Deux sujets occupent la presse ce matin : les tensions entre l'Arabie Saoudite sunnite et l'Iran chiite, et la disparition de Michel GALABRU. Deux sujets que l'on pourrait condenser en une formule : "Bienvenue chez les chiites"
Je suis sincèrement navré de vous contraindre à dire des absurdités pareilles… mais croyez bien que feu Michel GALABRU n’aurait pas renié ce jeu de mot douteux… qui me permet, par une pirouette tout à fait disgracieuse, de lier les deux principaux sujets qui occupent la presse ce matin… Les tensions entre l’Arabie Saoudite et l’Iran, et la disparition du comédien hier à l’âge de 93 ans…

Commençons par la première, si vous voulez bien… la crise Irano-Saoudienne qui préoccupe une large partie des éditorialistes… « Dangereuse surenchère entre Riyad et Téhéran » pour Renaud GIRARD dans le Figaro… « La crainte de l’escalade » dans Le Parisien, et même tout simplement « Danger », c’est le titre de l’édito de Maurice ULRICH dans l’Humanité… qui s’interroge « La rupture des relations diplomatiques entre l’Iran et l’Arabie Saoudite après l’incendie à Téhéran de l’ambassade saoudienne peut-elle conduire à la guerre et à l’embrasement dans toute cette région du monde ? On peut le craindre, tant s’y confrontent et s’y superposent les conflits religieux, les rivalités de puissance, le contrôle des ressources pétrolières sur fond de baisse des cours, entre autres. »
« Dans une région surarmée et qui continue de fournir l’essentiel du pétrole mondial, un conflit Iran-Arabie Saoudite serait la pire des choses », estime pour sa part l’édito du Monde. « Deux théocraties aussi prosélytes et irrédentistes, aussi viscéralement opposées et si proches physiquement n’ont, par nature même, d’autre possibilités que de finir par se heurter l’une à l’autre » écrit Pascal COQUIS dans les Dernières Nouvelles d’Alsace. Mais « l’escalade à laquelle on assiste depuis samedi n’ira pas jusqu’à l’affrontement armé direct, selon Christophe LUCET de Sud Ouest. Et pour une raison simple : Riyad et Téhéran se font déjà la guerre par procuration. En Syrie. Au Yémen. A Bahreïn. Sur les marchés pétroliers. Et jusque sur les lieux saints. »
Ce qui intéresse la presse ce matin dans cette crise… c’est la place de la France…
Oui, une place bien inconfortable de la diplomatie française, que déplorent bon nombre de journaux… « Pour l’instant, la France s’est bornée à un communiqué laconique, publié dimanche et étrangement antidaté du samedi 2 janvier, déplorant les exécutions en Arabie Saoudite, dont celle du dignitaire chiite AL-NIMR, pas même nommé. Il est temps pour Paris d’entreprendre une initiative de paix ou, du moins, de dialogue », estime Le Monde.
« La France très très prudente », pourrez-vous lire dans Le Parisien… « Prompte à rappeler qu’elle est la patrie des droits de l’homme, la France s’est pourtant bien gardée de condamner l’attitude de l’Arabie Saoudite après l’exécution de 47 personnes ce week-end. Pas un mot de François HOLLANDE. Juste un timide communiqué du Quai d’Orsay », rappelle le journal.
« Dans ce contexte à nouveau dégradé, la France se retrouve prise au piège de son alliance avec l’Arabie Saoudite, pour Jean-Dominique MERCHET, dans l’Opinion. Ce choix stratégique de première importance, jamais vraiment débattu, s’est renforcé depuis l’arrivée de François HOLLANDE à l’Elysée. » Tout cela, au nom des prétendus juteux contrats signés avec le royaume saoudien, mais Jean-Dominique MERCHET rappelle que « les exportations vers l’Arabie Saoudite restent dix fois moins importantes que celles vers… la Belgique ! Que l’Elysée, au nom du réalisme, passe les droits de l’homme par pertes et profits est une chose. Mais son tropisme anti-iranien et pro-sunnite conduit lentement notre pays à l’impuissance diplomatique. »
Impuissance que résume également Jean-Pierre PERRIN dans Libération en ces termes : « Barack OBAMA se retirant du Moyen-Orient et prenant ses distances avec le royaume saoudien, François HOLLANDE peut avoir l’impression qu’il y a une place à prendre, d’autant qu’il a beaucoup d’armes dans sa besace de président-voyageur de commerce. Mais vendre des canons n’a jamais constitué une politique », conclut Jean-Pierre PERRIN.
Si la France change de braquet diplomatique et tourne le dos aux sunnites… on pourra donc dire…
Bienvenue chez les chiites… vous voyez, je prends ma part de lourdeur ce matin, je l’embrasse, je l’assume, c’est ma façon à moi de rendre hommage à Michel GALABRU, décédé hier… GALABRU, qui a joué dans plus de 250 films, dont son lot de navets… des navets qu’il assumait complètement… « J’ai eu le navet facile, déclarait-il dans une interview à la Dépêche du Midi. Mais un mauvais film ne pue pas davantage qu’un autre. »
Et c’est toute la saveur douce amère des hommages qui sont rendus ce matin à Michel GALABRU, que la critique cinéma a longtemps méprisé, voire vomi… « Lorsque les Gendarmes sont sortis, les Cahiers du cinéma qui se passionnaient pour Jerry LEWIS les ont traités de galéjade minable », se souvient GALABRU… qui se qualifiait lui-même de « Bocuse du navet », comme le rappelle Raymond COURAUD dans l’Alsace.
« GALABRU ou la méprise »… c’est le juste titre de l’hommage que lui consacre La Croix, sous la plume de Jean-Claude RASPIENGEAS qui écrit : « Dans cette usine à rire qui attire la France entière, il incarne la médiocrité, la gaudriole stupide, la poilade peu finaude. Ce sera le drame de sa vie : GALABRU était le nouveau RAIMU il risque d’être enterré dans l’uniforme du galonné de Saint-Tropez. »
On relira aussi avec délectation la longue interview qu’il accorda à Télérama, c’était en 1998… interview que l’hebdomadaire a republiée en ligne… dans laquelle il déclare : « Il n'y a pas besoin d'être intelligent pour être comédien. Qui était plus borné, par exemple, plus primaire que Fernandel ? Je me souviens lui avoir conseillé d'aller chercher des rôles dans le répertoire du grand auteur de théâtre napolitain Eduardo De Filippo ; ça me semblait taillé pour lui. Mais il me répond avec hauteur : *« Moi, je préfère * L'Homme à la Buick » - film que FERNANDEL avait tourné avec Danielle DARRIEUX, sorti en 1968.
GALABRU qui, après un César en 1977, aura attendu la fin de sa carrière pour recevoir une nouvelle distinction… un Molière du meilleur comédien en 2008… il avait 85 ans… voici ce qu’il en disait : « Je suis à l’âge où les récompenses pleuvent car on sent que le type va glisser. » Et lorsque le journaliste de la Dépêche lui demande si, comme Molière, il s’imagine mourir en scène, GALABRU répond : « Ce serait finir en beauté mais je suis déjà mort plusieurs fois, dans « La Triche » en 1984, dans « l'Ibis rouge » et dans « Les Acteurs ».
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