Un virus hyperspatial

Tout au long de cette année 2020 qui s’achève, le SARS-Cov-2 s’est révélé à la fois un prisme puissant et un vertigineux accélérateur. A celles et ceux qui ont pour passion, et parfois pour profession, de penser le monde, il aura servi, et c’est loin d’être fini, à mieux expliquer comme à mieux comprendre. Mieux expliquer et partager ce qu’ils ou elles savaient savaient déjà tant le cas Covid, ce fait social total, offre d’inépuisables ressources pédagogiques. Mais aussi mieux comprendre ce qui, pour les chercheuses et les chercheurs, comme pour les artistes d’ailleurs, ne faisait jusqu’alors que s’esquisser sous formes d’hypothèses, parfois même hasardeuses, ou d’horizons mal définis. Prendre au sérieux les vertus heuristiques du virus ne nous aura pas seulement permis de nous consoler d’une vie désormais en partie dégradée mais surtout, et c’est autrement décisif, de prendre toute la mesure du kairos pour parler comme François Hartog, (que je vous proposerai de réentendre samedi prochain), de prendre toute la mesure de l’instant, non pas celui d’une simple crise sanitaire, aussi sévère, massive et globale soit-elle mais celui d’un dramatique basculement anthropocène déjà entamé depuis plusieurs siècles. Ce n’est pourtant pas l’histoire et le théâtre que j’ai choisi de convoquer aujourd’hui mais la géographie et la chorégraphie, deux disciplines susceptibles de mieux éclairer ce que le virus fait à nos corps sociaux et individuels. Michel Lussaut et Frank Micheletti sont cette semaine les invités de La Suite dans les Idées.