Les deux prochains jours s’annoncent décisifs pour l'avenir de la Catalogne. Alors que le feuilleton politique et économique bat son plein qu'en est-il de la culture ?
Pour rappel les derniers rebondissements sont les suivants :
Si des élections régionales anticipées ne sont pas organisées comme une partie du gouvernement catalan le demande, vendredi à Madrid, le Sénat où les conservateurs ont la majorité pourrait voter l’article 155 de la constitution espagnole. Ce que le Premier ministre espagnol Mariano Rajoy a indiqué comme étant "la seule réponse possible". Cet article 155 implique une suspension d'autonomie de six mois pour la Catalogne jusqu'à l'organisation d'élections. Une prise de contrôle de la région par l’Etat central avec une mise sous tutelle du parlement et des médias publics catalans. Ce à quoi le président séparatiste catalan Carles Puigdemont pourrait répliquer en convoquant le parlement régional et en proclamant l’indépendance…
Comment cette situation va affecter les milieux de la culture ? Sur le plan footballistique on sait déjà à quoi s'en tenir... Les autorités sportives espagnoles ont annoncé que le Barça et les clubs catalans seraient exclus des compétitions nationales en cas de sécession de la Catalogne. Serait-ce la fin du mythique « classico » ? Ces matchs qui opposent régulièrement le FC Barcelone au Real Madrid dans le championnat espagnol. La fin du « classico » au niveau national peut-être mais sa persistance au niveau européen en Champion’s League, ce serait l'une des conséquences de la situation. En revanche pour la culture non footballistique c’est nettement plus flou !
L'exemple du MACBA
On peut néanmoins glaner ça et là quelques signaux. Par exemple dans le milieu de l’Art, cette histoire qui a retenu mon attention. Dans ce contexte d’instabilité le grand collectionneur français Philippe Méaille a annoncé cette semaine le retrait de ses œuvres en dépôt au Musée d’art contemporain de Barcelone, le MacBa. Jusqu’ici tout allait bien au pays de l’art conceptuel, l’admiration et la confiance étaient de mise entre le collectionneur et le musée. Mais pour la sécurité des œuvres et pour ne pas dépendre événements exogènes, la décision a penché dans le sens du retour des œuvres. Je cite ici l’avocat du collectionneur dont la prolongation du prêt était en pleine négociation. Côté MacBa on assure que « Les musées sont régis par des procédures et une éthique stricte qu’aucune situation ne peut affecter ».
Cet exemple montre à quels types de problèmes pourrait être confrontée la vie des musées et des expositions en Catalogne. Et comment cela se passera-t-il pour le centre d’Art « Caixa Forum » qui appartient à la CaixaBank laquelle a annoncé le déménagement de son siège social hors de Catalogne ?
Le sort des médias publics régionaux
Quant aux médias publics régionaux comme TV3 et Radio Catalunya on sait qu’en cas de vote comme de l’article 155 de la constitution vendredi ils seront automatiquement mis sous la tutelle de Madrid. Des contenus qui donnaient principalement la voix aux indépendantistes y étaient diffusés ces derniers mois. L’Etat central mettra-t-il tout le monde à la porte ? C’est peu probable. Des réaménagement dans les grilles de programmes, des changement d’affection oui. Ce qui annonce une séquence houleuse.
En m’entretenant avec Santi Tomàs Justribó, professeur de philosophie à l'Ecole Massana et élève de Josep Ramoneda ancien directeur du Centre de Culture contemporaine de Barcelone, je réalisais que la perspective d’une bascule radicale relevait du fantasme. Quant à la perspective de guerre civile n’en parlons pas. Les indépendantistes catalans ne constituent pas une force armée et se fondent majoritairement sur une culture pacifiste. Mais ce qui peut arriver certainement c’est que l’Etat Central mette des bâtons dans les roues du secteur culturel catalan. Le tout assorti d’une vague d’ « espagnolisation » de la culture catalane.
Dans le monde foncièrement "catalaniste" de la culture, mais divisé sur l’indépendance et ses modalités, l’inquiétude est diffuse. Cet élan indépendantiste avec son référendum précipité aurait-il été au fond trop « ingénu » ? Réclamant plus pour se retrouver avec moins?
L'équipe
- Production
- Réalisation