2017 : la "Présidentielle-spectacle"

Marine Le Pen sur le plateau de L'Emission Politique de France 2 le 9 février 2017
Marine Le Pen sur le plateau de L'Emission Politique de France 2 le 9 février 2017 ©AFP - THOMAS SAMSON / AFP
Marine Le Pen sur le plateau de L'Emission Politique de France 2 le 9 février 2017 ©AFP - THOMAS SAMSON / AFP
Marine Le Pen sur le plateau de L'Emission Politique de France 2 le 9 février 2017 ©AFP - THOMAS SAMSON / AFP
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Où est le fond ? On touche le fond ! Il est vrai que cette campagne présidentielle est pour le moins surprenante, faite de rebondissements, d'affaires, de rumeurs... Plus encore que les précédentes.

Il y avait, je vous en parlais ici même mardi, l'affaire des diamants pour Giscard, c'était en 79, deux ans avant la présidentielle de 81. La différence aujourd'hui c'est que ces affaires interviennent dans le temps de la campagne à moins de 100 jours du dénouement. Il n'y a qu'à regarder la presse pour voir à quel point nous sommes plus que jamais immergé dans un spectacle. Ce matin, la Une du Parisien Magazine : "Présidentielle, plus fort qu'au cinéma !" Et nous retrouvons en pages intérieures, les visages des candidats mais façon affiches de film. C'est ainsi que Benoît Hamon incarne "Le Péril jeune", François Fillon "Seul contre tous" ou Marine Le Pen "Un air de famille".

Continuons rapidement de feuilleter la presse. Dans Libération, on retrouve comme tous les vendredis, la chronique de Thierry Mandon, secrétaire d'Etat à l'enseignement supérieur. Et que dit-il ?

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"A force de n'être plus que coups, cette présidentielle est habitée par les lois du spectacle. On y parle de shows et de meetings géants plus que de projets, de prédicateurs et finalement de performances d'acteurs plus que de programme."

Là où les primaires successives à droite comme à gauche, ont eu le mérite de parler des programmes, des idées, d'amener petit à petit de grands pans de la population à s'intéresser à cette élection, les rebondissements du mois de janvier, la saturation de l'espace médiatique sur ces affaires, concourrent encore un peu plus, c'est vrai, à mettre tout le monde au courant, à connecter tous les Français à l'échéance, à cette joute des mois d'avril et mai. Mais pas sûr qu'in fine, ce ne soit pas l'abstention qui l'emporte.

Traditionnellement, la présidentielle est pourtant l'élection où il y a le plus fort taux de participation, en moyenne, autour de 80% du corps électoral. Seules exceptions, 1969 et 2002. Les deux seuls moments sous la Vème République où la gauche n'accède pas au second tour. Et c'est une probabilité élevée de nouveau en 2017. Résumons, risques élevés de forte abstention et d'absence de la gauche parce qu'affaiblie, des affaires en pagaille : le cocktail idéal pour le Front National. Ce qui se vérifie dans les sondages d'intention de vote.

Le comble, c'est que le parti de Marine Le Pen est lui aussi visée par des enquêtes. Deux enquêtes de l'OLAF, l'Office européen de lutte contre la fraude et une autre ouverte par le Parquet de Paris, devenue depuis une information judiciaire pour je cite "abus de confiance", "recel d'abus de confiance", "escroquerie en bande organisée", "faux et usage de faux" et, last but not least, "travail dissimulé". Tout cela ressemble fort aux soupçons qui visent le candidat de la droite François Fillon.

Hier soir, Marine Le Pen, invitée pendant deux heures de L'Emission Politique de France 2 a entonné l'air du complot. Ses assistants parlementaires, censés se dédier à leurs tâches européennes, ne seraient pas en mesure de justifier de leur présence à Bruxelles ou à Strasbourg. On parle donc bien là comme dans l'Affaire Fillon d'emplois présumés fictifs. La seule nuance : ce serait au bénéfice du parti de Marine Le Pen et non pour un bénéfice personnel comme c'est supposément le cas pour M. Fillon. Tout ressemble point par point avec l'affaire Fillon. Même les arguments qu'emploie Marine Le Pen pour se défendre. Dans cet argumentaire d'ailleurs, on en rigolerait presque quand elle tente de s'expliquer sur son garde du corps, employé lui aussi comme assistant parlementaire, certes à temps partiel et certes seulement trois mois entre octobre et décembre 2011, pour un salaire égal à 8 fois le SMIC.

"Chez nous même les gardes du corps font de la politique" - Marine Le Pen sur France 2 le 9 février 2017

C'est une phrase à encadrer, c'est imparable. A quand le fond, le débat d'idées dans cette présidentielle, car là c'est vrai qu'on touche vraiment le fond...