déterminer plus précisément son caractère potentiellement dangereux pour notre planète.
Pour aller plus loin
Retrouvez aussi toutes les sources de cette émission sur le fil Twitter de cette émission.
- [Infographie] 3 techniques pour dévier un astéroïde
- Images spectaculaires de l'explosion d'une météorite en plein jour (Futurasciences, mars 2020)
- Le cratère de Chicxulub, témoin de l’extinction des dinosaures http://bit.ly/32tK3I7 via @futurasciences
- Dart-Hera : comment les USA et l’Europe s’apprêtent à dévier pour la première fois un astéroïde (Sciences & Avenir, février 2020)
- Comment dévier un astéroïde tueur ? (CNRS Le Journal, janvier 2020)
- Quel plan de survie pour l'humanité si un astéroïde fonçait sur la Terre ? (Slate, janvier 2020)
- Patrick Michel : “L’étude des astéroïdes donne la recette de la formation des planètes" (Le Monde, novembre 2019)
- Un satellite va percuter un astéroïde pour le faire dévier de sa trajectoire (Sciences & Avenir, 2018)
Les références musicales
Le titre du jour : Asteroids par Orval Carlos Sibelius
Le générique de début : Music to watch space girls by par Leonard Nimoy
Le générique de fin : Says par Nils Frahm
L'équipe
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