L'identité numérique

L'identité numérique
L'identité numérique ©Getty -  Saul Gravy
L'identité numérique ©Getty - Saul Gravy
L'identité numérique ©Getty - Saul Gravy
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Par Julien Van Landuyst, doctorant en quatrième année de thèse, sous la direction du Professeur Pascal Kamina à l’Université de Franche-Comté - CRJFC (centre de recherches juridiques de l'Université de Franche-Comté)

Du smartphone aux smart-cities, des voitures connectées aux drones livreurs : plus rien ne semble en mesure d’enrayer la « mise en donnée du monde ». En parallèle, les nouvelles pratiques d’exposition de soi sur les réseaux et l’interconnexion presque permanente des individus semblent bien sonner la « fin de la vie privée » appelée de ses vœux par la Sillicon Valley. 

Qui pour prendre la relève ? Les données à caractère personnel paraissent toutes désignées à l’heure où l’Europe apprend à vivre au rythme du Règlement général à la protection des données. Ce serait toutefois oublier un peu vite que cet instrument vise un double objectif assumé : protéger les personnes, certes, mais aussi favoriser la circulation des données et le développement de l’économie numériques ; la personne se voit réduite à un kaléidoscope de données éparses, d’une effroyable complexité, que les droits consacrés (accès, rectification, opposition, à la portabilité, etc.) peinent à faire oublier. 

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Aborder ces questions par le truchement de la notion d’identité numérique apporte de nouvelles perspectives. D’une part, elle permet d’envisager les nouvelles pratiques des personnes sur les réseaux, qui chercheront de plus en plus à protéger des composantes purement virtuelles de leur présence en ligne, tels les avatars de jeu vidéo ou les pseudonymes. D’autre part, et surtout, elle réaffirme l’irréductibilité de la personne à un agrégat de données, et nous aide à envisager les nouveaux enjeux de l’environnement numérique : comment, par exemple, préserver l’autonomie des personnes dans leurs choix et dans la construction de leur identité face au big data et au profilage algorithmique comportemental ? Le risque, pour ainsi dire, n’est pas tant de voir les personnes identifiées qu’« abêtifiées », dans un espace numérique qui invite plus à l’uniformisation des comportements qu’à l’expression par chacun de sa personnalité. 

Pour y parvenir, nous pouvons envisager de nous appuyer sur la notion de vie privée, un peu trop vite enterrée. Redessinée par la Cour européenne des Droits de l’Homme, elle est aujourd’hui le support de l’épanouissement personnel, de l’autonomie et de la protection de l’identité des individus. De quoi, peut-être, nous réconcilier avec ces doubles numériques qui paraissent nous échapper.