Le patrimoine culturel de Palmyre effacé de la carte

France Culture
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Sur les images satellites de la cité antique de Palmyre, en Syrie, on a vu disparaître ces derniers jours, d’abord le temple de Baalshamin, puis, au début de cette semaine le temple de Bêl. Comme si, devant pune communauté internationale impuissante, le groupe Etat Islamique poursuivait son saccage du patrimoine de l’humanité, en effaçant ses plus beaux joyaux de la carte…

Le temple de Bêl à Palmyre, avant et après la destruction par l'EI
Le temple de Bêl à Palmyre, avant et après la destruction par l'EI

Lorsqu’on compare les deux clichés satellites pris, avant et après la destruction du temple de Bêl, à Palmyre, le weekend dernier, on se surprend d’abord à jouer à ce qui ressemble au jeu des 7 erreurs… Sauf qu’ici, déceler les différences entre les deux images s’avère plus désolant que ludique.

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Sur la première image satellite datée du 27 août, on voit très distinctement en relief, au centre, une structure rectangulaire entourée de colonnes. C’est le temple de Bêl. La photo est prise de si loin qu’il semble tout petit, mais en réalité c’est un vaste édifice. Il a été érigé il y a 2.000 ans, c’est le plus connu et le plus beau dit-on, des monuments de la cité antique de Palmyre. Avant la guerre civile en Syrie, il était visité par 150 000 touristes chaque année.Sur le second cliché satellite pris ce lundi 31 août : même lieu, photographié sous le même angle et à la même distance, sauf qu’on ne distingue plus aucun élément en relief au centre de l’image. A la place apparaît un aplat grisâtre, une tâche uniforme, informe. Le temple a été rasé par le groupe Etat Islamique à coup d’explosifs, réduit en poussière, comme gommé de la photo, effacé de la carte. Paradoxalement, cette masse vide au centre de l’image rappelle une époque où l’on ne pouvait pas encore compter sur les satellites pour cartographier l’ensemble de la planète. Sur certaines cartes géographiques anciennes, on peut observer des zones laissées en blanc, vierges de toute indication, qui rappellent cette tâche vide que l’on voit sur la seconde image satellite de Palmyre. Le cinéaste Barbet Schroeder a fait de l’une de ces zones laissées en blanc sur la carte le point de départ de son film La Vallée réalisé en 1972. On en écoute un extrait dans lequel Jean-Pierre Kalfon montre à Bulle Ogier sur un plan, ces espaces non cartographiés :

EXTRAIT LA VALLEE, film du cinéaste Barbet Schroeder

19 sec

Ce qu’il dit est en fait assez proche de ce que l’on ressent en observant les images satellites de Palmyre qu’a diffusé l’ONU lundi soir…C’est là que réside le malaise que provoquent ces photos prises depuis un satellite gravitant dans l’espace, à des centaines de kilomètres de la Terre. Elles nous donnent encore un peu plus l’impression que la Syrie, laissée aux mains du groupe Etat Islamique est aujourd’hui hors d’atteinte. Elles apparaissent comme le signe de l’impuissance, de l’inaction de la communauté internationale face à ces destructions et face à ce conflit. Au fond, le plus inquiétant dans ce cliché satellite, c’est qu’il constitue comme une sorte de preuve par l’image que le groupe Etat Islamique poursuit son saccage dans l’impunité, sous le regard d’une communauté internationale qui se tient à très, à trop grande distance.

Découvrez notre dossier sur les destructions de Daech à Palmyre
Infographie publiée le vendredi 4 septembre :

Les destructions de Daech à Palmyre, au 4 septembre 2015
Les destructions de Daech à Palmyre, au 4 septembre 2015

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