

Le protocole est rodé et le message d’une effarante simplicité : pourtant Bansky fait toujours mouche, pourquoi ?
Banksy a profité de l'ouverture de la Biennale d'art de Venise pour frapper une nouvelle fois avec une œuvre mystérieuse et engagée contre le tourisme de masse qui envahit la Sérénissime.
Tiens revoilà Banksy, vengeur masqué du street art, avec un nouveau coup : « Venice in Oil ». Une installation performance express filmée et postée sur son compte Instragam, comme à l’accoutumée. Le protocole est rodé et le message d’une effarante simplicité : pourtant Bansky fait toujours mouche, pourquoi ?
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Installé place Saint Marc, au milieu des peintres à touristes, l’artiste présente neuf huiles sur toile qui forment ensemble une image : celle d’un écrasant paquebot de croisière qui apparaît derrière les sempiternelles représentations de gondoles, de canotiers, du pont Rialto et du Campanile.
Les trois messages de Banksy
Filmé le visage dissimulé par un chapeau et planqué derrière son journal, le célèbre anonyme s’assied sur une chaise et attend le chaland avant de se faire rapidement chasser par les carabiniers. Alors qu’il quitte la place, surgit derrière lui sur la lagune, un véritable paquebot. Vous l’aurez compris : Venise baigne dans l’huile et dans le tourisme de masse qui dégrade la ville au grand dam de ses habitants. Message 1.
Puis comme toujours avec Banksy, s’ajoute à l’image ou la vidéo postée, une légende personnelle plus ou moins énigmatique. Cette fois la critique adressée au monde de l’art et à la Biennale qui s’est ouverte le 11 mai dernier est limpide, je le cite "Bien qu'étant l'événement artistique le plus grand et le plus prestigieux au monde, je n'ai jamais été convié pour une raison quelconque". Message 2.
Enfin, un pochoir caractéristique du style de Banksy été remarqué par des passants au pied d’une maison vénitienne. C’est un enfant avec un gilet de sauvetage, gagné par les eaux et brandissant une fusée de détresse d’où s’échappe une fumée rose. Entendez : en Italie on autorise les bateaux touristiques à pourrir le patrimoine, mais on renvoie ceux qui sauvent des migrants… Message 3.
On peut trouver assez pauvre l’esthétique de Banksy, ou encore déplorer son système de dénonciation simpliste. On peut aussi estimer que sa toile, « La petite fille au ballon rouge », adjugée 1,2 millions de dollars à Londres l’année dernière et instantanément autodétruite, est un faux coup d’éclat contre la spéculation dans l’art, et ne fait que renforcer sa valeur.
Mais on est obligé de reconnaître sa maestria dans l’art du piratage. Dès le début des années 2000, avant que le street art ne soit reconnu et coté, Banksy faisait déjà de l’accrochage sauvage de ses œuvres au musée.
Créer un jeu de piste populaire
En 2010, avec son documentaire « Exit Through the Gift Shop » qu’on pourrait traduire par « échappé de la boutique à souvenir », présenté en France sous le titre « Faites le mur !», il interrogeait cette fois la fabrication mercantile du street artist et l’enfermement d’œuvres destinées à exister dans la rue.
Son sinistre « Dismaland » en 2015, dans un parc de loisir anglais désaffecté, avec ses canards gluants de mazouts, et ses petits bateaux remplis à ras bord de migrants qu’on ne réussit jamais à faire débarquer, a quant à lui proposé une des plus cinglantes narrations du monde contemporain.
Alors que doit s’ouvrir à Paris une exposition événement autour de Banksy au musée du graffiti le 1er juin prochain, ce qu’il y a de véritablement admirable c’est sa capacité à créer un jeu de piste populaire. Un espace ouvert où même les slogans les plus convenus donnent l’impression au public d’avoir découvert un trésor : un trésor… de pirate.
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