

La réforme du droit du travail donne lieu à des interprétations très contradictoires dans la presse.
C’est assez sidérant ce matin à la lecture de la presse…. Chacun voit midi à sa porte… si on veut utiliser une autre expression concernant le rapport BADINTER sur le droit du travail… on peut vraiment, mais alors… comme rarement, lire tout et son contraire sur les préconisations de ce rapport… ce qui m’amène à la montagne et à la souris…
Si je vous dis Matthieu « la montagne et la souris » vous pensez bien sûr à… Jean de la Fontaine… voilà… dans la fable « La montagne qui accouche »…. Qui lui a été inspirée, comme souvent, d’un poème d’Horace… et de ce vers… Parturient montes, nascetur ridiculus mus… La montagne va accoucher d’une ridicule souris… mus désignant ici la souris… mais plus vraisemblablement la souris de montagne, qui est en fait une marmotte… mais je m’égare…
Revenons à nous moutons… ou plutôt à nous souris… bref… Que vous soyez pro ou anti 35 heures… ce matin, vous n’aurez donc que l’embarras du choix à la lecture de la presse… Pour le PARISIEN, c’est clair et net… « pas touche au tabou » titre le journal qui affirme que Manuel VALLS a exclu toute remise en cause des 35 heures.
Même analyse dans l’édito du FIGARO, intitulé « encore un train de retard »… « La France, avec son droit du travail kafkaïen et ses 35 heures, se singularise de tous ses concurrents par un système qui détruit l’emploi au lieu de le préserver, écrit Gaétan de CAPELE. (…) Toujours en retard d’un train, François HOLLANDE a décidé de ne rien décider. La future loi EL KHOMRI ne touchera donc à aucun des totems de la gauche (35 heures, contrat de travail, salaire minimum). »
Voilà, totem pour le Figaro, tabou pour le Parisien, le tableau a le mérite d’être freudien, en plus d’être cohérent… Sauf que quand on lit Libération et l’Humanité par exemple… c’est un autre son de cloche qui nous parvient… « L’exécutif sur le point de contourner les 35h » titre Libération… « c’est une nouvelle brèche qui semble s’ouvrir, selon la journaliste Amandine CAILHOL : celle d’un assouplissement des 35 heures. Certes, la révolution n’est pas pour demain, reconnaît-elle. Preuve en est le gage donné par l’ancien garde des Sceaux, Robert BADINTER (…) de réaffirmer l’existence de la « durée normale » du travail « fixée par la loi ». (…) Ce qui ne devrait pas empêcher le gouvernement de poser un premier jalon, en inscrivant dans le projet de loi la possibilité renforcée de négocier le taux de majoration des heures supplémentaires au niveau des entreprises. Un pas de plus en faveur des représentants du patronat, en attente de plus de flexibilité », alors que « jusqu’ici, les gages donnés aux patrons n’ont pas permis de relancer l’emploi ».
Même analyse pour l’Humanité, qui titre en Une : « Commission BADINTER : du minimum syndical au maximum patronal »… un rapport qui n’empêchera pas la remise en cause des 35 heures et du CDI au mois de mars, selon le journal… Et vous pouvez jouer à ce petit jeu de tout et son contraire avec à peu près toute la presse ce matin : « Pas question de toucher à l’héritage social laissé par Martine AUBRY » dans Paris Normandie… « Le Premier Ministre et son collègue de l’économie sont globalement d’accord pour tordre le cou aux 35 heures » dans le Journal de la Haute Marne… et ainsi de suite…
La Montagne donc… et la souris… ou la marmotte… enfin c’est vous qui voyez…
Le débat sur les 35 heures est donc l’alpha et l’oméga de toute discussion sur la réforme du travail…
Un horizon qui semble en effet difficilement dépassable, et c’est Guillaume GOUBERT dans la Croix qui s’en fait le meilleur relai ce matin… « Les 35 heures font penser à ce morceau de sparadrap dont le capitaine HADDOCK ne parvient pas à se débarrasser dans un des meilleurs albums de Tintin - l'affaire TOURNESOL… Cette affaire (pas TOURNESOL, les 35 heures) témoigne d’une grande incapacité française à examiner posément un problème. C’est-à-dire s’entendre sur un diagnostic, puis sur des remèdes. (…) On préfère instituer les 35 heures en objet de fixation : il faut soit les supprimer, soit les maintenir estime Guillaume GOUBERT. Ce qui donne lieu à des querelles de principe. Et, à l’arrivée, on n’a rien fait d’autre que de bricoler le système quitte à le compliquer et à le rendre illisible par les citoyens. »
Ce qui renvoie très précisément à un autre article… dans Libération ce matin. Ou plutôt une chronique économique, signée Pierre-Yves GEOFFARD, et intitulée « Chômage, on a tout essayé, mais on n’a rien évalué »… chronique qui fait bien sûr écho à cet édito de Guillaume GOUBERT… et qui propose, justement, une évaluation claire et précise d’un dispositif de la lutte contre le chômage : le système « zéro charge » sur les salaires inférieur à 1,6 SMIC dans les entreprises de moins de 10 salariés.
Bon alors ça peut avoir l’air technique comme ça, mais en résumé… ce que montre Pierre-Yves GEOFFARD, c’est que le chômage de longue durée touche principalement les travailleurs les moins diplômés… et que ce dispositif cible précisément les emplois moins qualifiés. Or, pour un coût nul pour l’état – puisque le montant des exonérations est équivalent au montant des allocations que percevrait le travailleur concerné s’il restait au chômage… pour un coût nul donc, eh bien ce dispositif est particulièrement efficace : une baisse de 1% du coût du travail sur ces petits salaires entraine une hausse de 2% de l’emploi.
Pour conclure, on va rester dans le calcul…
Oui, si vous n’avez rien compris à la démonstration que je viens de faire, je vais vous demander un petit effort de concentration…
Lorsqu’un ordinateur accouche d’une montagne, ou plutôt d’un nombre haut comme une montagne… c’est à lire ce matin dans le Figaro… Des scientifiques ont découvert le plus important nombre premier connu à ce jour… un nombre à 22 millions de chiffres…
Un nombre premier, pour ceux qui n’ont pas eu la moyenne à leur bac de math… c’est un nombre entier qui ne peut se diviser que par lui-même ou par 1… comme par exemple… (2, 3, 5, 7, 11, 13)… ce sont, comme l’explique le journal, les « briques élémentaires » de l’arithmétique… une équipe vient donc de trouver, le plus long nombre premier connu… 2 puissance 74 207 281 moins 1. Il a fallu 39 jours à l’ordinateur impliqué dans les calculs pour vérifier qu’il n’était pas divisible. Le précédent nombre premier connu ne faisait « que 17 millions de chiffres » alors que celui-ci en fait 22.
Vous allez me dire, ça vous fait une belle jambe ? Je vous répondrai : Parturient montes, nascetur ridiculus mus… la montagne, la marmotte, le papier d’alu… vous connaissez la suite.
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