Coronavirus, premier contact

coronavirus, premier contact
coronavirus, premier contact ©Getty -  fpm
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Le coronavirus nous confronte à des changements d'ordre systémique...comme la transition écologique.

J'avais d’abord prévu de vous parler de la fin de mon Défi Zéro Déchets (la cérémonie de remise des prix avait lieu –elle aussi- ce week-end) mais ce sera pour une prochaine fois. Hier soir, aux alentours de minuit, mon téléphone a vibré. Une alerte du journal Le Monde : ‘’l’édition 2020 de Livre Paris est annulée pour des raisons de santé publique’’. Je n’avais jamais vu le coronavirus d’aussi près.

Que le Salon de l’agriculture soit écourté d’une journée, que le semi-marathon de Paris soit finalement reporté, que huit communes du département de l’Oise soient placées en semi-confinement, tout cela maintenait malgré tout l’épidémie à distance.  Non pas que je ne me sentais pas concerné, mais, pour paraphraser Aurélien Bellanger, je trouvais moi aussi que le coronavirus manquait de chair.

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L’annulation du Salon du livre lui donne non seulement une épaisseur (pour moi qui attend chaque année ce rendez-vous du monde littéraire), mais elle dote aussi cet événement (dont on est encore très loin de mesurer les conséquences) d’une dimension symbolique nouvelle : le virus s’attaque aux livres, donc à la connaissance, comme un gigantesque autodafé (quand bien même le salon ne serait qu’une vaste foire commerciale). Je n’ai pas souvenir d’un tel précédent.

Mais le plus paradoxal dans cette histoire, c’est que depuis que j’ai appris l’annulation du salon, j’ai l’impression de vivre moi aussi comme dans un livre, d’être passé, non pas de l’autre côté de l’écran comme chez Woody Allen (ou du miroir comme chez Alice), mais à l’intérieur des pages d’un des nombreux récits d’anticipation dont j’ai croisé la route depuis quelques semaines. Le Covid19 est une expérience immersive d’effondrement à grande échelle.

On ne peut évidemment pas tirer le moindre bilan sanitaire de cette épidémie, et il faut souhaiter qu’il ne soit pas trop lourd. Mais sur le plan anthropologique, le coronavirus ouvre une période tout aussi inquiétante qu’excitante. Confrontés à une déstabilisation de nos modes de vie, comment allons-nous nous adapter, même si cette adaptation ne doit être que temporaire ?

J’ai bien senti les premiers effets délétères sur le comportement en prenant ce matin la ligne 6 du métro parisien. Dans la rame, face à moi, un type toussote, et pas qu’un peu : de la station Bercy jusqu’à celle de Montparnasse, 11 arrêts au total, c’est long face à quelqu’un qui est peut-être contaminé, et qui s’abstient de mettre sa main devant sa bouche. Immédiate suspicion. Je lui ai adressé le plus sombre de mes regards noirs : aucun effet.

Le télétravail, qui avait trouvé de nombreux adeptes en décembre avec la grève dans les transports, est à nouveau en train de s’imposer. Dehors, les ventes de voiture s’effondrent, comme les cours du pétrole, une partie de l’activité touristique est à l’arrêt, dans les magasins des zones affectées par le virus, les rayons sont presque vides. C’est idiot mais comment ne pas faire le rapprochement avec la série angoissante de Canal+ sur ‘’L’Effondrement’’.

Vision plus optimiste : les émissions de carbone vont baisser du fait du ralentissement de l’activité économique (elles auraient déjà diminué d’un quart en Chine), l’occasion de faire le tri entre le nécessaire et le superflu, c’est bon pour la transition écologique et pour la lutte contre le réchauffement climatique. C’est bon aussi pour la biodiversité, la Chine, encore elle, annonce l’interdiction complète du commerce et de la consommation d’animaux sauvages.

J’y vois encore un intérêt, disons mécanique, celui d’observer comment réagissent les rouages d’un monde à moitié à l’arrêt. Le défaut de quelques-uns peut-il gripper l’ensemble du système, par un effet d’engrenage, tel que l’ont théorisé les collapsologues ? Le coronavirus est un laboratoire social à ciel ouvert.

Demain, je vous raconterai la fin de mon Défi Zéro Déchets.

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