

Avec le recul, on peut trouver un certain nombre de similitudes entre crise du Covid et crise climatique. C'était l'objet d'une conférence récente du Haut Conseil pour le climat.
Laissons de côté pour cette fois le monde d’après. Le monde d’après viendra…quand il viendra. Je doute d’ailleurs qu’il y ait encore beaucoup de candidats pour se risquer à nouveau sur ce terrain et nous faire partager leur conviction que le reconfinement est l’électrochoc dont nous avions tous besoin pour changer de modèle et combattre de front –enfin !- le changement climatique. Ca n’a pas marché au printemps, le monde est resté tel qu’il était, et on ne voit pas pourquoi l’automne serait plus propice.
Mais le recul nous permet au moins, cette fois-ci, d’avoir une idée plus précise des connexions qui existent entre la crise sanitaire et la crise climatique. Je ne parle pas ici en termes de causalité, même si la pression sur l’environnement, le développement de l’urbanisation, la mondialisation des échanges…sont autant de facteurs explicatifs de l’une et l’autre crise. Le plus frappant, ce sont les similitudes qu’on peut observer, notamment dans la façon que nous avons d’y répondre.
Prenons par exemple le cas des lanceurs d’alerte, que ce soit à propos du dérèglement climatique ou de la pandémie de Covid19 : y prêtons-nous suffisamment attention ? S’agissant du coronavirus, il a fallu que les hôpitaux soient débordés et que les premiers cas mortels touchent notre voisinage pour que nous sortions du déni, alors que des scientifiques avisés avaient commencé bien plus tôt, dès sa diffusion en Chine, à sonner le tocsin.
Le plus désespérant, c’est que ça n’a pas vraiment servi de leçon. Lorsque Jean-François Delfraissy, le président du conseil scientifique, annonce début septembre l’imminence d’une seconde vague et la nécessité pour le gouvernement de prendre des mesures difficiles, qui veut vraiment y croire ? Nous nous agglutinons aux terrasses des restaurants, après une journée de travail que nos entreprises ont décrété devoir être en présentiel.
Pour la crise climatique, c’est la même chose : il y a une alerte, elle n’est pas entendue, la catastrophe arrive, on fait la promesse qu’on ne nous y reprendra plus, et puis on oublie…jusqu’à la prochaine.
Ces similitudes entre Covid et Climat, Laurence Tubiana, l’ancienne négociatrice en chef de la COP21, les expliquait de manière très claire la semaine dernière, lors d’un webinaire organisé par le Haut conseil pour le climat, et que vous pouvez retrouver en ligne.
Prenons un autre exemple : les inégalités sociales. La crise sanitaire les a exacerbées, les populations les plus vulnérables sur le plan économique ont été davantage confrontées aux questions d’accès à l’alimentation et aux soins, et davantage exposées à la maladie. Avec le changement climatique, cette question des inégalités est encore plus forte : ce sont les plus pauvres qui sont le plus en danger. Un des épisodes les plus marquants, c’est l’ouragan Katrina aux Etats-Unis en 2005.
Mais comme l’explique Laurence Tubiana (désormais à la tête de l’Agence européenne pour le climat), bien qu’à des niveaux différents, nous sommes tous vulnérables, que ce soit face à la pandémie comme face au réchauffement. Nous le sommes en tant qu’individus. Nous le sommes en tant que sociétés. Ce qui pose la question de la résilience face à de telles catastrophes, autrement dit notre capacité à nous organiser collectivement pour y faire face.
Or la pandémie a démontré que nous n’étions pas prêts : notre système économique a été profondément ébranlé par le virus et le confinement. Cette fois-ci, avec le reconfinement, l’activité économique est à peu près maintenue, les établissements scolaires restent ouverts : délicat équilibre avec lequel il va peut-être falloir apprendre à vivre sur la durée, que ce soit pour faire face aux pandémies comme aux conséquences, inéluctables, du changement climatique.
Et dans un cas comme dans l’autre, ça ne pourra pas se faire isolément. C’est le dernier parallèle majeur entre Covid et Climat : deux crises globales qui ne trouveront d’issue qu’à condition qu’elles soient traitées globalement, ou, pour reprendre un terme plus diplomatique, de manière multilatérale. D’où l’importance des choix qui vont être faits, dans les prochaines heures, de l’autre côté de l’Atlantique.
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