Fin de l’ENA, débuts de l’INSP : quels changements attendus pour la haute fonction publique ?

Maryvonne Le Brignonen, directrice de l’INSP, qui remplace l’ENA. Photo prise le 28 janvier 2022.
Maryvonne Le Brignonen, directrice de l’INSP, qui remplace l’ENA. Photo prise le 28 janvier 2022. ©AFP - FREDERICK FLORIN
Maryvonne Le Brignonen, directrice de l’INSP, qui remplace l’ENA. Photo prise le 28 janvier 2022. ©AFP - FREDERICK FLORIN
Maryvonne Le Brignonen, directrice de l’INSP, qui remplace l’ENA. Photo prise le 28 janvier 2022. ©AFP - FREDERICK FLORIN
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Vendredi 28 janvier 2022, Jean Castex, le premier ministre, a inauguré à Strasbourg l’INSP, l’Institut National du Service Public, qui remplace l'ENA. Un changement de nom qui doit aussi s'accompagner d'un changement de fond, pour diversifier la haute fonction publique.

Avec
  • Natacha Gally Politiste, rattachée au Centre d’études et de recherches de sciences administratives et politiques (CERSA), maître de conférences en science politique à l'Université Panthéon-Assas

L’INSP, l’Institut National du Service Public, c’est le nouveau nom de l’ENA, l’ancienne Ecole Nationale d’Administration. Un institut inauguré par Jean Castex vendredi 28 janvier 2022 à Strasbourg. Un changement de nom qui doit s’accompagner d’un changement de fond. Objectif : diversifier la haute fonction publique. Formation, accès, classement de sortie… créée en 1945, beaucoup de choses ont été reprochées à l’ENA, accusée de former une élite de hauts fonctionnaires « hors sol ». Que pourrait changer l’INSP ?

Guillaume Erner reçoit Natacha Gally, maîtresse de conférences en sciences politiques à l’Université Paris Panthéon Assas, chercheuse au CERSA, spécialiste des réformes de la haute fonction publique.

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Vous pouvez écouter l'interview en intégralité en cliquant sur le player en haut à gauche de cette page.

Le contexte de ce changement. 

Pourquoi Emanuel Macron a-t-il choisi de réformer cette grande école ? 

Le contexte de cette réforme est la crise des gilets jaunes et une critique à l’égard d’élites administratives perçues comme trop déconnectées et fermées par rapport à la population, bien que l’histoire de l’ENA soit ponctuée de tentatives de réformes successives depuis sa création. 

La réforme des concours 

Qu’est-ce qui devrait changer avec l’INSP ? 

Les pistes évoquées par le rapport Bassères en novembre suggéraient la suppression de l’épreuve de question contemporaine qu’on appelle aussi l’épreuve de culture générale considérée comme discriminatoire. Il semblerait que le gouvernement ait décidé de la conserver en y ajoutant un programme et un référentiel d’oeuvres. Il est aussi question de supprimer l’épreuve d’anglais pour la remplacer par une certification. 

Une deuxième évolution est de faire monter en puissance le dispositif Talents mis en place à titre expérimental ces dernières années et qui consiste à ouvrir des classes préparatoires aux boursiers sur critères sociaux et à leur permettre de passer un concours dédié. 

L’enjeu de lutte contre la reproduction sociale 

L’idée d’avoir un deuxième voire une troisième voie d’accès ne suffisait pas à diversifier le recrutement ? 

Si on voulait vraiment aller contre les biais sociologiques et la reproduction sociale, il faudrait sans doute envisager de renforcer considérablement la promotion interne, sans forcément qu’elle passe par un concours et par l’ENA, mais en puisant au sein de l’administration active les futures recrues d’une fonction publique issue de ses rangs. 

Le degré de spécialisation de la formation est en question  

Si on considère que les hauts fonctionnaires sont coupés du pays, peut-être est-ce parce qu’ils n’apprennent pas les bonnes choses ? 

Aujourd’hui la question qui se pose avec la suppression de l’accès direct aux grands corps de l’ENA et donc avec le fait que l’ensemble des futurs élèves de l’INSP vont sortir dans le corps unique des administrateurs de l’État, c’est le type de formation qui va leur être dispensée au sein de l’INSP. 

La question est celle du degré de spécialisation de leur formation. Si l’on veut recruter au sein des administrations de l’État les élèves de l’INSP selon des procédures non pas de type classement de sortie mais par le biais d’un entretien d’embauche par exemple et bien il faut certainement que ces entretiens s’appuient sur des manières de distinguer les élèves qui soient plus en lien avec le fond,  avec ce qu’ils auront appris et la spécialisation qu’ils auront choisie au sein de l’INSP. 

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