

L’Ukraine sera au cœur des discussions qui doivent avoir lieu mardi 7 décembre 2021 entre Joe Biden et Vladimir Poutine, lors d’une rencontre virtuelle. Que sait-on des manœuvres militaires sur le terrain, à la frontière entre la Russie et l’Ukraine ? Que vise Moscou ?
- Florent Parmentier Secrétaire général du CEVIPOF/ Sciences Po, chercheur associé au Centre de géopolitique de HEC.
L’Ukraine sera au cœur des discussions qui doivent avoir lieu mardi 7 décembre 2021 entre Joe Biden et Vladimir Poutine, lors d’une rencontre virtuelle. D’après un haut responsable américain cité par le quotidien américain le « Washington Post », le 3 décembre 2021, la Russie déploierait 175 000 soldats à sa frontière avec l’Ukraine. Lundi 6 décembre 2021, à la veille de cette rencontre, le Kremlin décrivait l'état de ses relations avec les États-Unis comme « lamentables ». Que vise Vladimir Poutine avec l’Ukraine ? Que peuvent les Etats-Unis dans ce contexte ?
Guillaume Erner reçoit Florent Parmentier, politologue, secrétaire général du CEVIPOF/Sciences Po, chercheur associé au Centre de géopolitique de HEC. Auteur notamment de « Les chemins de l’Etat de droit, la voie étroite des pays entre Europe et Russie », ed. Presses de Sciences Po.
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Un déploiement manifeste : l'envoi d'un message
Concrètement, que sait-on des manœuvres militaires qui ont lieu sur le terrain à la frontière entre la Russie et l'Ukraine ?
Ce que l'on sait d'abord, et c'est frappant, c'est qu'elles sont visibles. En 2014, l'idée avait plutôt été de masquer un certain nombre de troupes. Cette fois-ci, on a un déploiement manifeste. Cela veut dire qu'on envoie un message. La première question, c'est de se demander si l'on est dans une mobilisation qui est annonciatrice d'un nouveau conflit, comme le disent une partie des autorités états-uniennes, ou si l'on est dans des manœuvres qui sont là pour intimider et peser dans des négociations.
Un probable prélude à des négociations
Alors d'après vous, qu'en est-il ?
Selon moi, on peut avancer qu'il s'agit plutôt d'un prélude à des négociations. L'idée, c'est que la Russie dit en substance qu'il y a deux lignes rouges sur lesquelles elle ne transigera pas. C'est d'abord la question de l'architecture de sécurité en Europe, autrement dit, de savoir où s'arrête et où commence l'OTAN. Le second élément, c'est l'appartenance de l'Ukraine à l'OTAN. Là, on a une ligne rouge claire. Du côté russe, il semble qu'on se dit : "nous allons vous intimider jusqu'à ce que nous puissions discuter de ces éléments-là".
Un moment stratégique
Du côté américain, tout est fait pour que l'on croit qu'il s'agit d'une tentative d'offensive, que la guerre est imminente. Dans ces conditions, quelle serait la logique poursuivie par Moscou ?
Je pense que chacun est dans son rôle. La semaine dernière, on a vu M. Blinken, secrétaire d'Etat américain, mettre en garde son homologue russe ; c'est dans l'ordre des choses. De la même manière, les Etats-Unis, pour garantir leur crédibilité, doivent réassurer leurs partenaires après le départ en Afghanistan, dans la perspective de la relation avec la Chine. Dans ce cadre, le message peut être entendu côté russe, mais Poutine sent que c'est peut-être le moment d'arracher des concessions sur le dossier ukrainien à un moment où les Etats-Unis sont moins préoccupés par le sujet qu'en 2014.
Ukraine et Russie : une histoire au long cours
Pourquoi l'Ukraine est-elle si importante pour la Russie ?
Une personne sur cinq, en Ukraine, a de la famille en Russie. Les deux pays ont 300 ans d'histoire commune, avec des pages terribles comme l'extermination par la famine dans les années 1930. Au-delà de ça, depuis 1954, une large partie du territoire ukrainien s'est rapprochée de la Russie. Il y a une querelle entre des Russes qui considèrent venir de Kiev et que la ville appartient à la Russie, et des Ukrainiens pour qui c'est le contraire.
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