Margareth Thatcher est morte et la machine à hommage va s’enclencher dans la foulée. Pourtant sa disparition intervient au moment même où le système qu’elle avait suscité, le libéralisme absolu, pour ne pas dire religieux, multiplie les signes de crise.
Margareth Thatcher n’était pas une social-démocrate à l’envers, pas une adepte du compromis, mais une révolutionnaire, une passionaria. Avec Ronald Reagan, elle n’a pas lancé de mesures visant à limiter les dérives de l’Etat protecteur, mais elle a fait table rase. Pour elle, l’émancipation des forces économiques entrainerait de facto la libération des énergies.
Il suffirait, dans son monde idéal, de laisser libre cours aux puissances, notamment celles de l’argent, pour que les égoïsmes donnent naissance à une société plus solidaire, grâce à l’autorégulation induite par la concurrence.
Tu parles, Charles, ou plutôt du parles, Margareth…
Ce qu’elle prônait au fond, dans un monde qui se moquait ouvertement de l’autogestion des ateliers par eux-mêmes, c’était l’autogestion de l’argent par lui-même. Il suffirait de supprimer les règlements, donc l’idée qu’un chef puisse mettre le nez dans les affaires pour que les affaires fonctionnent, et qu’elles s’autocontrôlent.
Il se trouve que l’autogestion des grands patrons, et des puissants en général, n’a pas mieux fonctionné que l’autogestion des ateliers, elle a buté, elle aussi, sur la fameuse nature humaine.
Trente ans plus tard, le « toujours plus » de Margareth Thatcher a explosé dans la bulle des subprimes, et sa promesse d’autorégulation saute aux yeux ces jours-ci dans les révélations sur les paradis fiscaux. La libre concurrence, non faussée par un Etat présenté comme idiot par nature, n’a rien autolimité. Elle a démultiplié les appétits de milliers de Cahuzac, ou de « Patrons voyous » (pour reprendre l’expression de Jacques Chirac et Nicolas Sarkozy). Il y aurait de la voracité partout, chez les politiques, les hommes d’affaire, les financiers, les artistes, les sportifs, qui échapperaient à la fameuse autorégulation en se dissimulant derrières des sociétés écran elles-mêmes planquées dans des paradis fiscaux.
Ainsi Mme Thatcher n’a pas créé un monde nouveau, mais impulsé un univers parallèle, insaisissable, qui tiendrait le monde réel sous son emprise et lui pomperait les richesses sous forme d’évasion fiscale.
C’est cette icône que la planète va pourtant célébrer, à la manière de ses antimodèles, quand les sociétés communistes déjà en crise, célébraient leurs petits pères des peuples.
Un jour, viendra le temps des historiens, qui dresseront le bilan statistique. Il n’est pas dit, en terme de souffrance et de malheur, que l’utopie Thatchérienne, qui n’avait pas d’alternatives (Tina…), vaille plus cher que ses devancières, qui prônaient le Parti unique…
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