Les accords du Brexit n’ont pas mis n’ont pas mis de point final à la discorde. Des dizaines de pêcheurs n’ont pas obtenu de licence pour s’approvisionner dans des eaux britanniques riches en poisson.
- Pascal Le Floc’h Maître de conférences à l'Université de Brest, chercheur au laboratoire AMURE
La France reproche au Royaume-Uni des exigences hors d’atteinte, tandis que ces derniers craignent une surpêche. Entre symbole de souveraineté et problème de stocks, licences de pêche... quels désaccords entre la France et le Royaume-Uni ?
Guillaume Erner reçoit Pascale Le Floc’h,Maître de conférences à l'Université de Brest, chercheur au laboratoire AMURE. Auteur de Les Pêches maritimes françaises : 1983-2013 (Presses universitaires de Rennes, 2017)
Présentation du conflit
Il faut tout d'abord nous restituer les différends entre la France et le Royaume-Uni concernant la pêche : que se passe-t-il entre les deux pays à ce sujet ?
Rappelons d'abord que la pêche, depuis 1983, relève de la compétence exclusive de l'Union européenne. Il n'appartient donc pas en premier lieu à la France de négocier avec les Britanniques. Ce n'est que par dérogation que l'Union permet à la France de le faire, dans une négociation qui porte principalement sur les pêcheries autour des îles anglo-normandes.
Est-ce qu'il est possible d'y voir plus clair en se disant qu'il y a une partie qui serait plus fondée que l'autre ?
Le deuxième point à évoquer, c'est que la pêche relève de la cueillette et que le contrôle des pêches est permanent. Pour ce faire, a été mis en place dans les années 2000 un suivi satellitaire des bateaux de pêche européens pour les navires de plus de 12 mètres. Donc pour les navires de moins de 12 mètres, le Royaume-Uni ne reconnaît pas la même validité pour les licences de pêche.
Symboles et souveraineté
Cela veut dire que ces bateaux, français, sont lésés à cause de l'absence d'accord qui fait suite au Brexit ?
Le 2 juin, il y a eu un accord de principe entre le Royaume-Uni et l'Union européenne pour poursuivre l'activité de pêche au moins jusqu'au 31 décembre. Mais pour les bateaux de moins de 12 mètres, on est dans un cas épineux : la bande côtière des îles britanniques se trouve dans l'Union européenne, au Sud de la Manche.
300 bateaux français de moins de 12 mètres sont concernés. Est-ce qu'ils pêchent ? Quelles sont leurs activités principales ?
On a en effet 304 bateaux non-équipés d'un suivi satellitaire et la grande majorité de ces bateaux se trouve en Normandie, en Bretagne nord et exploite le bulot, les homards, les crustacés... Ce sont des pêcheries qui trouve un marché très porteur toute l'année, notamment pendant les fêtes.
Mais est-ce un symbole, un enjeu de souveraineté, ou bien un enjeu économique lourd ?
Le poids économique de la pêche dans le PIB est marginal. En revanche, la pêche revêt un caractère identitaire et symbolique fort à l'échelle des territoires. Cela met en avant la souveraineté de chaque Etat-membre pour contrôler sa zone exclusive.
La suite des événements
Que peut faire l'Union européenne face à tout cela ?
C'est un problème qui concerne principalement les Français et les Britanniques. Mais même si c'est un différend à proximité des côtes françaises, la pêche française relève de la compétence européenne, donc c'est à elle de valider un accord de principe entre les deux parties.
Quel pronostic peut-on faire ?
Il faut que la raison l'emporte. C'est peut-être aussi une opportunité pour couvrir toute la flotte de pêche, et de réfléchir à la réadaptation des accords de Granville, signés en 2000, qui ont permis jusqu'en 2020 au moins d'avoir une forme de pacification autour des îles anglo-normande.
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