Covid-19 : alerte sur le secteur de la presse

A la S.A.D (Société Agence Diffusion) de Marseille le 31 mai 2020. En grève alors depuis 3 semaines contre la liquidation de la filiale Presstalis. Les kiosquiers ont vu leur fréquentation baisser de 40 % pendant le confinement.
A la S.A.D (Société Agence Diffusion) de Marseille le 31 mai 2020. En grève alors depuis 3 semaines contre la liquidation de la filiale Presstalis. Les kiosquiers ont vu leur fréquentation baisser de 40 % pendant le confinement. ©Maxppp - Antoine Tomaselli
A la S.A.D (Société Agence Diffusion) de Marseille le 31 mai 2020. En grève alors depuis 3 semaines contre la liquidation de la filiale Presstalis. Les kiosquiers ont vu leur fréquentation baisser de 40 % pendant le confinement. ©Maxppp - Antoine Tomaselli
A la S.A.D (Société Agence Diffusion) de Marseille le 31 mai 2020. En grève alors depuis 3 semaines contre la liquidation de la filiale Presstalis. Les kiosquiers ont vu leur fréquentation baisser de 40 % pendant le confinement. ©Maxppp - Antoine Tomaselli
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La presse papier ne va pas bien. Ce n’est malheureusement pas un scoop mais ces derniers mois elle subit, en plus, une crise dont elle se serait bien passée.

Le secteur de la presse, déjà en difficultés, a subi ces derniers mois deux crises. D’abord la crise sanitaire, qui a considérablement ralenti l’activité. Pourtant, les kiosquiers étaient autorisés à ouvrir pendant le confinement, la distribution de la presse étant considérée comme une activité essentielle. Et 92 % l’ont fait, selon Culture Presse, l’organisation professionnelle du secteur.

Le problème c’est que la limitation des déplacements a fait chuter la fréquentation de 40 %, avec à la clé des pertes de chiffre d’affaires pouvant atteindre les 50/60 % !

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A cela s’est ajoutée une deuxième crise :  celle liée aux difficultés de Presstalis, qui achemine l’essentiel de la presse nationale et magasine vers ces même points de distribution. Le 15 mai dernier, le groupe a été placé en redressement judiciaire, et ses filiales régionales ont été liquidées par le tribunal de commerce de Paris. 

La distribution s'en est trouvée perturbée. La CGT du Livre dénonçant cette situation qui aboutit à la suppression de 518 postes. En guise de protestation, des salariés de ces filiales ont bloqué des solutions alternatives pour acheminer les journaux. Des salariés qui portent d’ailleurs un projet de reprise de la distribution de presse au plan local. 

Dernièrement, il y avait encore des problèmes d’approvisionnement à Lyon, Toulon et Marseille (voir sur ce lien les photos de linéaires vides prises par des marchands de journaux) . Pour les deux premières villes, ce serait en passe de revenir progressivement à la normale. Dans la cité phocéenne, en revanche, pas encore de solutions à court terme.

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Ces deux crises se sont en tous cas révélées dramatiques pour les kiosquiers. Entre le début de l’année et fin mai, 955 points de vente avaient fermé, soit beaucoup plus que sur l’ensemble de l’année 2019, puisque ce sont alors 579 points de vente qui avaient mis la clé sous la porte.  

Le ministre de la Culture Franck Riester est d’ailleurs en train d’élaborer un plan d’aide pour la filière. 

Les éditeurs de presse en grande difficulté

Ventes au ralenti, publicité plus rare pendant le confinement : le secteur, déjà affaibli, ne vit pas une période facile. Hier, le Parisien a décidé de fusionner ses 9 éditions départementales pour proposer un cahier unique d’information locale. Une réorganisation qui a pour conséquence la suppression de 30 postes, sans départs contraints. Dans un communiqué, le journal justifie ce plan par la nécessité d”’adapter ses charges à la baisse des ventes du papier” (il a perdu 100 000 lecteurs en cinq ans) et de “conquérir de nouveaux acheteurs, pour aider le journal à financer sa transition digitale”. "Dans le numérique, on est parti plus tard que les autres", reconnaitPierre Louette, PDG du groupe Les Echos-Le Parisien. 

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Hier, on a appris aussi que Le Monde des Religions, un bimestriel, paraîtrait pour la dernière fois en version papier ce mois-ci, et deviendrait ensuite une rubrique sur le site internet du Monde. 

Et puis récemment, le quotidien Paris-Normandie a été placé en liquidation judiciaire. "Conséquence directe de l'impact de la Covid-19 sur le chiffre d'affaires” assure la direction mais le journal était déjà en grande difficulté avant le confinement. Il vient d’être racheté par le groupe belge Rossel, propriétaire de la Voix du Nord, avec 60 licenciements à la clé. 

La question récurrente de l'avenir de la presse papier

La mort de la presse papier est régulièrement annoncée. Et l’évolution des usages nous y conduit : les jeunes générations ne connaissent l’information que sur Internet, et encore elle n’émane pas toujours de médias fiables. Mais impossible, à ce stade, de dire quand la presse papier vivra ces derniers jours.   

Et puis il faut distinguer entre la presse d’information et la presse centrée sur les loisirs, la culture, les savoirs ou encore la presse pour enfant. 

Il y a des magazines qu’on prend plaisir à feuilleter. Certains d’ailleurs se vendent à un prix élevé. C’est une niche : des clients achètent moins souvent en kiosque mais des produits plus chers.

Un exemple aujourd'hui d'ailleurs avec le lancement de Légende, le dernier titre lancé par Eric Fottorino, l'ancien directeur du Monde, après Le 1, América et Zadig.  (cf son interview dans le journal de 12h30 sur France Culture le 10 mars dernier). Vendu au prix de 20 euros (!), ce trimestriel entend mettre à l'honneur une "légende" contemporaine, avec une large place faite aux photos. 56 000 exemplaires sont prévus pour ce premier numéro, qui met à la Une Zinédine Zidane. Un modèle sans publicité et au format géant (40 x 27).  

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Et pour les grands quotidiens nationaux et régionaux, il faut trouver le bon modèle.  

Le Monde, par exemple, a réussi le pari de l’abonnement sur son site Internet. Il est aujourd’hui le premier quotidien national sur le numérique, avec plus de 250 000 abonnés, à comparer avec ses 30 000 ventes au numéro. Dans les colonnes de Libération, son directeur, Jérôme Fenoglio, estime que "cette crise valide le modèle de l’abonnement numérique et l’idée que le journalisme, ce n’est pas que des coûts, mais aussi de la création de valeur". 

Car le support importe peu, comme le souligne l’historien des médias Patrick Eveno sur le site de France Culture : “Ce qui compte, ce sont les rédactions qui font vivre la démocratie, le lien social”. A elles donc de trouver les moyens de résister à la tempête, en se rendant indispensable pour leurs lecteurs, qu'ils soient amoureux du papier, ou habitués à feuilleter leur journal virtuellement sur leurs tablettes.

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