Alors que le président des Etats-Unis, Joe Biden, a célébré ses 100 premiers jours au pouvoir avec des annonces de relance massive de l’économie, une question se pose : Joe Biden est-il de gauche ?
Trickle down economy has never work : " La théorie du ruissellement, ça n’a jamais marché".
C’est après une courte pause solennelle que Joe Biden a lâché cette phrase qui s’est éteinte sous les applaudissements d’une partie du Congrès ce mercredi, alors qu’il annonçait un plan pour les « familles » dotés de 1800 milliards de dollars qui s’ajoutent aux plans précédents pour le travail et forment un total 6000 milliards de dollars, tournés vers la consommation des classes moyennes. Bottom and middle out en langue originale, du bas, vers le haut.
Petit tour des idées outre-Atlantique.
Dans le New York Times, Lisa Lerer et Annie Karni l’affirment : Joe Biden est « à la manœuvre de la plus grande expansion de l’État Américain depuis des décennies ». Selon elles, le président transforme « ce qu’être démocrate veut dire », « assumant les positions d’un parti qui penche vers la gauche en réaction notamment à la présidence de Donald Trump »
Pour le Washington Post, « Sleepy Joe, ("Joe l’endormi") comme l’appelait Donald Trump), n’a plus l’air si endormi que ça. Mieux, pour David Ignatius, la création de deux années de maternelle et d’université gratuites participent à un renouvellement complet du contrat social américain. « Biden n’avait pas l’air d’être un réformiste alors qu’il titubait pendant les primaires démocrates. Mais il a titubé jusqu’à la Maison Blanche, et maintenant il avance avec un programme qui pourrait redéfinir la politique américaine ».
Alors à quel point Joseph Biden est-il radical ?
C’est la question que se pose Edward Luce dans le Financial Time, qui souligne la surprise de tous devant l’augmentation promise de la dépense publique américaine qui frise désormais avec les 15 % du PIB. « Nombreux sont ceux, souligne le journaliste, qui compare déjà Joe Biden à Franklin D Roosevelt, le président du New Deal et de la création de l’État providence américain. » Mais pour Edward Luce, le 46e président des États-Unis est « bien moins radical qu’il n’y paraît ». D’abord, rappelle-t-il, « le robinet a commencé à couler sous la présidence de Donald Trump et son premier plan de 900 milliard de dollar ». Ensuite, si « Biden parvient à persuader le Congrès d'adopter son plan pour les familles américaines(...) ce serait un grand changement poursuit-il, à la hauteur de l’Obamacare de 2010. Mais il serait exagéré de comparer [ces] projets de loi aux changements radicaux apportés par le New Deal de Franklin Roosevelt, qui a créé la sécurité sociale ». L’éditorialiste ajoute : « Les objectifs de M. Biden en matière de réchauffement climatique pourraient, eux, constituer un véritable changement de paradigme. En l'espace de quelques semaines, les États-Unis sont passés du statut de négationniste à celui de principal partisan d'une plus grande ambition au niveau mondial. Difficile malgré tout, conclue-t-il, de dépeindre Biden comme le diable socialiste."
Difficile malgré tout de dépeindre Joe Biden comme le diable socialiste
Retour en France, où l’économiste Pavlina Tcherneva répond aux questions du journal Libération...
La conseillère économique de Bernie Sanders et membre du Levy Economics Insititutes répond aux questions de Nicolas Celnik. « Ce qui est nouveau, analyse-t-elle, c’est que le déficit et l’austérité sont de moins en moins perçus comme des contraintes insurmontables. Le courant hétérodoxe de la « théorie monétaire moderne » universalise l’idée que la priorité doit être le chômage, l’assistance sociale ou le système de santé ». Selon Pavlina Tcherneva, si l’UE ne change pas de paradigme et parle encore de cure d’austérité, c’est du fait de « blocages institutionnels », « d’une architecture monétaire et de traités empêchant les changements radicaux de politique. » Reste, pour l’économiste, que l’Union européenne fait pale figure face aux déclarations du Président américain.
Du côté du journal l’Opinion qui fait sa Une à ce sujet dans l’édition du weekend, nous serions en pleine Biden Mania, « Joe Biden est devenu l’idole de la classe politique française » écrit Rémi Godeau dans un éditorial moqueur. De quoi entendre « même les Etas-Unis le font » dans les débats de la campagne présidentielle à venir. ». « Ce serait oublier poursuit-il que l’obsession américaine pour l’emploi est la contrepartie d’un système social minimal ». Même ton dans le Figaro, où Bertille Bayart nous avertit : «Joe Biden est le président de l’Amérique. Cela signifie que s’il réussit, il creusera l’écart avec l’Europe. S’il échoue (...) comme le redoutent certains économistes, nous en partagerons le coût, comme toujours quand une crise survient aux Etats-Unis ».
Par Mattéo Caranta
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