La culpabilité culturelle des confinés

Profiter du confinement pour se cultiver peut s'avérer plus compliqué qu'il n'y paraît
Profiter du confinement pour se cultiver peut s'avérer plus compliqué qu'il n'y paraît  ©Getty - erhui1979
Profiter du confinement pour se cultiver peut s'avérer plus compliqué qu'il n'y paraît ©Getty - erhui1979
Profiter du confinement pour se cultiver peut s'avérer plus compliqué qu'il n'y paraît ©Getty - erhui1979
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Sous l’effet du virus la culture mute : nouvelles formes, nouvelles offres et nouvelles controverses. La théorie culturelle du jour s’attarde sur la manière de garder le lien avec le monde culturel durant la quarantaine.

Vous l’aurez sans doute remarqué : sous l’effet du virus la culture mute. Nouvelles formes, nouvelles offres, nouvelles controverses, aussi. J’ai entrepris de radiographier ces changements au fil de ma théorie culturelle et confinée.

Parmi les premiers effets mesurables de cette quarantaine mondiale, on aura évidemment noté l’explosion de contenus culturels mis à disposition du public et la profusion de recommandations. Mais si la frustration est souvent assimilée au manque, une telle opulence de propositions peut elle aussi créer de la frustration - si tant est qu’on ait la chance de pouvoir l’éprouver.

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Alors, si vous culpabilisez de ne pas avoir assez profité du grand buffet d’œuvres de l’imagination et de l’esprit qui vous est proposé : pas de panique ! Si au-delà des contingences professionnelles et domestiques, quelque chose vous empêche encore de vous ruer sur "La recherche” de Proust, l’intégrale des films de Tarkovski ou les excellentes préconisations de Culture Maison sur France Culture : ne vous en voulez pas.

Ma théorie c’est que vous manifestez une sorte d’instinct de survie, et dans un premier temps, rien ne sert d’aller contre dans cette "disponibilité indisponible".

Un article du quotidien italien La Repubblica, Pourquoi je n’arrive pas à lire de roman pendant le confinement, a attiré mon attention.

En période de pandémie, le cerveau peine à être multitâche

Alors que l’on a vu, en Italie, les ventes en ligne de La Peste de Camus s’envoler au début de l’épidémie, cet article s’attarde sur l’impossibilité pour des citoyens confinés de mettre ce temps d’arrêt au profit de la lecture. C’est que La Peste nous renvoie à la situation que nous vivons, et au fait que le cerveau, en période de pandémie, peine à être multitâche.

Nous serions programmés en situation d’alerte à faire une seule chose à la fois. Un phénomène de l’ordre de "l’attention spatiale" nous empêcherait de faire abstraction de cette donnée première : survivre. Quand bien même nous sommes en sécurité sur notre canapé. Paolo Legrenzi, professeur de psychologie à l’université de Venise, estime que c’est ainsi que l’évolution de l’espèce humaine s’est construite et qu’autrement elle aurait disparu.

Est-ce qu’il faudrait pour autant ne s’accorder que la lecture de romans épidémiques et de manuels de survie ? Le visionnage de films de contagions et de séries apocalyptiques ? S'évader dans d’autres récits nous ferait-il baisser la garde ? Non, je vous rassure. Et on trouvera, au contraire, dans la culture bien des moyens inattendus de survivre, de comprendre, et de transformer cette épreuve.

En revanche, dans ce frein disons "instinctif", il y une mise en alerte qui pourrait nous être utile par la suite : le sentiment que nous ne pourrons pas transformer tout cataclysme en aubaine de loisirs.

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