Les manifestations en Algérie// Débattre à l'heure des réseaux sociaux // Le fantasme de la start-up nation

Manifestation du 8 mars 2019 à Alger.
Manifestation du 8 mars 2019 à Alger. ©Getty
Manifestation du 8 mars 2019 à Alger. ©Getty
Manifestation du 8 mars 2019 à Alger. ©Getty
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Les protestations contre la candidature de Bouteflika pour son cinquième mandat; le poids des réseaux sociaux dans les nouvelles formes de débat; les illusions du modèle économique de la start-up nation.

Les manifestations en Algérie dans les journaux français

Cinq millions d’Algériens manifestaient hier contre un cinquième mandat du président Abdelaziz Bouteflika. L’événement est dans les pages du Monde, de Libération et du Figaro ce matin avec pour chacun, le champ lexical du naufrage. 

«  C’est comme si chaque jour, le bateau prenait un peu plus l’eau » nous dit Le Figaro. La foule s’intensifie dans les rues d’Alger. Le doute plane toujours sur l’état de santé du président : «  Est-ce qu’il est vivant ? Est-ce qu’il est mort ? » est la question qui ressort le plus des cortèges. 

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Libération aussi a suivi ce « tsunami humain ». Sous les auspices du 8 mars, les Algériennes étaient plus nombreuses hier. On pouvait lire sur les banderoles : «  On ne peut libérer un pays si on ne libère pas sa femme ». 

Les pages du Monde, elles, sont plus politiques. Elles s’attardent sur les traces d’un pouvoir qui se fissure. « Les soutiens du chef de l’Etat, très présents au cours des derniers mois, quittent le navire avec fracas. » Des défections même pour les anciens combattants, soutiens inconditionnels du président.

Mercredi, le mouvement Mouwatana  (« citoyenneté »), a appelé à engager « des élections dignes de ce nom » pour préparer une nouvelle République.

"Peut-on encore débattre ?"

Emmanuel Macron va prolonger le grand débat jusqu’au mois d’avril. Dans son dossier, Courrier international pose une question : "Peut-on encore débattre ?" Entre les dénonciations du politiquement correct aux Etats-Unis, entre l’impossible dialogue sur le Brexit, il n’y a pas qu’en France que la question se pose. 

Pour The New Statesman, une nouvelle école de débat à vu le jour. Elle nous vient de deux figures médiatiques américaines : Jordan Peterson et Ben Shapiro, l’auteur du manuel «  Comment exploser les gauchistes en débat ». 

Le but n’est plus de convaincre l’adversaire mais de le détruire. Pour reprendre les mots du journaliste Dorian Lynskey, cette nouvelle forme de débat est conçue pour :  « submerger l’autre sous un flot improbable de statistiques, de sophismes et de bons mots élaborés pour être repris en boucle sur YouTube. » Bref_, "que le meilleur clash_". 

Mais à l’heure des réseaux sociaux, est-il tout simplement possible de discuter ? Pour le correspondant italien Paolo Levi, la réponse est non.

« Le besoin de reconnaissance est tellement fort qu’on ne s’écoute plus. C’est le signe d’un délitement des liens sociaux et d’une radicalisation, de la disparition des nuances et de l’échange. Tout cela est en partie lié au poids des réseaux sociaux. » 

Plus pernicieux encore, internet a imposé à la politique cette même exigence d’instantanéité : on attend des résultats tout de suite et maintenant. 

Le fantasme d'une start-up nation

Alternatives Économiques consacre ce mois-ci un grand dossier intitulé «  Start-up : la grande illusion ». Et si la start-up nation n’était qu’une utopie? Toutes les limites de ce modèle économique apparaissent dans ce dossier. 

Premier fantasme : les start-up ont un impact sur l’emploi. Certes, elles en créent, mais de façon marginal et dans des secteurs de niche, comme la high tech ou le numérique. Mais surtout, leur taux de mortalité est élevé : neuf sur dix mettent les clés sous la porte. 

Second fantasme : elles sont un moteur à l’innovation. Les économistes sont d’accord pour dire que l’innovation est surtout l’affaire des grands groupes installés.  

Dans son entretien, le sociologue Michel Villette termine d’écorcher ce mythe: « La start-up nation d’Emmanuel Macron n’est que le prolongement d’une politique publique déjà vieille de bientôt vingt ans. Cette politique est une promesse faite à la jeunesse : il n’y a pas assez d’emplois salariés pour vous tous, mais ce n’est pas grave, vous allez créer votre entreprise ! »  Mais la promesse ne vaut pas grand-chose, il y a en réalité plus de perdants que de gagnants. 

Pour le redressement économique de la France, les pouvoirs publics misent gros sur elles. Mais soutenir ce modèle, c’est peut-être passer à côté d’un véritable enjeu, à savoir moderniser l’ensemble des entreprises du pays.

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