Comment la France est-elle passée de la Marche des Beurs à la Marche contre l’islamophobie ?

Une marche nationale pour l'égalité des droits et contre le racisme se déroule le 15 octobre 1983 à Marseille en présence de Françoise Gaspard (député PS). La marche doit se terminer à Paris le 03 décembre après avoir traversé 50 villes.
Une marche nationale pour l'égalité des droits et contre le racisme se déroule le 15 octobre 1983 à Marseille en présence de Françoise Gaspard (député PS). La marche doit se terminer à Paris le 03 décembre après avoir traversé 50 villes. ©AFP - P. CIOT
Une marche nationale pour l'égalité des droits et contre le racisme se déroule le 15 octobre 1983 à Marseille en présence de Françoise Gaspard (député PS). La marche doit se terminer à Paris le 03 décembre après avoir traversé 50 villes. ©AFP - P. CIOT
Une marche nationale pour l'égalité des droits et contre le racisme se déroule le 15 octobre 1983 à Marseille en présence de Françoise Gaspard (député PS). La marche doit se terminer à Paris le 03 décembre après avoir traversé 50 villes. ©AFP - P. CIOT
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En 1983, la France vivait la Marche des Beurs, une marche pour lutter contre le racisme. En 2019, Paris voit défiler la marche contre l'islamophobie. Que s'est-il passé entre les deux ?

Avec
  • Christian Delorme Prêtre français du diocèse de Lyon, co-initiateur de la Marche pour l’égalité des droits et contre le racisme de 1983, notamment co-auteur avec Rachid Benzine de « La République, l'Eglise et l'islam : une révolution française » ed. Bayard.

En 1983, filles et fils d’immigrés ont été des milliers à défiler pour la Marche pour l'égalité et contre le racisme, appelée Marche des Beurs. L’événement fut majeur, il faisait consensus et rendait visible une génération, issue de l’immigration, qui voulait être reconnue.

13 000 personnes à Paris défilaient dimanche 10 novembre 2019 contre l'islamophobie. Une marche contre l’islamophobie cette fois, une marche pour dire stop à la stigmatisation des Musulmans, qui, elle, divise. Comment la France est-elle passée de la marche des Beurs à celle contre l’islamophobie ?
 

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Hervé Gardette reçoit Christian Delorme, prêtre, co-initiateur de la Marche pour l’égalité des droits et contre le racisme de 1983, notamment co-auteur avec Rachid Benzine de « La République, l'Eglise et l'islam : une révolution française » ed. Bayard.

La marche de 1983 : 

Au début des Années 80, il y a en France encore beaucoup d'actes de violences racistes à l'égard des Maghrébins, des Arabes, sans doute des restes du conflit colonial qui s’est passé quelques années plus tôt. Et devant ces violences, il y a un grand cri des jeunes des banlieues qui émerge… Ce cri c'est de dire « on est des citoyens français,  on demande l’égalité ».  Christian Delorme.

C’est une marche qui fait référence aux idéaux républicains, il n’y a absolument pas la question religieuse qui est présente dans ce mouvement. » Christian Delorme 

Le soutien a été massif et divers et à l’époque, c’est vraiment une marche citoyenne. On est dans une période où cette jeunesse des banlieues issue de l’ancien empire colonial croit que la République peut lui faire toute sa place. Et puis, on va aller de déception en déception, jusqu’à cette marche contre l’islamophobie. Christian Delorme.

La question religieuse :  

La France et le monde de 2019 ne sont pas la France et le monde de 1983. Christian Delorme.

En 1983, la question religieuse c’est la question du subventionnement des écoles confessionnelles, des écoles privées. Des centaines de milliers de personnes marchent à cette époque-là contre ou pour le soutien aux écoles confessionnelles. Christian Delorme.

1983 - 2019, deux époques très différentes : 

La question sociale est aussi complètement différente : 1,5 millions de chômeurs à l’époque. Christian Delorme.

Il n’y a pas encore eu ce grand réveil islamique avec cette montée en puissance des courants fondamentalistes dans le monde. Christian Delorme.

A la fois la société française crée de l’islamo-anxiété on pourrait dire, de l’islamophobie car il y a de plus en plus de peurs liées à l’actualité internationale. Et de l’autre côté, vous avez un islam qui est de plus en plus marqué par les courants salafistes et les Frères musulmans  et puis vous en avez certains qui accentuent cette peur… C’est pour ça que ce concept d’islamophobie est difficile à prendre en compte. Il y a des peurs légitimes, des violences à l’égard des musulmans mais certains courants communautaristes ont intérêt à faire monter cette peur des musulmans et des Français. 

Vous pouvez écouter l'interview en intégralité en cliquant sur le player en haut à gauche de cette page.

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