Des députés quittent LREM : défection ou réfection ?

La député Paula Forteza, proche de Cédric Villani, a annoncé son départ du groupe LREM à l'Assemblée nationale.
La député Paula Forteza, proche de Cédric Villani, a annoncé son départ du groupe LREM à l'Assemblée nationale.  ©AFP - Jacques Demarthon
La député Paula Forteza, proche de Cédric Villani, a annoncé son départ du groupe LREM à l'Assemblée nationale. ©AFP - Jacques Demarthon
La député Paula Forteza, proche de Cédric Villani, a annoncé son départ du groupe LREM à l'Assemblée nationale. ©AFP - Jacques Demarthon
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Ils sont une douzaine à avoir quitté le groupe majoritaire depuis le début du quinquennat.

La République en marche est un agrégat opportuniste ou une force qui a changé la démocratie française ? C'est à cette question que va devoir répondre le mouvement. 

Ces derniers jours, les défections se sont multipliées dans ses rangs. Hier, c'est la députée Paula Forteza qui a quitté le groupe En Marche à l'Assemblée. 

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Bien sûr, les hiérarques du parti ont beau jeu d'expliquer ces tabliers rendus par la petite cuisine politicienne : les déserteurs seraient frustrés, ingrats, gonflés d'ambitions personnelles ou inaptes au travail de groupe. Paula Forteza est l'une des soutiens du dissident Cédric Villani.

Mais depuis 2017, pas moins de 11 députés marcheurs ont ainsi quitté le groupe majoritaire à l'Assemblée. 

Certes, cette majorité reste confortable : 302 élus "La République en Marche" + 46 chez les alliés du Modem. En leur temps, Michel Rocard ou Jean-Marc Ayrault auraient rêvé d'un tel bataillon. Mais le groupe En Marche fait penser à une large voûte dont quelques pierres tombent, une à une, faute de ciment. 

Et puis cela pose la question suivante : qu'est-ce qu'être macroniste ? 

Oui, est-ce une fidélité aux engagements de 2017 ? Est-ce une loyauté au parti fondé par Emmanuel Macron. 

Est-ce une loyauté personnelle au chef de l’État ? Ou bien être macroniste ? Est-ce agir comme l'a fait Emmanuel Macron, c'est-à-dire rompre avec son parti d'origine pour tracer sa route individuelle ? 

Auquel cas le départ des députés est un geste éminemment macroniste. Comme l'a dit le président devant des étudiants américains : "don't always follow the rules" [extrait sonore]. 

C'est cette ambiguïté dont joue Cédric Villani, lui qui se dit fidèle à Emmanuel Macron parce qu'infidèle aux appareils politiques.    C'est l'aporie dans laquelle est enfermée La République en Marche ; un parti qui voulait dépasser les vieilles étiquettes, et qui se voit lui-même dépasser comme une vieille étiquette. 

Ce que nous voyons là, c'est la conséquence du mode de sélection des nouveaux députés. Ils ne leur était pas demandé la carte d'un parti ou des états de service militants, il leur était demandé un profil et une envie. Et quand celle-ci disparaît, ces députés reprennent leur liberté. 

C'est l'avantage et le défaut de ce système du député « sans engagement », comme pour les forfaits téléphoniques. Facilement souscrite et facilement résiliée, l'appartenance à la République en Marche (et encore on aimerait pouvoir résilier un forfait avec la même facilité). 

Ces défections en série viennent aussi de la large place offerte à la société civile... 

Cela change tout quand les députés n'ont pas rêvé d'une carrière politique. Auparavant, vous pouviez les faire rentrer dans le rang en les menaçant de ne pas les investir pour les prochaines élections. 

C'est une menace qui fonctionne chez un politique qui a voué trente ans de sa vie à un parti pour devenir parlementaire. Mais c'est une menace qui dysfonctionne quand le mandat de député est envisagé comme une simple ligne sur le CV, un honneur fugace et révocable. 

Reste que les députés qui le quittent aujourd'hui ont été élus grâce au chef de l'Etat. Ils ont recueillis des suffrages en s'engageant à soutenir l'action du président de la République, tous portés à l'époque par sa popularité. 

Est-ce loyal de profiter de la vague, mais de déserter le navire encalminé ? Pas sûr. Le rejet de l'étiquette est parfois aussi un rejet de l'éthique.

Frédéric Says

L'équipe